Mais „l’esprit de la fête“, qui est le thème de cette 44e édition, s’y est répandu immédiatement, dès la soirée d’ouverture le 29 octobre. La grande salle de l’Hôtel de ville de Villerupt était bien remplie et après les discours de bienvenue, les festivaliers ont pu assister à la projection gratuite du film de Paolo Genovese (2016) „Perfetti sconosciuti“.
Comme l’a souligné Oreste Sacchelli, président du Pôle de l’Image, ce film, qui a remporté de nombreux prix en Italie et à l’étranger, détient le record des remake. Bien 18 jusqu’à présent! „S’il y a autant de remake, cela signifie que les scénaristes et réalisateurs ont pointé des doigts un phénomène important qui nous associe tous dans une même problématique, quel que soit le pays“, expliqua Sacchelli. „Cette comédie montre quelque chose, que nous vivons peut-être dans nos vies quotidiennes, mais que l’Italie a su mettre au point et porter à l’écran.“ Se mettre à nu en permettant à son entourage de lire et d’écouter les messages qui arrivent sur nos téléphones portables est tout aussi divertissant que déstabilisant. Avec son scénario, Genovese a bien centré le genre appelé „comédie dramatique“.
Sacchelli a aussi insisté sur le fait que cette 44e édition du festival en vaut bien deux, car les films, prévus l’année passée durant le festival tristement avorté, font partie de la richissime programmation de cette année, dont beaucoup d’avant-premières et des inédits. Tous les films sont sous-titrés en français.
Une mouture pré-„Esch2022“
Parmi les invités à la cérémonie d’ouverture, la présence des représentants du Luxembourg Pim Knaff et Nancy Braun a été très remarquée en raison de l’imminente année culturelle 2022 et le projet commun entre les communes luxembourgeoises Pro-Sud et les communes françaises de la Communauté de communes Pays Haut Val de l’Alzette (CCPHVA). Quelques anticipations ont été lâchées à cette occasion. Knaff a félicité les organisateurs du festival, „qui mettent les petits plats dans les grands pour créer un événement à la hauteur des liens qui lient la communauté italienne à nos populations française et luxembourgeoise“ et Braun a annoncé que „26 projets se dérouleront à Villerupt, dont la moitié seront présentés à l’Arche, nouveau pôle culturel, qui sera bien ancré dans la programmation, un lieu fédérateur pour toutes les communes de la CCPHVA“.
Elle a ensuite précisé que le projet „Les estivales de l’Alzette“ donnera l’occasion de faire la fête. „Ce sont quatre jours de fête autour des richesses culturelles et associatives du territoire, musique, danse, cinéma, théâtre, gastronomie … du 7 au 10 juillet 2022.“ Selon Braun, ce nouveau festival, implanté à Villerupt, compte durer dans le temps, pour proposer de nouvelles éditions après 2022. Pour conclure, en relation avec le festival du film italien, elle a évoqué le ciné-concert de l’année prochaine avec la participation de la Philharmonie du Luxembourg.
Le lendemain de l’ouverture, le producteur Dominique Besnehard est venu présenter le film „Il materiale emotivo“, réalisé et joué par Sergio Castellitto, d’après le scénario de base d’Ettore Scola. La sympathique rencontre avec le public, animée par Bernard Reiss, a permis de mettre en évidence certains points névralgiques du monde du cinéma, dont celui de la présence d’une autre plateforme de distribution de films: Netflix. „Deux films que nous aurions voulu montrer au festival, nous ne les avons pas eus, car ils sont sortis sur Netflix,“ a fait savoir Reiss, à savoir „L’incroyable histoire de l’Île de la Rose“, où Matilda de Angelis, actrice aussi dans „Il materiale emotivo“, a été primée par un David di Donatello en tant que meilleure actrice dans un second rôle, ainsi que le dernier film de Paolo Sorrentino „La Main de Dieu“, Grand prix du jury à la Mostra de Venise et qui va sortir le 4 décembre.

Rien ne vaut le cinéma?
Besnehard a exprimé son opinion à cet égard, en évoquant la polémique qui est en train de se faire à Paris: „Alors que c’est compliqué de faire revenir les gens au cinéma et au théâtre, surtout ceux du troisième âge, Netflix a décidé de faire un festival de cinéma! Eh bien, les exploitants ont raison de se fâcher, c’est inadmissible!“, et il conclut en disant: „Mais même si on a une bonne télévision à la maison, rien ne vaut le cinéma, et comme disait Godard: Quand on va au cinéma, on lève la tête, quand on regarde la télévision, on la baisse!“
En tout cas, force est de constater que la production cinématographique italienne actuelle est très riche avec une présence massive de films italiens à Cannes et à Venise. La pandémie a certes provoqué confinements et interruption de projets en cours, mais elle a aussi ravivé la passion pour cet art. C’est comme si elle avait obligé les cinéastes à du recul pour mieux les lancer par après. Les professionnels affirment même que la production actuelle est comparable à celle des années 60, lorsqu’on réalisait 400 films par an en Italie.
Parmi les cinéastes qui sont venus à Villerupt et au Grand-Duché au cours de cette première semaine de festival, il y a eu Renzo Carbonera pour son film „Takeaway“, Simone Godano pour „Marilyn ha gli occhi neri“, Dario Albertini avec l’acteur Luciano Miele pour „Anima bella“, Hleb Papou pour „Il Legionario“. Tous ont pu rencontrer le public et s’exposer aux questions posées en salle ou même dans les couloirs et coins de restauration, livrant plein d’infos et d’anecdotes, qui donnent au festival cet air de famille qui le caractérise. Renzo Carbonera a raconté que son acteur principal, Libero de Rienzo, décédé en juillet dernier, quelques mois après la fin du tournage, s’était tellement bien préparé au rôle qu’il devait jouer, qu’il s’était déjà fait pousser la barbe et coiffé de façon ébouriffée des mois avant le tournage. Chose inutile pour le réalisateur, mais importante pour l’acteur.
Simone Godano a analysé le côté émotionnel de ses comédies: „Dans mes films, on rit, mais on pleure aussi, pas à cause de drames ou de maladies, mais à propos de l’émotion de la vie. Les aventures de mes personnages vous mettent la larme à l’œil et vous donnent envie de les embrasser“, dit-il.
Dario Albertini et Luciano Miele ont évoqué la longue recherche, qui a duré 8 mois, pour trouver l’interprète du rôle principal. Aucune actrice connue ne leur convenait, aucune jeune fille participant aux street-castings organisés pour cela. Elles étaient trop parfaites, trop belles, ce n’est pas ce qu’ils recherchaient. Un jour, ils sont restés comme foudroyés, quand Madalina, serveuse au restaurant, leur a apporté leur friture. Ils avaient trouvé la personne qu’il leur fallait pour le rôle d’une adolescente, dont le père souffrait d’une sévère addiction au jeu! Et Madalina, qui a merveilleusement interprété son rôle, est retournée travailler au restaurant à la fin du tournage. Une vraie leçon d’humilité. Hleb Papou a expliqué le titre de son film „Il Legionario“ en disant qu’il fait référence à l’ancien Empire Romain, puisqu’ à Rome, ville multi-ethnique, la légion romaine était composée de soldats multi-ethniques. Ils venaient de Gaule, d’Afrique du Nord et de zones de l’Europe de l’Est. Ils étaient donc noirs, blancs, métis. „D’une certaine manière, l’Italie d’aujourd’hui est un pays multi-ethnique. En plus, le légionnaire fait partie d’un groupe, mais il combat sa propre bataille“, ajouta-t-il.
Vendredi après-midi, c’est un événement très spécial qui a eu lieu à l’Hôtel de ville de Villerupt. Le bien-aimé ex-président du FC Metz Carlo Molinari est venu avec sa famille, ses amis et Dominque Hennequin pour la projection de „Carlo, passion président“, le documentaire signé Arnaud Caël sur la vie et les incroyables succès en de nombreux domaines de Molinari, dus à sa créativité, sa ténacité et son empathie naturelle pour son entourage. Beaucoup de Luxembourgeois ont marqué l’histoire du club et certains d’entre eux partagent leurs souvenirs et leurs impressions dans ce documentaire. Anciens joueurs et l’équipe junior du FC Metz ont rendu hommage à Molinari en salle, qui était visiblement fier et ému. Ainsi, au micro, un lapsus cocasse lui a échappé: „On parlera après le match!“ au lieu de „On parlera après le film“.
Le festival (sous le régime du Covid-Check) continuera tout au long de cette deuxième semaine jusqu’à dimanche, avec la remise des prix vendredi soir.
A ne pas rater: Jean Sorrente au CNL à Mersch
Habité par le destin de sa famille aux prises avec la Seconde Guerre mondiale dans l’est de la Belgique, un narrateur s’interroge. Tandis qu’il parcourt l’album de famille, les trahisons se mêlent aux souvenirs d’enfance et de jeunesse, traversant des décennies de conflits historiques et intérieurs. Aux doutes et aux questions lancinantes, „La Guerre du temps“ (Hydre éd., 2020) de Jean Sorrente répond par une „opération mémorielle du roman“.
Modération : Ludivine Jehin.
Lecture d’extraits : Sullivan Da Silva
Au Centre national de littérature à Mersch à 19.30 heures. L’entrée est libre. En raison des conditions sanitaires actuelles, l’inscription à cette soirée soumise au régime Covid-Ceck est obligatoire et peut s’effectuer en ligne: http://reservation.literaturarchiv.lu/SJS/

De Maart
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