La première présidence de l’UE tend les bras au Belge Herman Van Rompuy

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Le Premier ministre belge Herman Van Rompuy semblait bien parti jeudi soir pour devenir le premier président de l'Union européenne, tandis qu'une femme, la Britannique Catherine Ashton devrait devenir chef de la diplomatie de l'UE.

La présidence suédoise de l’UE a officiellement proposé cette solution aux 27 dirigeants des pays de l’UE lors d’un sommet des dirigeants européens à Bruxelles, a indiqué un porte-parole du gouvernement tchèque. Et selon une source diplomatique européenne de haut rang, M. Van Rompuy et Catherine Ashton semblent „assurés“ d’obtenir les deux postes, à la suite de plusieurs consultations entre d’une part la présidence suédoise de l’UE, et la France, l’Allemagne, la Grande-Bretagne et l’Italie, qui tous soutiennent cette solution. La proposition de la Suède, fruit d’intenses négociations, doit encore être entérinée par tous les pays de l’UE. Ces deux postes, prévus par le traité de Lisbonne doivent permettre à l’Europe de mieux faire entendre sa voix sur la scène internationale, face aux Etats-Unis et aux puissances émergentes. Toutefois, les dirigeants européens paraissent avoir fait le choix de personnalités peu connues, y compris en Europe même, et discrètes, dont la tâche ne sera pas aisée pour parler d’égal à égal avec le président américain Barack Obama ou le président chinois Hu Jintao. M. Van Rompuy entend se contenter d’un rôle en retrait de facilitateur de compromis, ce qui devrait laisser tout loisir aux pays comme la France, le Royaume-Uni ou l’Allemagne de continuer à donner le ton pour les affaires diplomatiques européennes. La Grande-Bretagne a débloqué la situation juste avant l’ouverture du sommet européen jeudi soir en acceptant de renoncer à la candidature de Tony Blair pour la présidence de l’UE. M. Blair était rejeté par plusieurs pays en raison du soutien qu’il a apporté à la guerre en Irak et à l’ancien président américain George W. Bush, ainsi qu’en raison de convictions européennes jugées trop timorées par ses détracteurs. Le Premier ministre Gordon Brown s’est finalement rallié à la candidature alternative de la commissaire européenne britannique Catherine Ashton pour le poste de Haut représentant, à l’issue d’une réunion avec ses collègues chefs de gouvernement socialistes à Bruxelles. „Lorsqu’il est devenu clair (lors de cette réunion) qu’en raison de diverses considérations politiques et d’opinion variées“, la candidature de M. Blair n’aurait pas le soutien nécessaire, „alors le Premier ministre (Brown) a pris la décision décisive de proposer Catherine Ashton pour le poste de Haut représentant“ aux affaires étrangères de l’UE, a déclaré un porte-parole de M. Brown. „Nous n’avons pas entendu parler d’un blocage à l’encontre de la candidature de Catherine Ashton parmi les autres chefs d’Etats et de gouvernements“ de droite en Europe, a ajouté ce porte-parole. Mme Ashton est actuellement commissaire européenne chargée des dossiers commerciaux. Le poste de Haut représentant équivaudra à une fonction de quasi ministre des Affaires étrangères de l’UE. Son titulaire sera aussi vice-président de la Commission européenne. M. Van Rompuy, pour sa part, était en concurrence, outre Tony Blair, avec le Luxembourgeois Jean-Claude Juncker, le Néerlandais Jan Peter Balkenende, qui s’est retiré de la course jeudi soir en arrivant à Bruxelles, ainsi qu’avec l’ancienne présidente de la Lettonie, Vaira Vike-Freiberga, qui avait mené une campagne très active depuis plusieurs jours. L’annonce de la candidature de Mme Ashton a réduit à néant ses chances, car il paraît improbable que deux femmes occupent les postes européens en jeu.

Herman Van Rompuy, le faux discret
Le Premier ministre belge, Herman Van Rompuy, favori pour devenir le premier président de l’Union européenne, est un homme dont la force a toujours consisté à se rendre incontournable par sa capacité à ne fâcher personne, en masquant une froide détermination. Jamais en position de demandeur, ce chrétien-démocrate flamand de 62 ans, parlementaire depuis 1988, aime à apparaître au-dessus de la mêlée. Aussi s’est-il fait longuement prier avant de consentir à prendre la tête du gouvernement belge en décembre 2008, répétant qu’il n’était pas candidat, avant de finalement céder. Histoire de tempérament plus encore que de calcul. „Moi je suis plutôt l’homme d’action, lui est plus cérébral“, a confié son frère cadet Eric, également dans la politique mais militant beaucoup plus virulent de la cause flamande. La silhouette austère d’Herman, une calvitie surplombant un visage pointu et un regard malicieux, renforcent l’impression d’intellect chez un homme qui étudia chez les Jésuites et plancha sur Saint Thomas d’Aquin avant de se consacrer à l’économie. Ce féru de littérature (notamment française et allemande) continue d’alimenter son blog de haïkus –petits poèmes à la mode japonaise– en néerlandais. Cette pratique l’aida à endurer la longue traversée du désert (1999-2007) infligée aux chrétiens-démocrates durant les deux gouvernements du libéral Guy Verhofstadt. La Belgique, en proie depuis juin 2007 à une nouvelle crise entre ses communautés néerlandophone et francophone, a senti depuis 10 mois tout le bien que pouvait lui faire un tel homme, doté en outre d’un sens aigu de l’humour et de manières affables. Et surtout qui ne se laisse pas aller à froisser les susceptibilités, contrairement à son prédécesseur Yves Leterme, qui avait irrité beaucoup de francophones. Apprécié du roi Albert II, il est considéré plutôt comme un modéré sur les dossiers linguistiques qui divisent les Belges. Il a effectivement réussi à pacifier l’atmosphère entre les partis politiques flamands et wallons, qui empêchait toute négociation sérieuse sur la réforme des institutions du royaume réclamée par la Flandre. La fameuse „méthode Van Rompuy“ a consisté en premier lieu à imposer à ses ministres de garder le silence en public, puis à écouter les opinions des uns et des autres, avant de trancher. Ce catholique pratiquant, père de quatre enfants (deux fils et deux filles), a également montré sa capacité à affronter la crise économique. Il a réussi à faire voter en octobre un budget 2010 de rigueur mais épargnant la sécurité sociale, alors que dans son gouvernement cohabitent cinq partis, dont des socialistes et des libéraux. L’exercice lui est familier: Herman Van Rompuy a été de 1993 à 1999 ministre du Budget du gouvernement qui a fait entrer la Belgique dans la zone euro. C’est bien plus cette capacité à créer du consensus, qualité recherchée pour la présidence du Conseil européen, que sa vision d’avenir d’une Europe unie qui fait de M. Van Rompuy un bon candidat aux yeux, notamment, de Paris et de Berlin. La presse belge s’est même interrogée sur la profondeur de ses convictions européennes, nettement moins affichées que celles de l’ancien Premier ministre libéral belge Guy Verhofstadt, un militant fédéraliste européen à tous crins. Mais une fois de plus, la discrétion de M. Van Rompuy pourrait finalement tourner à son avantage, en lui évitant de subir le sort de M. Verhofstadt, un temps favori en 2004 pour être président de la Commission européenne, avant que le Royaume-Uni ne mette son veto.