FranceL’assassinat de six civils français au Niger illustre les risques de l’opération Barkhane

France / L’assassinat de six civils français au Niger illustre les risques de l’opération Barkhane
Les six victimes travaillaient pour l’organisation humanitaire „Acted“ Photo: AFP/Boureima Hama

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Le président Macron préside ce matin un Conseil de défense exceptionnel consacré aux suites de l’assassinat par des terroristes islamistes, ce dimanche, de six travailleurs humanitaires français au Niger et de leurs deux accompagnateurs locaux. Il a d’ores et déjà condamné „cette attaque meurtrière qui a lâchement frappé un groupe de travailleurs humanitaires“.

L’attaque a eu lieu à 6 kilomètres à l’est de la localité de Kouré, laquelle se trouve à moins d’une heure de voiture de la capitale nigérienne, Niamey. Les six travailleurs humanitaires voulaient profiter de leur jour de repos pour explorer un peu la région, considérée comme attractive depuis qu’un petit troupeau d’une espèce de girafes que l’on croyait disparue s’y est installé il y a une vingtaine d’années. L’organisation humanitaire Acted, pour laquelle ils travaillaient, avait déjà été visée plusieurs fois sur ses terrains d’intervention humanitaire.

L’histoire récente de l’engagement français dans cette région de l’Afrique de l’Ouest confrontée à une dégradation sécuritaire depuis des années face aux raids incessants du terrorisme islamiste constitue d’abord une longue liste de victimes dont toutes ne sont pas seulement des soldats, tant s’en faut. Depuis 2013, la France était déjà présente au Mali avec l’opération Serval; en 2014, elle a, avec l’opération Barkhane, étendu son action à quatre autres pays, en accord avec leurs dirigeants respectifs: le Burkina Faso, le Niger, la Mauritanie et le Tchad.

Au Niger, les trois assassinats précédents de Français avaient déjà eu pour victimes des civils, dont un militant humanitaire de 78 ans, enlevé dans le nord du Niger puis transféré au Mali et abattu par AQMI (Al-Qaïda au Maghreb islamique) après l’échec d’une opération de libération franco-mauritanienne. Deux jeunes Français, enlevés en plein centre de Niamey, furent aussi, l’année suivante, tués en territoire malien, l’un brûlé vif dans une voiture, l’autre fusillé par ses ravisseurs. C’est aussi au Mali que furent tués par AQMI deux journalistes de Radio-France internationale, Ghislaine Dupont et Claude Verlon. Et qu’une sexagénaire française, Sophie Pétronin, à la tête d’une association d’aide à l’enfance, est toujours retenue en otage depuis plus de quatre ans.

Des civils comme victimes

Certaines tentatives militaires ou des services secrets ont cependant abouti à des libérations mais la situation reste extrêmement difficile dans ce territoire immense et au redoutable climat – à tous les sens du mot. Car les islamistes n’hésitent pas – au contraire, même – à s’en prendre, depuis une dizaine d’années, à des travailleurs humanitaires, qui ne sont pas vraiment protégés par une population locale terrorisée. Quant aux 5.100 soldats français déployés dans le cadre de l’opération Barkhane, ils ne peuvent évidemment consacrer toute leur activité à la seule sécurisation de ces hommes et ces femmes de bonne volonté.

M. Macron a déjà pressé ses partenaires européens de s’engager plus activement dans la lutte antiterroriste au Sahel. En 2018, les troupes françaises ont reçu le renfort de trois gros hélicoptères Chinook britanniques et de 90 hommes de la Royal Air Force, puis, la même année, d’une cinquantaine de soldats estoniens déployés à Gao. Deux hélicoptères de type Merlin et 70 soldats danois les y ont rejoints en 2019; cette année, des Suédois et des Tchèques vont en faire autant. Quant aux Etats-Unis, ils fournissent à l’armée française, grâce à leurs drones déployés sur place, de précieuses informations.

La France n’est donc pas tout à fait seule dans cette redoutable aventure. Mais on espère davantage à l’Elysée, où l’on ignore pas que si l’opinion n’accorde pas toujours à la géopolitique toute l’attention qu’elle mérite, en revanche les guerres lointaines et meurtrières y sont rarement populaires. Y compris quand elles tuent – aussi – des civils.