Donnerstag23. Oktober 2025

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FranceL’ampleur de la mobilisation paysanne inquiète le gouvernement

France / L’ampleur de la mobilisation paysanne inquiète le gouvernement
Non seulement la contestation paysanne ne faiblit pas, mais elle prend même davantage d’ampleur. Photo: AFP/Denis Charlet

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L’entretien que Gabriel Attal a eu lundi soir à Matignon avec les dirigeants de la puissante Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles et les Jeunes agriculteurs du CNJA ne s’est traduit par aucun apaisement et le gouvernement s’inquiète du risque d’embrasement politique.

Et cela d’autant plus qu’un accident mortel s’est produit, très tôt hier matin, sur une route nationale du département pyrénéen de l’Ariège, lorsqu’une voiture a foncé sur un barrage routier érigé par les agriculteurs en colère, tuant une des participantes à la manifestation et blessant très grièvement sa fille de 14 ans et son mari. Problème supplémentaire pour l’exécutif: les trois occupants de la voiture étaient trois immigrés clandestins qui faisaient l’objet d’une OQTF (obligation de quitter le territoire français), à laquelle ils s’étaient bien gardés d’obéir.

Mais au-delà de ce fait-divers meurtrier, qui ne pouvait que durcir le climat, on observe une dramatisation du mouvement. Certes, pour éviter que celui-ci ne dégénère en affrontements entre paysans en colère et forces de l’ordre, le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, a prudemment demandé que la police ou la gendarmerie n’interviennent pas contre ces barrages de routes, ronds-points et carrefours, que la population semble d’ailleurs prendre, pour l’instant au moins, avec compréhension. Il n’en reste pas moins que le mouvement paysan ne semble pas du tout en voie d’essoufflement – et d’extinction moins encore.

L’opposition s’en est évidemment emparée. Mécaniquement chez les lepénistes du Rassemblement national, qui y voient une magnifique occasion de fustiger à la fois le gouvernement et „Bruxelles“, en tentant de faire oublier tout ce que l’agriculture française doit aussi aux crédits de la Politique agricole commune de l’UE. Le jeune président du RN, Jordan Bardella, en particulier, n’a de cesse de se montrer auprès des agriculteurs en colère à la télévision. Mais aussi à gauche, par sympathie de principe à l’égard de cette frange de la population française qui arrive de moins en moins à vivre de son travail. Et à parmi la droite modérée, par l’effet d’une vieille sympathie – assez largement réciproque – entre les héritiers de Jacques Chirac et le monde agricole.

Des „Gilets jaunes“ aux élections européennes

Le problème, pour le président de la République et son gouvernement, est d’abord que cette crise en rappelle une autre, celle dite „des Gilets jaunes“, peu après le début de son premier quinquennat. Une crise qui avait fini par tourner fort mal, avec des manifestations parfois dévastatrices, et qui reste comme un cauchemar dans les souvenirs de la Macronie. Ce problème est aussi, pour ne pas dire surtout, que cette nouvelle vague de contestation issue de la „France profonde“ survient à quatre mois des élections européennes, lesquelles ne s’annonçaient déjà pas sous un jour particulièrement brillant. Certes, les agriculteurs proprement dits sont désormais fort peu nombreux dans l’Hexagone: moins de 500.000. Mais l’ensemble de la France rurale, et, au-delà, d’une population qui les aime bien et les soutient volontiers politiquement, peut faire ou défaire une élection. Surtout axée sur l’Europe …

Une élection pour laquelle les macronistes se cherchent fébrilement une tête de liste. On avait parlé de Gabriel Attal, pour aller affronter Jordan Bardella – mais il ne va évidemment pas quitter Matignon sitôt nommé. On avait parlé aussi de Stéphane Séjourné – mais le voici ministre des Affaires étrangères. On cite aussi Olivier Véran, ancien porte-parole du gouvernement, mais qui pourrait manquer d’envie d’aller se faire oublier pendant cinq ans à Strasbourg. D’aucuns pensaient avoir trouvé l’oiseau rare en la personne du talentueux écologiste pro-Macron Pascal Canfin, qui, dit-on, s’y verrait bien. Mais avoir un chef de file „vert“, en pleine crise agricole, notamment suscitée par les directives venant de cette famille politique, est-ce une bonne idée? Comme on dit: poser la question, c’est y répondre.

De toute façon, pour l’instant l’urgence est ailleurs. Et le ministre de l’Agriculture, le centriste Marc Fesneau, a sagement différé de plusieurs semaines la présentation de son projet de loi visant à réformer les modalités d’installation des nouveaux agriculteurs. Il il en faudra évidemment beaucoup plus, toutefois, pour que les paysans reprennent dans la sérénité ce travail qui, comme ils le rappellent sans cesse ces jours-ci, „nourrit les Français.“