Dienstag18. November 2025

Demaart De Maart

Forum de Jules BarthelLe plan de paix de Donald Trump vs la Déclaration de New York 

Forum de Jules Barthel / Le plan de paix de Donald Trump vs la Déclaration de New York 
 Photo: archives/Evan Vucci/AP/dpa

Après deux ans de guerre génocidaire dans la bande de Gaza, le président américain Donald Trump, principal fournisseur d’armes de destruction massive à l’encontre des Palestiniens de Gaza et méprisant, autant que Benjamin Netanyahu, le droit international, s’érige désormais en faiseur de paix. Son plan a, certes, permis d’établir un fragile cessez-le-feu à Gaza, à assurer la libération des otages et le retour, largement insuffisant, de l’aide humanitaire. Mais il laisse sans réponse des questions essentielles quant à l’avenir politique du peuple palestinien. Les grandes problématiques, autodétermination, gouvernance palestinienne et décolonisation de la Cisjordanie et de Jérusalem-Est, ne sont abordées que de manière très aléatoire. 

La première partie du plan de paix américain, comportant le volet militaire, conditionne la fin des hostilités à un abandon total de la lutte armée par le Hamas, au désarmement de ses combattants et à la destruction de ses infrastructures. Israël s’engagerait à se retirer progressivement de Gaza et à renoncer à toute annexion ou occupation du territoire.

La deuxième partie, comprenant le volet humanitaire, repose sur la libération de l’ensemble des otages retenus par le Hamas et la libération subséquente par Israël de détenus palestiniens, ainsi que sur une reprise de l’aide humanitaire à la population de Gaza.

La troisième partie, enfin, comprenant le volet politique, consacre le rôle prééminent des États-Unis aux dépens des Nations unies. Une double présence internationale sera établie: une force militaire multinationale chargée de sécuriser la région et ses frontières et une structure civile incarnée par un comité technocratique et apolitique composé de Palestiniens qualifiés et d’experts internationaux, agissant sous la supervision d’un Conseil de la paix présidé par Donald Trump lui-même et réunissant diverses personnalités politiques internationales. L’Autorité palestinienne, ou tout autre acteur palestinien crédible, serait en revanche écartée de la gouvernance de Gaza. Le plan consacre ainsi l’effacement des Palestiniens en tant qu’acteurs politiques, les reléguant au rang de sous-traitants et de main-d’œuvre bon marché.

Quant à la reconstruction, elle serait largement confiée à des entreprises américaines, israéliennes et accessoirement à des pays alignés sur les États-Unis.

Les limites du plan de paix américain

Même envisagé comme un premier pas vers un processus de paix, le plan américain soulève d’importantes inquiétudes, qui tiennent autant à son contenu qu’à ses silences. En premier lieu, il demeure plus qu’équivoque quant à la solution à deux États. Le texte récuse toute existence de l’État palestinien, en dépit de la vaste reconnaissance dont il bénéficie désormais. Il appelle tout au plus l’Autorité palestinienne à un processus de réformes qui pourrait, à terme, ouvrir la voie à une éventuelle création d’une entité palestinienne à définir.

En deuxième lieu, le plan passe totalement sous silence la question de la Cisjordanie et de Jérusalem-Est, pourtant au cœur de toute solution durable. Ce silence est d’autant plus préoccupant que la colonisation s’y poursuit à un rythme accéléré, fragmentant le territoire en enclaves isolées et empêchant toute continuité territoriale pour un futur État palestinien.

En troisième lieu, et alors que le plan définit précisément le sort réservé aux militants du Hamas, il passe sous silence les questions pourtant essentielles des responsabilités israéliennes. Ainsi, le document n’aborde pas le sort des dirigeants et soldats israéliens, en dépit de l’existence actuelle de poursuites devant la Cour pénale internationale. De même, l’obligation d’Israël de réparer les dommages causés aux Palestiniens est ignorée, alors même qu’elle a été constatée par la Cour internationale de justice.

Plus largement, le texte n’esquisse aucune solution au problème des frontières ou au retour des réfugiés parmi les innombrables questions que soulève la perspective d’une solution définitive du conflit israélo-palestinien.

La Cisjordanie et Jérusalem-Est, les grands oubliés

Tandis que l’attention internationale se concentre sur Gaza, la Cisjordanie et Jérusalem-Est connaissent une intensification de la colonisation et des déplacements forcés. Les Palestiniens y sont poussés dans des zones toujours plus petites, soumis à des restrictions de mouvement et à des expropriations massives. Cette dynamique vise à rendre irréalisable la création d’un État palestinien viable. La communauté internationale doit donc maintenir la pression sur Israël, même en cas de mise en place du plan américain, afin d’éviter que ces territoires ne soient définitivement annexés de facto.

La question est aussi de savoir si les 142 États, dont le Luxembourg, qui ont adopté, à l’AG de l’ONU du 12 septembre 2025, la Déclaration de New York sur le règlement pacifique de la question de Palestine et la mise en œuvre de la solution des deux États issue d’une initiative lancée par la France et l’Arabie saoudite en juillet 2025, sauront se montrer à la hauteur des enjeux en question. Ces États doivent désormais faire face à un défi diplomatique majeur: comment concilier leur soutien officiel au plan américain alors que les principes de leur propre initiative sont bien éloignés de ce dernier.

L’alternative de la Déclaration de New York

Contrairement au plan Trump, la Déclaration de New York s’inscrit dans le cadre du droit international et de la Charte des Nations unies. Elle affirme le rôle central des Palestiniens dans leur propre gouvernance et fait référence au territoire de la Palestine dans la perspective de la solution à deux États. Dans le cadre du plan américain, le Hamas doit remettre ses armes sans autre négociation, une exigence difficilement réalisable dans le contexte actuel, alors que dans la logique de la Déclaration de New York, le désarmement pourrait être négocié dans le cadre d’un accord impliquant les autorités palestiniennes, offrant ainsi une voie plus réaliste d’acceptation par le Hamas.

Concernant la force internationale de stabilisation, les deux textes se rejoignent sur le principe, mais divergent dans leur mise en œuvre. Pour Donald Trump, cette force serait dirigée par les États-Unis en partenariat avec des alliés de choix. Pour les signataires de la Déclaration de New York, il s’agit d’une mission internationale sous mandat du Conseil de sécurité, chargée de la protection des civils et de la mise en place du transfert des responsabilités en matière de sécurité intérieure à l’Autorité palestinienne, contribuant ainsi à renforcer les capacités d’un futur État palestinien.

La gouvernance transitoire de la bande de Gaza constitue un autre point de divergence majeur. Le plan américain prévoit un comité technocratique et apolitique sous le contrôle d’un Conseil de la paix présidé par Trump lui-même. La Déclaration de New York prévoit, à l’inverse, que les Palestiniens eux-mêmes pourront jouer un rôle décisionnaire.

Quant à la phase de reconstruction et de développement de la bande de Gaza, le plan américain prévoit une zone économique spéciale conçue par des experts internationaux et pensée pour favoriser les entreprises américaines et israéliennes. La Déclaration de New York laisse aux Palestiniens la responsabilité de définir leurs priorités de développement, prélude à leur souveraineté.

Un avenir incertain sans réaction forte de la communauté internationale

Les prochains mois vont être déterminants, car les décisions qui seront prises sur les armes, la sécurité et la gouvernance à Gaza peuvent ouvrir de belles perspectives pour l’avenir de l’ensemble des Palestiniens ou, au contraire, l’obstruer pour très longtemps. Les pays signataires de la Déclaration de New York, dont le Luxembourg, ont la lourde responsabilité de défendre les principes du droit international et les résolutions de l’ONU et de peser diplomatiquement sur les gouvernements américain et israélien.

Jules Barthel est président du Comité pour une paix juste au Proche-Orient
Jules Barthel est président du Comité pour une paix juste au Proche-Orient Photo: archives Editpress/Didier Sylvestre

Il serait dangereux de considérer la situation comme stabilisée ou de normaliser les relations avec Israël tant que perdurent occupation, colonisation et politiques assimilées à l’apartheid. Seules des sanctions économiques, politiques et diplomatiques, associées à une mobilisation de la société civile internationale, peuvent contraindre Israël à respecter le droit. Pour le bien des Palestiniens, mais aussi des Israéliens. Dans tous les autres cas, l’État d’Israël continuera sa politique génocidaire jusqu’à l’épuration complète de la bande de Gaza, puis de la Cisjordanie et finalement des Palestiniens citoyens d’Israël.