Les autres candidats du premier tour n’avaient pas pris position pour l’un ou l’autre finaliste, mais on leur prêtait plutôt une préférence pour Mme Rousseau. Au point que celle-ci, malgré ses positions très tranchées, et qui s’étendent à bien d’autres sujets que l’environnement, faisait figure de favorite – à la fois, bien sûr, de l’aile fondamentaliste du mouvement vert, mais aussi, de manière beaucoup plus discrète, voire secrète, de tous ceux qu’aurait réjouis la victoire à cette primaire d’une candidate plus facile à combattre, de par son extrémisme, qu’un Yannick Jadot incarnant au contraire l’aile réaliste d’Europe Ecologie-Les Verts (EELV), et largement préféré, lui, par les sympathisants modérés de la cause environnementale.
C’est donc finalement cette dernière fraction du parti qui l’emporte à travers lui, mais de justesse. Un élu des Verts ironisait même à la proclamation des résultats, sur la péniche qui leur sert de quartier général: „Miracle! Pour la première fois chez nous, c’est le favori qui gagne!“ La désignation de M. Jadot à la candidature présidentielle tranche en effet avec une tendance observée deux fois déjà auparavant chez les Verts: préférer à une personnalité populaire et médiatique, comme jadis Daniel Cohn-Bendit puis Nicolas Hulot, quelqu’un dont les positions radicales et la personnalité marginale excluaient tout succès.
Certes, la coalition de ceux que Yannick Jadot et son pragmatisme agacent n’a pas été loin de l’emporter; mais elle est tout de même battue, et sa candidate, Sandrine Rousseau, a très loyalement rallié le vainqueur de la primaire. Lequel, de son côté, s’est employé, dans ses remerciements, à durcir quelque peu son discours: lui qui naguère encore, faisait valoir avec réalisme que l’important pour les Verts n’était pas de faire la révolution, mais d’exercer une influence forte sur le prochain chef de l’Etat, n’a pas hésité à assurer, dans l’euphorie de la victoire, qu’il serait „le président du climat“, comme si son élection à l’Elysée n’était plus qu’une formalité …
Rêves législatifs … et allemands
En fait, ce que la victoire de Yannick Jadot peut changer pour les scrutins à venir est double. Il y a, d’abord, le rapport de forces interne à la gauche, toujours aussi émiettée face à Emmanuel Macron – d’autant plus, même, que Ségolène Royal, très sévèrement battue à une récente élection sénatoriale faute d’appui du PS, assure désormais qu’elle „n’exclut rien“ pour 2022. Pour Anne Hidalgo par exemple, candidate socialiste à la présidentielle, le succès de Jadot n’est pas une bonne nouvelle, car la modération de ce dernier peut lui permettre de gagner des voix sur l’électorat de la maire de Paris.
En second lieu, le désormais candidat vert à l’Elysée, surtout s’il s’impose ensuite comme le meilleur (ou le moins mauvais) des candidats de gauche en termes de résultats, sera en relativement bonne posture pour négocier des accords en vue des élections législatives qui suivront immédiatement la présidentielle. Le scrutin parlementaire de dimanche dernier en République fédérale est venu rappeler cruellement aux Verts français ce que peuvent obtenir leurs homologues allemands en nombre de sièges au Bundestag, après avoir pu espérer, même, voici quelques mois, devenir le pilier central de la future coalition …
Certes, le système électoral français est bien différent, et le paysage politique aussi. Mais l’exemple d’outre-Rhin reste, pour beaucoup d’écologistes de l’Hexagone, même tous n’osent pas encore l’avouer, l’illustration tentatrice de ce que pourrait peut-être un jour donner, face aux „Fundis“ à la française, la confirmation du triomphe des „Realos“.
De Maart
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