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LuxFilmFest / Virées new-yorkaises
„Jack’s Ride“, en compétition officielle du LuxFilmFest

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Parce qu’il lui reste quelques mois à devoir bosser avant de pouvoir officiellement toucher sa retraite, Joaquin Calçada, Jack pour les intimes, doit collectionner les estampes et signatures prouvant qu’il a essayé de trouver du taf mais qu’on n’a pas voulu de lui, qu’il n’en a pas trouvé. Pour qui a déjà essayé de toucher du chômage au Pôle emploi luxembourgeois, le procédé doit être familier, un procédé dont l’absurdité montrée ici n’est pas sans rappeler en partie „I, Daniel Blake“ de Ken Loach, quoique le ton soit plus léger, plus mélancolique dans cette virée de Jack.

Traversant le Portugal d’aujourd’hui – ce pays qui, quand il le quitta, fut encore plongé dans un régime autoritaire et qu’il retrouva changé à son retour – dans une épopée absurde, une chasse aux estampes administratives, Joaquin se met à se remémorer sa vie passée d’émigrant, les souvenirs de son existence new-yorkaise commençant à affluer, doublant ce „ride“ d’un deuxième, un chouia plus glamour: après avoir quitté son pays natal, Jack devient chauffeur de taxi puis de limousine.

Non sans fierté, il dit avoir conduit des légendes comme Jackie Kennedy et avoir fait l’expérience immédiate des hauts et bas de la bourse à Wall Street. Certains soirs, il restait à attendre pendant des heures et des heures et ce jusqu’au petit matin, des „stockbrokers“ fêtards et enthousiastes qu’il devait ensuite ramener chez eux dans un état où ils n’étaient plus guère en mesure de dire où ce chez eux se situait.

Parsemant sa déambulation actuelle d’anecdotes – comment il s’évertuait à apprendre l’anglais avec un ami qui prenait des cours de langue, comment il avait connu une époque où il travaillait jour et nuit, ne voyant quasiment jamais son fils éveillé, le racontant avec un mélange de tristesse, de regret, mais aussi de joie d’avoir vécu le grand rêve américain et, surtout, d’avoir échappé aux régime en vigueur au Portugal – le film fait se fusionner passé et présent dans un road movie dénué de toute téléologie, où cet homme qui aurait pu être un „impersonator“ d’Elvis lui-même se plonge parfois, lors de séquences de make-believe, dans son moi new-yorkais passé.

Dans sa courte durée même, le film admet avec lucidité ses propres limites. Adoptant une forme hybride, entre fiction et documentaire, entremêlant passé (dans ce que raconte la voix narrative) et présent (la plupart des images filmées, abstraction faite de quelques reconstitutions passées), faisant donc contraster, comme le faisait le documentaire „1970“ de Tomasz Wolski, ce qui est montré et ce qui est narré, le procédé finit, à force de dérouler une mécanique un peu redondante, par s’épuiser. Le film se repose finalement un peu trop sur le charisme de son personnage principal, dont la dignité en impose.