Et cela, paradoxalement, sous l’œil de plus en plus désabusé et lointain de ceux qui constituent, en principe, sa majorité, fût-elle relative. Car ces derniers, dans ce combat central, préalable à toute action publique d’importance, qu’est le débat budgétaire, semblent partagés, à l’égard du texte qui leur est proposé, entre le manque d’adhésion et le manque d’intérêt. Et nombre d’entre eux semblent appliquer à eux-mêmes le titre d’un célèbre film humoristique de la fin des années 1970: „Courage, fuyons!“
Les premiers parce qu’ils sont réservés, pour ne pas dire plus, vis-à-vis de certaines hausses fiscales, destinées à amorcer la décrue des déficits publics français; les seconds parce qu’ils sont convaincus que ces empoignades verbales n’auront aucune suite réelle, et ne peuvent conduire qu’à un énième recours à l’article 49-3 de la Constitution. Lequel permettra au gouvernement, faute de majorité positive, de faire passer son texte sans vote si aucune motion de censure. Mme Borne en avait été, en son temps, la championne obligée; M. Barnier cherche à l’éviter, mais cette tentative d’apaisement du dialogue entre gouvernement et députés semble mal partie.
Cette tendance prononcée des députés du „bloc central“, ces derniers jours, à faire l’école buissonnière, aura largement aidé la gauche, avec le soutien intermittent du Rassemblement national, et même, ponctuellement, de certains élus macronistes ou LR, à faire passer, contre l’avis du gouvernement bien entendu, un nombre considérable de propositions – contenues dans pas moins de 472 amendements! – tendant à renforcer encore la très lourde pression fiscale pesant déjà sur les Français. Tout en supprimant au contraire les accroissements de recettes sur lesquelles comptait l’Etat pour abonder un peu ses caisses. Le tout faisant dire à Eric Coquerel, le président France Insoumise de la commission des finances, qu’ainsi amendé, pour ne pas dire bouleversé, ce projet de budget devenait „compatible avec la plupart des exigences du nouveau Front populaire“.
Même la contribution française à l’UE …
Selon le ministère des Finances, cette augmentation massive des impôts s’élèverait à 34 milliards d’euros par rapport au texte initial. Quant à l’article 40 du projet de budget gouvernemental, l’opposition a voté sa suppression pure et simple; or il s’agit là de la contribution de la France au budget de l’Union européenne, fixée à 23 milliards d’euros en 2025. Selon Laurent Saint-Martin, le nouveau ministre du Budget, „ces dispositions sont contraires aux traités européens, aux conventions fiscales signées par la France, voire inconstitutionnelles“.
Le vote des députés, ce mardi, consistera sans doute plutôt à approuver le texte originel du gouvernement que celui auquel ont abouti les oppositions, du moins les élus de la majorité veulent bien y participer en masse. Mais la bataille parlementaire sera loin d’être terminée, sans parler des allers et retours prévus entre l’Assemblée nationale et le Sénat, où Michel Barnier dispose, pour le coup, d’une majorité confortable, de l’ordre de 250 élus sur 348. Ce qui ne lui garantira d’ailleurs pas des débats de tout repos, car les collectivités locales, dont la Haute Assemblée est un peu la caisse de résonance, s’estiment fort mal loties par certaines dispositions du projet.
Ces débats budgétaires s’inscrivent de toute façon dans un contexte économique qui les rend un peu irréels. Les plans de licenciements se multiplient (notamment chez deux géants: Michelin pour les pneus et Auchan pour la grande distribution) et le secteur automobile, comme en Allemagne, est en récession, avec toutes les conséquences que cela va avoir sur ses nombreux sous-traitants. Sans parler de celles que pourrait comporter l’élection d’un Donald Trump pour qui „droits de douane“ constitue „la plus belle expression du dictionnaire“.
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