L’histoire du temps présentLa consolation des affligés

L’histoire du temps présent / La consolation des affligés
A la fin du mois d’avril, le Gauleiter Simon promulgua plusieurs ordonnances particulièrement strictes contre les notables récalcitrants Photo: archives Tony Krier

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Il y a exactement 80 ans, les autorités nazies lançaient une campagne de répression contre les élites traditionnelles du Luxembourg, qu’elles accusaient de faire obstacle à leur œuvre. Mais en s’en prenant ainsi aux fonctionnaires, aux professionnels libéraux et à l’Eglise catholique, ils leur rendaient paradoxalement une partie de la légitimité perdue depuis l’invasion.

Au début de l’année 1941, tous ceux qui s’étaient uniquement résignés à l’annexion par l’Allemagne parce que celle-ci semblait avoir gagné la guerre reprirent espoir. Non seulement les Britanniques tenaient bon, mais ils étaient aussi sur le point de chasser les Italiens d’Afrique du Nord. L’armée de Mussolini était par ailleurs malmenée en Grèce. Mais au mois d’avril, la situation se retourna de nouveau en faveur de l’Axe.

Intervenant sur les théâtres d’opération où leurs alliés italiens étaient à la peine, les Allemands remportèrent de nouvelles victoires éclairs. A la fin du mois de mars, ils repoussèrent les Britanniques hors de Libye et le 6 avril, ils envahirent le royaume de Yougoslavie, par crainte qu’il ne s’allie à la Grande-Bretagne, mais aussi pour atteindre la Grèce et mettre fin à sa résistance. Un peu plus de trois semaines leur suffirent pour s’emparer des Balkans et de la mer Egée. L’image d’invincibilité du Troisième Reich était restaurée.

Dresser les Luxembourgeois

Ces nouvelles victoires allemandes eurent un fort impact psychologique sur la population du Luxembourg occupé. L’opposition, qui avait relevé la tête durant le premier trimestre, était redevenue discrète sans pour autant disparaître. Moins visible, elle n’en était que plus diffuse, ce qui à l’approche du premier anniversaire de l’invasion, avait le mérite d’agacer les autorités nazies, comme l’illustre cet extrait d’un rapport du Sicherheitsdienst du 13 mai 1941: „Die VdB hat sich dieses ganze Jahr bemüht, die Luxemburger von der unausweichlichen Notwendigkeit der neuen Ordnung zu überzeugen und in ihre Reihen zu führen, bevor es zu spät ist. Heute ist es schon zu spät für manche Luxemburger. Deshalb soll jeder sich sagen: ,Was bisher geschehen ist, wird nicht mehr rückgängig gemacht werden.‘ Und auch dies soll er sich sagen: Dass es gefährlich ist, Langmut und Nachsicht mit Schwäche zu verwechseln, und dass es auf die Dauer nicht genügt, süsslich zu lächeln und Pfötchen zu geben, die Ablehnung und den Groll aber weiter in den Herzen zu tragen.“

La métaphore était éloquente. La population du Luxembourg était un vilain petit chien qu’il fallait dresser. Son nouveau maître était bienveillant et continuerait à lui montrer qu’il ne voulait que son bien – les campagnes de séduction et de recrutement des organisations annexes du parti nazi reprirent de plus belle à cette époque. Mais il était aussi décidé à sévir au moindre signe de désobéissance ou d’ingratitude. Concrètement, le régime nazi au Luxembourg décida de sévir contre les élites traditionnelles. Il y avait de fortes têtes parmi les fonctionnaires, les intellectuels et les prêtres, il fallait les faire tomber.

Punir et humilier les élites traditionnelles

A la fin du mois d’avril, le Gauleiter Simon promulgua plusieurs ordonnances particulièrement strictes contre les notables récalcitrants. La Verordnung über Massnahmen auf dem Gebiet des Rechtsanwaltrechts du 19 avril 1941 lui permit d’emblée de frapper sept avocats d’une interdiction définitive d’exercer leur profession – quatre autres s’en sortirent avec une interdiction provisoire.

Pour que le message soit bien clair, leurs noms furent publiés dans la presse, tout comme ceux de dix cadres dirigeants des chemins de fer et de dix fonctionnaires, limogés sur la base de la Verordnung über Massnahmen auf dem Gebiet des Beamtenrechts du 31 mars 1941. Au même moment, près de 70 juges, instituteurs, avocats et fonctionnaires de l’administration centrale étaient astreints aux travaux forcés sur le chantier de l’autoroute Luxembourg-Trèves. En forçant ces hommes, qui étaient pour la plupart d’âge et peu habitués aux travaux physiques, à devenir des ouvriers terrassiers, le régime nazi ne cherchait pas seulement à les sanctionner, mais à les humilier et à les briser.

Le Gauleiter réfléchissait aussi à un moyen de punir ceux qui, malgré ses mesures, se révélaient incorrigibles. A en croire le rapport du SD du 13 mai 1941, il envisageait de déporter en Serbie nouvellement conquise près de 250 Juifs ainsi qu’une dizaine de familles luxembourgeoises non-juives, dont il jugeait l’attitude hostile au Reich.

Campagne anticléricale

L’Eglise catholique était quant à elle perçue comme un adversaire naturel par les autorités d’occupation nazies. Avant la guerre, elle avait été un pilier essentiel du régime en place, non seulement par son soutien de l’hégémonique parti de la droite, mais aussi grâce au rôle que ses institutions jouaient dans l’éducation ainsi que dans la prise en charge des pauvres et des malades. Le régime nazi devait se débarrasser de cet obstacle pour imposer son contrôle total sur la société.

Au début du mois de mai, onze prêtres furent expulsés vers la zone non occupée de la France parce que les autorités d’occupation les jugeaient trop francophiles. Sous le même prétexte, une série d’ordres religieux furent interdits et leurs biens confisqués par l’administration allemande. L’école pour jeunes filles Sainte-Sophie fut ainsi fermée sur décision du Gauleiter et l’ordre qui l’administrait dissous. Il en alla de même pour la congrégation des sœurs borroméennes dont les religieuses, qui travaillaient à la clinique d’Eich en tant qu’infirmières, furent expulsées le 15 mai 1941. Seules deux sœurs, spécialistes en imagerie médicale, furent autorisées à rester, le temps qu’on leur trouve des remplaçantes.

Autre mesure importante, le séminaire de Luxembourg fut supprimé et ses étudiants priés d’aller terminer leurs études à Trèves. Enfin, l’enseignement religieux dans les écoles fut soumis aux mêmes règles que celles en vigueur dans le Reich. Il devait dorénavant être dispensé par des laïcs et une obligation d’inscription spéciale fut introduite.

Octave 41

C’est dans le contexte de cette sécularisation autoritaire qu’eut lieu la première Octave depuis le début de l’occupation. Les autorités allemandes furent donc particulièrement vigilantes. Affirmant que le risque de bombardements aériens alliés était trop important, elles interdirent les processions. Les sermons furent, eux aussi, prohibés.

Cela n’empêcha pas des foules nombreuses de se rendre à la messe. Le dimanche 11 mai 1941, la cathédrale de Luxembourg était bondée. Après l’office, Mgr Philippe, l’évêque de Luxembourg, fut même acclamé par la foule. L’affluence fut grande aussi en dehors de la capitale, entre 3.500 et 4.000 fidèles se rassemblèrent par exemple à Diekirch. Par son caractère tout autant patriotique que religieux, l’Octave fut l’occasion pour beaucoup de Luxembourgeois d’exprimer leur dissension au grand jour.

L’Octave avait permis à de nombreux catholiques de manifester leur attachement à l’Eglise mais aussi à une tradition nationale que les occupants n’avaient pas osé interdire entièrement. Il est vraisemblable aussi que bien des gens qui étaient peu ou pas du tout croyants s’étaient joints à eux pour exprimer leur opposition au régime, sans risquer de se faire arrêter.

Malgré le silence de sa hiérarchie et en particulier de l’évêque sur les événements en cours, l’Eglise redevenait ainsi un symbole d’espoir et d’opposition. Il en alla de même pour tous les notables qui dans l’ensemble s’étaient soumis, mais qui étaient tout de même persécutés parce que le Troisième Reich ne se contentait pas d’une conversion de façade. En voulant faire un exemple, les nazis produisirent des martyrs.

Grober J-P.
29. Mai 2021 - 16.51

Und dann gab es da noch die "notables bienveillants" welche junge Leute verpfiffen haben, wenn sie z.B. d'Heemecht oder de Feierwoon auf der Mundharmonika gespielt haben. 1 Woche Beugehaft in der Villa Pauly.

de Schéifermisch
29. Mai 2021 - 14.22

Die Gnade der späten Geburt. Im Nachhinein ist gut reden oder schreiben, urteilen und verurteilen, wei man es ja dann besser weiss.

Robert Hottua
29. Mai 2021 - 10.52

Herr Artuso, im Luxemburger Wort wurde von 1933 an vehemente volksverhetzende Propaganda für die Nazis gemacht. "Wir begrüßen und bejahen den Autoritätsgedanken des Faschismus und des NS", ... die Masse und ihre psychosenhafte Denkart, etc. Wo bleibt dieses luxemburger Hassverbrechen bei Ihrer Geschichtsbetrachtung? Unauslöschliche Worte haben unauslöschliche Konsequenzen! MfG Robert Hottua