Pakistan: poursuite des combats et de l’exode massif dans la vallée de Swat

Jetzt weiterlesen! !

Für 0,59 € können Sie diesen Artikel erwerben.

Sie sind bereits Kunde?

Déterminée à «éliminer» les talibans dans la vallée de Swat, l'aviation pakistanaise a continué vendredi de bombarder la ville de Mingora contrôlée par les fondamentalistes armés dans le nord-ouest du pays vendredi, alors que des centaines de milliers d'habitants fuyaient la zone des combats ou espéraient une accalmie pour le faire.

L’ONU estime que les affrontements de ces derniers jours ont fait 500.000 réfugiés. Selon Ron Redmond, un porte-parole du Haut commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR), près de 200.000 personnes sont arrivées dans les zones sécurisées ces derniers jours tandis que 300.000 autres se trouvent sur les routes ou sont sur le point de fuir. Autant de réfugiés qui s’ajoutent aux 500.000 déjà recensés par le HCR dans le nord-ouest du Pakistan en août 2008. Environ un million de déplacés sont désormais comptabilisés dans cette région frontalière de l’Afghanistan, et l’accalmie n’est pas en vue.
Le Premier ministre pakistanais Yusuf Raza Gilani a déclaré jeudi soir que son gouvernement était déterminé à «éliminer les éléments qui ont détruit la paix et le calme du pays et ont voulu prendre le Pakistan en otage par la force des armes». Il a demandé à «la population pakistanaise de soutenir le gouvernement et l’armée dans cette période critique». Poussé à réagir par son grand allié et financier américain qui a opté pour une politique régionale de lutte contre les talibans et combattants d’Al-Qaïda réfugiés dans les zones tribales, Islamabad a donc fait son deuil de l’accord de paix conclu en février avec les talibans contre l’avis de Washington. Le contrat prévoyait la fin des affrontements en échange de l’application la plus stricte de la loi islamique (charia) dans la vallée de Swat, mais dès le mois dernier les fondamentalistes de Swat l’ont violé pour s’emparer du district voisin de Buner, situé à une centaine de kilomètres seulement à l’ouest de la capitale. «Les gens ont vu le vrai visage» des talibans, a analysé le général pakistanais Athar Abbas. «Ils ont compris que leurs projets allaient bien au-delà de la charia. L’expansion est leur objectif».
Les opérations ponctuelles lancées par l’armée dans les zones tribales ces dernières années n’avaient pas permis de débarrasser la région frontalière des djihadistes, se soldant par de nombreuses morts civiles et destructions massives qui ont rendu le gouvernement et l’armée impopulaires. Les opérations militaires actuelles se déroulent dans trois districts couvrant quelque 1.000 kilomètres carrés de territoire, mais le plus gros des combats se déroule dans la principale ville de la vallée de Swat, Mingora, qui comptait environ 360.000 habitants avant que les talibans n’en prennent le contrôle il y a deux ans.
Des dizaines de milliers d’habitants se trouvent encore à Mingora, où certains affirment que les talibans ne veulent pas les laisser partir, peut-être pour s’en faire des «boucliers humains» susceptibles de retenir les coups d’Islamabad. «Nous voulons quitter la ville mais nous ne pouvons pas à cause des combats», explique ainsi Hidayat Ullah. «Nous serons tués, nos enfants seront tués, nos femmes seront tuées et ces talibans vont s’échapper», se lamente-t-il, «tuez les terroristes, mais nous ne faites pas de mal!» L’armée affirme avoir tué plus de 150 fondamentalistes armés et perdu quelques soldats depuis le début de son offensive la semaine dernière, sans que l’on puisse le vérifier de source indépendante. Elle ne livre en revanche aucune estimation des morts civiles dont des témoins et médias locaux font état. Mais jeudi, 45 civils blessés par balles ou par des éclats d’obus étaient soignés dans un hôpital de Mardan, au sud de la zone des combats. Les camps et hôpitaux du secteur étant dépassés par l’afflux de réfugiés, le Premier ministre a demandé l’aide internationale pour faire face à la crise.