En Allemagne, une ville-usine d’ArcelorMittal s’inquiète pour son avenir

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\"Cet acier est fondu ici et le restera!\" Ce slogan sur une plaque du centre d'Eisenhüttenstadt, à la frontière germano-polonaise, rappelle que l'acier est la raison d'être de la ville.

Une symbiose inquiétante pour la commune et sa région quand son propriétaire actuel, le numéro un mondial de l’acier ArcelorMittal, réduit drastiquement sa production.
La „ville des forges“, fondée de toute pièce au début des années 1950 par le régime d’ex-Allemagne de l’Est, comptait à son apogée six hauts-fourneaux et 12.000 salariés, faisant vivre 50.000 habitants. Aujourd’hui encore, les deux hauts-fourneaux rescapés dominent les pâtés d’immeubles soviétiques qui s’alignent le long des rues Karl-Marx ou Rosa-Luxemburg.
 Mais l’usine Eko Stahl, privatisée au début des années 1990 et aujourd’hui partie du groupe ArcelorMittal, a perdu de sa superbe: elle n’emploie plus que 2.700 personnes et la commune, baptisée un temps „Stalinstadt“, ne compte plus que 33.000 habitants.
 Avec la crise économique et la baisse mondiale de demande d’acier, 2.350 salariés sont au chômage partiel. „En moyenne, ils chôment une dizaine de jours par mois“, explique le porte-parole du sidérurgiste à Eisenhüttenstadt, Jürgen Schmidt. La situation devrait encore empirer puisque le numéro un mondial du secteur a décidé une nouvelle réduction de la production: à l’avenir, seul le plus petit des deux hauts-fourneaux restera en activité. Il s’agit de „mesures temporaires“ qui seront réexaminées dès que la situation s’améliorera, assure la direction.
Mais les représentants du personnel sont sceptiques: produire moins entraînera une hausse des coûts de production, et l’aciérie n’aura pas les moyens de répondre à une hausse de la demande quand la situation s’améliorera, explique Frank Balzer, vice-président du comité d’entreprise. De plus, la remise en service d’un haut-fourneau est une opération longue. „Nous aurons les mauvaises cartes en main“, résume-t-il.
 „Les salariés sont furax contre la direction de l’usine, qui a attendu qu’ArcelorMittal prenne des décisions sans lui proposer d’alternative“, assure Steffen Hafki, du syndicat de la métallurgie IG Metall. Pour lui, les intérêts d’Eko Stahl ne sont pas suffisamment défendus au siège du groupe, à Luxembourg.
 Le comité
d’entreprise veut à présent convaincre la direction de continuer à produire avec le plus grand des hauts-fourneaux et attend sa réponse pour décider d’une mobilisation. La ville a déjà connu de grandes manifestations au début des années 1990, lorsqu’elle a craint une fermeture du site. Aujourd’hui, „elle a de nouveau intérêt à se mobiliser“, estime M. Hafki. Car 3.000 emplois chez des sous-traitants et des prestatataires de service dépendent de l’activité de l’aciérie. Et „de chaque salarié de l’usine dépendent quatre emplois en ville“ dans les commerces ou les services, selon les calculs de M. Schmidt.
L’aciérie joue aussi un rôle important dans la vie culturelle et sportive, en finançant diverses manifestations. Le maire Rainer Werner, un ancien d’Eko Stahl, a d’aileurs interrompu ses vacances après les annonces d’ArcelorMittal. La mairie „soutient les revendications du comité d’entreprise“, selon son porte-parole Torsten Gottschlag.
ArcelorMittal reste de loin „le plus important employeur“ de la région, où le taux de chômage atteint 13,6%, contre 8,6% pour toute l’Allemagne, explique Thilo Kunze, porte-parole de la chambre de commerce d’Ost-Brandenburg. „Quand ça ne va pas bien chez eux, c’est peu réjouissant pour l’ensemble de la région“.