Oui, non

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Quand l’heure est grave, on assume

La crise financière de 2008, dont l’apogée fut probablement la faillite retentissante de la banque américaine Lehman Brothers est sûrement l’une des causes non dites de la montée des peurs dans les démocraties occidentales et un accélérateur non identifié d’un populisme rampant qui a, depuis lors, renforcé l’extrémisme jusque dans les classes moyennes supposées bien formées et informées.

Le populisme de droite, ainsi les meilleurs analystes, très présent dans les milieux conservateurs, aime à cliver la société en opposant systématiquement le „peuple“ à l’establishment, c’est-à-dire aux „élites“. Le passage du populisme à l’extrémisme de droite est étroit et aisé si on y prend garde. Les arguments ressemblent à une recette de cuisine: immigration, peur de l’autre, rejet de l’Europe, spectre de la mondialisation sauvage. La façon d’évoquer la digitalisation est, de ce point de vue, symptomatique. Et en parfaits experts de la démagogie, l’extrême droite dont les chefs de file sont tous formés pour être de brillants tribuns qui de l’agora font leur théâtre au quotidien, sait utiliser et manipuler la peur pour avancer vers sa conquête du pouvoir.

Autre cheval de bataille: les médias. Tous pourris, tous complices, tous détenus par la finance, tous partie d’un complot planétaire. Un argument massue dans des sociétés déstabilisées en termes de valeurs, inquiètes face à des lendemains qui déchantent, épuisées par des années de chômage massif et des cures d’austérité. Déstabilisées aussi du fait du terrorisme, alors que ce dernier n’est pas nouveau. A l’heure des réseaux sociaux, les mémoires rétrécissent. Qui se souvient encore de Prima Linea, des Brigades rouges, de la Bande à Baader? D’Aldo Moro assassiné sauvagement, des rapts violents tels celui du baron Empain, etc., etc.?

Aujourd’hui, ce terrorisme a changé de nature. Il est devenu religieux. Mais là encore la question de départ reste la même. Si le monde était plus juste, si vivre au Moyen-Orient était possible dans la dignité, si le partage des richesses était plus équitable, serions-nous face à la même violence?

Qu’est-ce qui, hier et aujourd’hui, facilite le travail des endoctrineurs et permet d’attirer tant de jeunes dans leurs filets de la haine et de la mort? En bonne extrémiste de la droite (et non point „simple“ populiste), Marine Le Pen, de son vrai nom Marion Anne Perrine Le Pen, mise sur la démocratie directe. „Le peuple choisira“, „Le peuple décidera“, „Je ne ferai rien contre le peuple“, voilà ses slogans favoris. Quel peuple?

L’agriculteur qui bouche difficilement ses fins de mois, le chômeur, le salarié dont l’entreprise sera délocalisée, le retraité qui gagne 800 €/mois? Marine, „la fille du peuple“, comme le dit son négationniste de père Jean-Marie Le Pen. Non, Madame Le Pen est tout sauf une fille du peuple. Elle est une héritière dans tous les sens du terme: héritière d’une fortune héritée par son père, belle vie à Saint-Cloud, avocate, présidente d’un Front national dont elle a hérité et dont elle transmet déjà partie de l’héritage à sa nièce. Une arnaque, en somme.

Cette femme qui pourrait devenir la première présidente de la République, serait une claque au visage de toutes les femmes, comme elle est une insulte pour tous ceux qui aspirent à une justice digne de ce nom, car sa justice à elle, c’est l’impunité. Il est terrifiant que tant et tant de nos voisins, issus du pays des Lumières et des droits de l’Homme, se laissent piéger par un discours autoritaire et sans fond. Et qu’ils soient si nombreux à ne pas comprendre qu’un vote blanc est un vote qui renforce le Front national.

Il y a des moments dans la vie de chacun où l’on fait des choix citoyens. Le choix, c’est oui, c’est non. Ce n’est pas „ni-ni“. Point n’est besoin, en ces heures graves, d’aimer le jeune, presque inconnu Emmanuel Macron.

Mais la France n’a pas besoin d’être demain une sorte de Hongrie.

dfonck@tageblatt.lu