Samstag25. Oktober 2025

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FranceLe centriste François Bayrou, ombrageux supporter de Macron, est nommé premier ministre

France / Le centriste François Bayrou, ombrageux supporter de Macron, est nommé premier ministre
Le nouveau premier ministre français François Bayrou (g.) salue le premier ministre sortant, Michel Barnier Photo: AFP

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Une semaine après la démission du gouvernement Barnier à la suite du vote d’une motion de censure, Emmanuel Macron a nommé hier le président du MoDem (Mouvement des Démocrates) François Bayrou comme nouveau premier ministre. Cette nomination, qui avait d’abord été annoncée pour jeudi au plus tard, a été précédé hier matin d’un entretien de près de deux heures – et que l’on dit houleux – entre les deux hommes.

Emmanuel Macron avait dit jadis, à propos d’un autre remaniement, qu’il était „le maître des horloges“, et l’ancien ministre chiraquien Charles Pasqua, que „les promesses n’engagent que ceux qui y croient“. La secrétaire générale des Verts, Marine Tondelier, a eu beau jeu de remarquer hier, avec un bel esprit de synthèse, qu’avec son engagement non tenu de nommer un nouveau premier ministre d’ici 48 heures (on était alors mardi), Emmanuel Macron avait surtout fait la preuve persistante que „ses promesses n’engagent que ceux qui lui demandent l’heure.“

Il n’empêche: même si la classe politico-médiatique a trouvé le temps long depuis la chute du gouvernement Barnier, en se demandant fébrilement ce que cette hésitation pouvait encore cacher, le locataire de l’Elysée aura tout de même fait, cette fois-ci, avec la nomination de François Bayrou, sensiblement plus vite que pour choisir Michel Barnier. Même si, dit-on, la chose n’est pas allée de soi hier matin encore, certaines rumeurs laissant même à penser que M. Macron avait d’abord dit non à son supporter centriste, lequel aurait piqué une telle colère que le président a préféré changer d’avis.

Quoi qu’il en soit, après avoir hésité à confier la direction du gouvernement à une personnalité issue de la gauche modérée – le nom de l’ancien premier ministre socialiste Bernard Cazeneuve avait notamment été évoqué à plusieurs reprises – le chef de l’Etat a donc finalement donné la préférence à un responsable politique à la fois proche de lui, modéré lui aussi politiquement, mais chef de parti, de caractère volontiers ombrageux, et point trop mal vu, dans l’ensemble, par les différents courants représentés au Parlement.

Pas de censure automatique du RN

À l’exception, il est vrai, mais elle était hautement prévisible, de La France Insoumise de Jean-Luc Mélenchon; laquelle a annoncé, avant même que soit composé le nouveau gouvernement, et à plus forte raison que M. Bayrou ait prononcé devant le Parlement sa déclaration de politique générale, qu’elle allait aussitôt déposer une nouvelle motion de censure. Mais le reste de la gauche, tout en restant circonspecte, est plus mesuré, et attend de voir se préciser les lignes de force du gouvernement Bayrou avant d’arrêter sa stratégie. Même si, selon plusieurs responsables du PS, il n’est pas question, pour les socialistes, de participer à un tel cabinet.

Quant au Rassemblement national de Marine Le Pen, il entame sa relation avec l’équipe Bayrou un peu comme il l’avait fait avec l’équipe Barnier: en indiquant qu’il n’y aura pas de sa part une volonté de principe de la censurer, même s’il ne s’interdit pas d’avoir recours à cette procédure si certaines barrières sont franchies. Certes, le centrisme traditionnel du nouveau premier ministre peut sembler plus éloigné des positions du RN que celles de la droite classique, dont M. Barnier était issu, sur l’immigration notamment. Mais dans un domaine au moins, une convergence existe cependant: l’intention d’instaurer en France une forme de représentation proportionnelle pour la désignation des députés. Et puis le leader centriste est perçu par le RN comme un adversaire qui n’a jamais dénigré en masse, ni cherché à ostraciser, les électeurs lepénistes.

C’est dire qu’au total, le nouveau titulaire de Matignon n’entame pas sa nouvelle aventure – à laquelle tout le monde sait bien qu’il aspire depuis fort longtemps – dans de trop mauvaises conditions, du moins pour un homme qui s’est jusqu’alors beaucoup affiché dans l’ombre d’Emmanuel Macron, à la première élection duquel il avait pris une part active en 2017.

C’est d’autant plus vrai que le Nouveau Front populaire (NFP), regroupant à l’origine les communistes, le PS et les Verts, sous la férule de La France Insoumise et surtout de son chef, sort tout de même assez cabossé des dernières péripéties politiques. Lesquelles ont vu les socialistes, en particulier leur premier secrétaire Olivier Faure, prendre nettement leurs distances avec M. Mélenchon, qui, depuis, les couvre de reproches et parfois d’injures, bien que le PS ait clairement indiqué qu’il „resterait dans l’opposition au Parlement“. Quant aux communistes, ils ont fait savoir que si le nouveau gouvernement ne s’abritait pas derrière l’article 49-3 de la Constitution, leur parti ne déposerait pas de motion de censure.

Barnier: „Je savais que mon temps était compté“

Reste il est vrai à voir quelle sera, en définitive, l’attitude des Républicains. Quelles que fussent leurs réserves à l’égard de M. Barnier, il leur était bien difficile de s’opposer frontalement à un homme qui venait de leurs rangs; surtout après la sévère déconvenue qu’ils venaient de subir aux dernières élections législatives. Cette fois-ci, leur rapport avec le chef du gouvernement sera probablement différent, surtout si M. Bayrou s’applique à restaurer, fût-ce en demi-teinte, ce que fut la politique de M. Macron.

Mais là aussi, leur engagement, du soutien relatif à l’hostilité prononcée, en passant par toute une gamme de nuances possibles, dépendra largement de la composition de la nouvelle équipe ministérielle. Le maintien, ou au contraire l’éviction, de certaines figures de la droite décomplexée, comme Bruno Retailleau qui avait commencé à s’affirmer comme un ministre de l’Intérieur à poigne, pourrait y jouer un rôle non négligeable. Il est vrai qu’à l’inverse, il constituerait un motif de censure de la part des Verts, a également précisé Mme Tondelier.

D’une manière générale d’ailleurs, la composition de ce nouveau gouvernement, si l’on en croit la longueur des pourparlers qu’il avait fallu à Michel Barnier pour former le sien en accord avec l’Elysée, risque d’être la première et lourde épreuve qui attend François Bayrou au tournant. Surtout si ce dernier cherche vraiment à constituer „une équipe resserrée, représentant toutes les sensibilités“. Et sachant que, nouveau gouvernement ou pas, la composition de l’Assemblée nationale, elle, n’aura pas changé.

Notamment quand il faudra faire voter un nouveau budget, et commencer à réduire enfin la dramatique dette publique française, à laquelle, au cours de la passation de pouvoirs qui a eu lieu hier soir dans la cour de Matignon, tant le premier ministre sortant que son successeur ont fait référence comme à une ardente obligation. Quant à Michel Barnier, philosophe, il a notamment glissé dans son discours cette petite phrase: „Dès le début, je savais que mon temps était compté!“