FranceLe Salon de l’agriculture de Paris s’ouvre sous le signe de la contestation

France / Le Salon de l’agriculture de Paris s’ouvre sous le signe de la contestation
Cette année, le Salon de l’agriculture est accompagné d’un goût amer Photo: AFP/Miguel Medina

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Le Salon de l’agriculture ouvre ses portes ce samedi matin dans la capitale française, dans une atmosphère exceptionnellement tendue, alors qu’il s’agit d’habitude d’une fête dont l’ampleur dépasse de beaucoup celle du monde paysan, même „monté à Paris“ en nombre pour la circonstance avec des centaines d’animaux d’élevage et des dizaines de tonnes de produits agricoles les plus divers.

C’est que, cette fois-ci, la colère des agriculteurs est à son comble. On avait pu la croire, après de nombreuses manifestations et barrages routiers, à peu près apaisée par les précédentes interventions du premier ministre, Gabriel Attal (voir Tageblatt des 22, 24 et 30 janvier), qui avait notamment promis des simplifications administratives, la suppression de certaines normes environnementales n’existant pas dans des pays concurrents, et des aides financières diverses pour environ 400 millions d’euros.

Mais c’était sous-estimer l’impatience de l’opinion paysanne, qui s’accommode mal, après avoir entendu nombre de promesses, de la lenteur de leur mise en œuvre – quitte à sous-estimer la difficulté qu’il y a toujours en France à passer des intentions même fortement proclamées à leur réalisation concrète, législative en particulier. Ces jours derniers, la contestation a donc repris, hier après-midi encore en plein Paris partiellement bloqué par les tracteurs, avec d’autant plus d’exaspération que les agriculteurs ont désormais le sentiment d’avoir été bernés. Sans parler d’une inévitable surenchère entre organisations syndicales spécialisées, dont même la plus modérée, la FNSEA (Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles) a elle aussi repris gaillardement le mouvement.

L’exécutif avait le souci, pour ne pas dire la hantise, de ne pas laisser ledit mouvement déborder sur le Salon de l’agriculture; mais s’il a pu croire y être parvenu, son soulagement aura été de courte durée. D’autant que certaines actions plus dures ont été lancées avec notamment, avant-hier, la destruction au moins partielle d’entrepôts agro-alimentaires appartenant à des grandes chaînes de distribution, auxquelles le monde rural reproche d’acheter à très bas prix aux agriculteurs des produits qu’elles revendent beaucoup plus cher, alimentant ainsi au passage l’inflation des prix de l’alimentation.

La fausse bonne idée de M. Macron

La tradition veut que de nombreux représentants de la classe politique fassent une visite au Salon. A commencer par le président de la République, qui se doit d’évoluer de stand en stand en posant des questions et goûtant les produits. D’habitude dans une atmosphère bon enfant, voire joyeuse, mais le climat de ces échanges risque d’être tout différent cette fois-ci …

Pensant détendre une atmosphère qui s’annonçait houleuse, M. Macron a eu ce qui s’est révélé une fausse bonne idée: celle d’organiser, ce samedi, un grand débat l’opposant aux représentants des syndicats paysans. Mais il a cru astucieux d’y convier aussi des adversaires du monde rural, dont le mouvement dit du „Soulèvement de la Terre“, auteur de nombreuses et violentes attaques contre les forces de l’ordre protégeant des installations agricoles, au point qu’il y a quinze jours encore le gouvernement a tenté de le dissoudre pour cause d’„écoterrorisme“.

Apprenant cela, la FNSEA a annoncé qu’aucun de ses représentants ne participerait à cet échange avec le chef de l’Etat. Lequel a fait opérer par son cabinet un énergique rétropédalage sur le thème: „Non, c’est une erreur, le Soulèvement de la Terre n’est pas invité.“ Mais le mal était fait, la FNSEA – sans doute point mécontente, par ailleurs, de tenir là une raison d’annuler sa participation – n’en démordait pas hier soir encore: pas question pour elle de s’associer à cette „mascarade“. Et du coup, les autres organisations, plus petites et plus marquées politiquement, semblaient tentées d’adopter la même attitude.

De sorte que cette belle fête populaire qu’est, chaque hiver, le Salon de l’agriculture, pour ses visiteurs parisiens et autres, mais aussi pour les producteurs agricoles qui y participent, risque d’avoir cette fois-ci un goût amer.