La France pleure une mort héroïque

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De notre correspondant Bernard Brigouleix, Paris

L’attentat islamiste, isolé mais meurtrier, commis vendredi à Carcassonne puis dans le supermarché d’une cité voisine („T“ du 24 mars) a finalement fait quatre morts, dont le lieutenant-colonel de gendarmerie Arnaud Beltrame qui s’était offert en échange pour sauver une des otages du tueur. La mémoire de ce dernier est saluée de toutes parts et pourrait faire prochainement l’objet d’un hommage national.

Six mois avaient eu beau passer depuis la dernière attaque islamique perpétrée sur son sol – c’était le 1er octobre 2017 à Marseille, où deux femmes avaient été poignardées à mort sur le parvis de la gare – la France savait bien qu’elle ne devait pas se sentir pour autant à l’abri de nouvelles offensives.

Celle qui a eu lieu vendredi à Carcassonne et au supermarché de Trèbes, dans le département méditerranéen de l’Aude, et qui a fait quatre morts et une douzaine de blessés plus ou moins grièvement atteints, est venue le lui rappeler cruellement.
L’auteur des faits, Radouane Lakdim, un homme de 25 ans d’origine marocaine qui avait prêté allégeance à l’Etat islamique, a été abattu par les forces de l’ordre lors de l’assaut qu’elles ont finalement donné. Et deux personnes qui lui étaient liées, au vu des premiers résultats de l’enquête, ont été mises en examen. Plus, hier après-midi, un ex-candidat du parti mélenchoniste de La France insoumise, aussitôt désavoué et exclu par les siens, Stéphane Poussier, qui s’était ostensiblement félicité sur Internet de la mort particulièrement héroïque du lieutenantcolonel de gendarmerie Arnaud Beltrame.

Objet d’un suivi effectif

L’enquête a déjà permis d’en savoir un peu plus sur le parcours du tueur islamiste. Habitant de Carcassonne, Radouane Lakdim était „fiché S“, autrement dit susceptible de passer à l’acte, depuis 2014. Il avait été condamné en 2011 à un mois d’emprisonnement avec sursis pour infraction de port d’arme prohibé, puis, en 2016, avait effectué un court séjour en prison dans une (petite) affaire de stupéfiants.

Il avait ensuite fait l’objet d’un suivi effectif de la part des services de renseignement durant les deux dernières années; mais d’après le procureur de la République de Paris chargé du dossier, François Molins, „ce suivi n’avait permis de mettre en évidence aucun signe précurseur d’un passage à l’acte terroriste“.

Quant au pouvoir politique, il s’est appliqué à afficher dès que l’attentat a été connu vendredi, son souci d’unité et d’efficacité, en faisant intervenir de concert le traditionnel trio régalien aux commandes en de telles circonstances: le chef de l’Etat, le premier ministre et celui de l’Intérieur. Alors qu’il était en visite à l’école de commissaires de police de Saint-Cyr-au-Mont-d’Or, près de Lyon, ce dernier s’est immédiatement rendu en hélicoptère à Trèbes.

Mobilisation du pouvoir

En déplacement à Mulhouse (Haut-Rhin), où il était venu parler des banlieues, Edouard Philippe est de son côté rentré toutes affaires cessantes à Paris. Et le président Emmanuel Macron, sitôt revenu du conseil européen de Bruxelles, a tenu une réunion de crise à l’Elysée, à l’issue de laquelle il a clairement évoqué un „attentat islamiste“. Et aussi la figure du lieutenant-colonel Beltrame, „tombé en héros“, a insisté le chef de l’Etat.
De fait, la personnalité exemplaire de cet officier deux fois major de promotion, à l’Ecole interarmes puis à l’Ecole des officiers de gendarmerie, et qui avait été jadis affecté à des missions particulièrement dangereuses, suscite en France, depuis que l’on a appris samedi qu’il n’avait pas survécu à ses blessures, une pluie de messages élogieux, émus et reconnaissants, d’autant plus qu’il avait pris tous les risques en proposant au terroriste d’être échangé contre une otage avant d’être finalement poignardé à mort et mitraillé.

Dans son communiqué, Macron a appelé „chaque Français à honorer la mémoire“ d’un homme „mort au service de la nation“ qui „mérite le respect et l’admiration de la nation tout entière“. „Mort pour la patrie, jamais la France n’oubliera son héroïsme, sa bravoure, son sacrifice“, a pour sa part tweeté le ministre de l’Intérieur Gérard Collomb. Après les cérémonies locales d’hier, un hommage national devrait d’ailleurs lui être rendu dans les prochains jours.