Dienstag11. November 2025

Demaart De Maart

FranceLe rejet du président Macron va au-delà des retraites

France / Le rejet du président Macron va au-delà des retraites
Le comité d’accueil hier à Ganges n’était pas très chaleureux envers le président Photo: AFP/Sylvain Thomas

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Après s’être rendu, mercredi, en Alsace, où il a été copieusement pris à partie par des manifestants en colère, avec lesquels il a tenté de nouer malgré tout le dialogue, le président Macron a participé hier à une réunion scolaire dans l’Hérault, où l’accueil populaire n’a pas été beaucoup plus amène. Cependant que, hier aussi, était organisée, en principe dans toute la France, une „journée de la colère cheminote“.

Manifestement, le chef de l’Etat a bel et bien entamé, avec une certaine bravache face à de petites foules hostiles, ce qu’il espère être une „opération reconquête“. Mais non moins manifestement, la partie n’est pas gagnée d’avance, c’est même un euphémisme. Dans le Bas-Rhin en particulier, qui ne passe pourtant pas pour une terre d’extrémisme, il a dû faire face à des contradicteurs survoltés.

Quant à la petite ville héraultaise qui constituait son escale d’hier, il a certes pu s’y entretenir courtoisement et longuement, aux côtés de son ministre de l’Education nationale Pap Ndiaye, avec des enseignants. Auxquels il venait d’ailleurs aussi porter la nouvelle très attendue d’une augmentation générale des salaires de toute la profession (de 100 à 230 euros mensuels sans conditions, et davantage si les intéressés acceptaient des tâches supplémentaires dans ce secteur en grande crise).

Mais le „comité d’accueil“ qui l’attendait sur la place de la mairie, après avoir coupé l’électricité de l’école qu’il visitait, a dissuadé les organisateurs de ce nouveau déplacement élyséen d’exposer à nouveau le chef de l’Etat à des scènes comparables à celles qu’il avait pu vivre la veille à Célesta, où même encore le jour-même à la gare de Montpellier, la préfecture de l’Hérault. Les autorités locales avaient donné pour consigne aux gendarmes de saisir sur les manifestants tous les instruments de cuisine, genre casseroles, et les projectiles alimentaires type œufs ou tomates, qu’ils pourraient trouver. Ce qui n’a fait naturellement qu’accentuer encore la colère des opposants présents … et exacerber leurs quolibets.

Dans le même temps, mais en mineur, était conviée à s’exprimer sur différentes places publiques de France la „colère cheminote“. Il s’agissait en fait, pour les syndicats de la SNCF, de bien marquer par des rassemblements, des cortèges et des grèves – ces dernières très sporadiques – que, comme devait le résumer l’un de leurs orateurs, „le combat contre la réforme des retraites n’est pas du tout fini, et ne le sera pas davantage après la grande manifestation nationale prévue le 1er mai“. Message sans doute subliminal à la CFDT, dont le secrétaire général Laurent Berger a confirmé qu’il quitterait comme prévu ses fonctions le 21 juin prochain: la grande centrale cédétiste envisage, elle, „après un délai de décence“, de reprendre le chemin des négociations avec le gouvernement.

Et cela sans majorité parlementaire …

Il n’empêche: le caractère à la fois très virulent et très massif du rejet dont fait désormais l’objet le président Macron commence à poser à ce dernier un vrai problème de gouvernement. Même s’il affiche crânement son intention de continuer comme si de rien n’était, notamment en „allant à la rencontre des Français“ (quitte à leur expliquer que „ce n’est pas avec des casseroles qu’on fait avancer la France“), il va devenir difficile de transformer chaque déplacement en province en épreuve de force entre manifestants et policiers.

Et cela d’autant plus que ce rejet dépasse de plus en plus manifestement la seule question de la réforme des retraites, et même de l’accumulation de maladresses qui ont jalonné le laborieux parcours de son adoption par le biais du recours au 49-3. Il y entre, chez certains contestataires, ce qu’il faut bien appeler une part de haine. Comme chez cet homme qui hurlait mercredi en Alsace, nez à nez avec le chef de l’Etat: „On n’en veut pas, de ta retraite, qu’est-ce qui fait que t’arrives pas à le comprendre?“, flanqué d’un autre qui vociférait: „Ton gouvernement de pourris, il va tomber, et toi avec!“ Ou encore ce cheminot (très) en colère, vu dans l’Hérault, qui assurait: „A force de se prendre pour Louis XVI, Macron va finir comme lui [décapité, NDLR], et en attendant il nous prépare le 14 juillet!“

A peu près tout président de la Ve République a été soumis un jour ou l’autre à la détestation d’une partie de l’opinion. A commencer par le premier d’entre eux, Charles de Gaulle, que les Français d’Algérie ont haï, certains montant même contre lui des attentats. Mais tous avaient aussi gardé, à divers degrés, une assise dans l’opinion, et le respect – fût-il exaspéré – d’une majorité de leurs compatriotes. En outre et surtout, ils disposaient, sauf période de cohabitation qui se déroulait d’ailleurs sans heurts, d’une majorité parlementaire. Emmanuel Macron peut-il sérieusement espérer gouverner encore quatre ans sans pouvoir s’appuyer, ni sur l’opinion ni sur l’Assemblée? C’est là une question que même dans les rangs de ce qu’il reste du macronisme, beaucoup commencent à se poser avec anxiété.