Dans trois mois exactement aujourd’hui aura lieu le premier tour de l’élection présidentielle. Ce scrutin à deux tours, qui vise à assurer à l’élu(e), au final, une majorité absolue des suffrages, impose des choix tactiques particuliers pour les candidat(e)s ayant une chance raisonnable de figurer au second. Et tel est bien, actuellement, le problème majeur de trois d’entre eux.
Les sondages, toujours aussi décriés mais en fait passionnément scrutés, fournissent en effet, à ce jour, trois indications majeures. La première est qu’Emmanuel Macron, quels que puissent être à l’occasion ses erreurs ou ses dérapages, reste clairement en tête des intentions de vote pour le 10 avril, avec environ 25%. Autre indication: à l’inverse, sauf miracle en leur faveur, les sept ou huit candidats de gauche et d’extrême gauche n’ont, eux, aucune chance de figurer au second tour.
Eric Zemmour a brûlé toutes ses cartouches
Mais la troisième leçon des sondages, qui concerne les trois candidats de droite, conserve, quant à elle, sa part de mystère: qui, de Valérie Pécresse pour les Républicains, Marine Le Pen pour le Rassemblement national ou Eric Zemmour qui la concurrence à l’extrême droite, peut espérer arriver en deuxième position au premier tour, et donc, selon toute vraisemblance, affronter le président sortant lors du second, le 24 avril? C’est au fond une autre primaire, qui ne dit pas son nom.
Chacun son heure de gloire, et puis …
Chacun des trois a eu son heure de gloire. Longtemps, c’est la candidate du Rassemblement national qui a régné sur les intentions de vote, allant même parfois jusqu’à dépasser Emmanuel Macron: elle n’avait alors ni rival à l’extrême droite ni adversaire investi par la droite modérée, même s’il était évident qu’elle finirait par en avoir un … ou une. Puis vint le tour d’Eric Zemmour au début de l’automne: l’entrée en lice fracassante du polémiste n’allait pas tarder à reléguer au second plan une Marine Le Pen qui perdait ainsi son leadership sur cette famille politique et sa prééminence sur toute autre personnalité d’opposition.
Et au moment où la candidature Zemmour commençait à perdre un peu de son dynamisme dans les sondages, au profit de Mme Le Pen, nouvelle déconvenue pour cette dernière: Valérie Pécresse, après avoir remporté haut la main la primaire des Républicains et avoir été de ce fait investie pour la présidentielle, allait lui prendre la première place du trio. Plus cruel même: un sondage devait la donner, un temps, vainqueur de Macron au second tour.

Après quoi les cotes de chacune de ces trois personnalités ont fluctué, à l’intérieur d’une fourchette allant, en gros, de 13 à 18% des intentions de vote, les deux femmes tendant à surpasser désormais régulièrement Zemmour de quelques points, mais sans qu’aucun protagoniste puisse encore se considérer comme assuré de figurer ainsi au second tour.
Pécresse, à droite toute
Si le polémiste d’extrême droite semble avoir le plus pâti de ces dernières semaines de campagne, c’est sans doute faute de disposer d’un vrai parti, mais surtout d’un vrai programme. Sa condamnation obsessionnelle de l’immigration sans contrôle et du danger islamiste, quoique perçue comme fondée par une partie importante de l’opinion, ne suffit pas à faire un président, c’est-à-dire un homme qui aura (aussi) pour cinq ans, fût-ce en principe par ministres interposés, la charge de tant d’autres choses! D’autant plus que sur son sujet-fétiche, il avait déjà tout dit dans ses premiers jours de campagne …
Mme Le Pen, de son côté, s’est assez habilement employée à afficher une grande sérénité face à un Zemmour survolté et grandiloquent, et elle a repris l’avantage sur lui. Elle avait déjà modéré ses positions depuis des années pour „dédiaboliser“ le parti qu’elle avait hérité de son père. Elle réserve aujourd’hui ses principales flèches au président Macron, en laissant ses lieutenants s’en prendre à son adversaire LR sur le thème: „Elle nous copie pour essayer de prendre nos voix.“

Car il faut bien dire que de son côté, Valérie Pécresse, entrée dans la compétition avec l’image d’une femme assez proche des centristes (voire de Macron, lui reprochaient ses adversaires internes au parti), a finalement mis la barre très à droite. Bien sûr, il lui faut, coûte que coûte, sortir en vainqueur de cette compétition pour le second tour. Bien sûr aussi, elle doit tenir compte de son aile radicale, incarnée par Eric Ciotti qu’elle avait finalement battu lors de la primaire LR et qui la soutient depuis mais en y mettant des conditions.
Il n’empêche: après avoir rassemblé son camp au premier tour, comme il est d’usage, il lui faudra, au second, si c’est elle qui affronte Macron, réunir parmi les électeurs une nouvelle majorité présidentielle, aux sensibilités nettement plus diverses.
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