ÉDITORIAL : Le perdant est…

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... l’Europe, une Union déjà en perdition depuis plusieurs années./ Danièle Fonck

Voilà ce qu’on peut dire sans se montrer désobligeant face aux deux „nommés“ d’hier soir, le premier ministre belge et la commissaire européenne britannique Catherine Ashton.
Car le fait est que désormais, l’UE aura à sa tête, en guise de „Monsieur Marketing“ et de „Madame Communication“ deux personnages certes intelligents et cultivés, mais avant tout sans grand charisme.
Qui, il y a un an seulement, connaissait Herman Van Rompuy? Et qui le connaît aujourd’hui, mis à part les Belges?
Or, voilà l’homme qui sera amené à défendre les intérêts européens face à Obama, à Medvedev et Poutine ou face aux Chinois, sans tergiverser, sans céder, sans pâlir. Le fait que l’Union européenne disposera pour la première fois depuis sa création d’un président en exercice à part entière, de même qu’un chef de la diplomatie, constitue certes un événement historique. C’est une chance et une opportunité extraordinaire permettant à une entité forte de 485 millions d’hommes et de femmes d’exister pleinement sur la scène internationale en faisant valoir sa voix, une seule voix, dans les enceintes internationales et dans le dialogue avec ses grands partenaires.
Encore faudra-t-il que ce président dispose des moyens d’exister. Il devrait avoir d’office un droit de participation aux principaux conseils ministériels, tout comme il devrait représenter l’UE d’emblée dans les cénacles au plus haut niveau tel le G8 ou le G20.

Victoire du trio Merkel-Sarkozy-Brown

Existe-t-on quand on ne saurait parler franchement ou n’exprimer un avis qu’après avoir référé avec les principaux Etats membres et avoir obtenu le feu vert? Est-on pris au sérieux si on ne sait lancer des ballons d’essai pour défricher de nouvelles terres, faire en sorte que des sujets jusque-là tabous ne deviennent matière à débat, discussion et décision? Dans un papier tout à fait remarquable, le philosophe Nic Klecker (Kulturissimo no 82) pointe les faiblesses de la nouvelle fonction, indépendamment de son titulaire:
„En politique, une collectivité, un ensemble de citoyens, élit un président. Si quelqu’un est ’nommé’ président, par quelque groupe de gens que les citoyens ne voient pas, ne connaissent pas, alors il ne saurait être leur président.“
Le jour où l’Europe sera capable de faire élire son président au suffrage universel, elle sera une vraie entité de peuples. Pour l’instant, nous en sommes loin. Il s’agira, au cours des mois à venir, de donner un contour à une fonction qui en manque singulièrement.
De la personnalité, du charisme et de la volonté politique de l’heureux „élu“ dépendra l’image de l’UE. Cela exige aussi du nouvel homme une connaissance aiguë des peuples de l’Union et de leur diversité, du doigté et de la sensibilité pour les différences nationales et régionales, de leur histoire qui a façonné leurs mentalités, de leurs sensibilités politiques et sociales, de leurs cultures au sens le plus large du terme.
Il devra, avant et surtout, avoir une prise de conscience de tous les instants pour tout ce qui touche à la justice, à l’équité, à la solidarité.
Car seule une société européenne basée sur l’équité (rien à voir avec l’égalitarisme) n’aura de sens.
Mais voilà!
Merkel et Sarkozy ont imposé Van Rompuy, un brave de leur famille politique qui ne leur fera pas d’ombre de sorte qu’ils puissent continuer à parader comme des grands.
Et Gordon Brown, en bon Britannique, a su tirer son épingle du jeu. En renonçant à Blair, après avoir avancé le pion Miliband pour mieux le reculer, il a sorti sa dame et s’attribue par la même occasion le contrôle de la politique étrangère européenne.
Dans cette partie entre „grands“, un Luxembourgeois n’avait guère sa chance.

dfonck@tageblatt.lu