Les réactions, à travers le pays, sont innombrables et horrifiées. Même La France Insoumise, souvent réputée proche des milieux islamistes, s’est sentie tenue d’exprimer son „effroi“ devant „l’horreur qui s’abat une nouvelle fois sur la communauté éducative“. La classe politique est unanime à exprimer sa tristesse et son indignation. Et aussi à réclamer un important renforcement des mesures de protection autour des établissements scolaires, ce qui a d’ailleurs été aussitôt annoncé par les deux principaux ministres concernés, Gérald Darmanin pour l’Intérieur et Gabriel Attal pour l’Education nationale.
Au demeurant, dès avant cette attaque au couteau du jeune islamiste, qui a aussi blessé grièvement le réceptionniste du grand lycée d’Arras et un autre fonctionnaire, des mesures de sécurité supplémentaires avaient déjà été prises. D’abord à la suite d’informations de la DGSI (Direction générale de la Sécurité intérieure) à propos de risques potentiels d’attentats liés à la venue en France de nombreux visiteurs étrangers pour la Coupe du monde de rugby. Ensuite et surtout, ces tout derniers jours, autour des institutions juives, éducatives notamment (on en compte à peu près une centaine), à la suite du déclenchement d’une nouvelle guerre au Proche-Orient par le Hamas.
Mais cette fois-ci, il va s’agir, si l’on comprend bien, de mettre en place un réseau sécuritaire très vaste, partout en France, existent environ 60.000 établissements d’enseignement primaire et secondaire, dont 49.000 écoles, 7.000 collèges et 3.750 lycées – sans compter, donc, les facultés et les grandes écoles. Ce genre de décision, prise sous le coup d’une très légitime émotion, risque donc, concrètement, d’être très difficile à mettre en œuvre, même en recourant partiellement à l’aide de l’armée.
Quel rapport avec la situation au Proche-Orient?
Parmi les questions auxquelles l’enquête sur le crime d’Arras, accompagné de deux tentatives d’assassinat, va devoir tenter de trouver des réponses, il y a celle de savoir si l’assaillant d’origine tchétchène (comme l’était aussi le bourreau de Samuel Paty), dont la famille avait déjà fait l’objet d’un arrêté d’expulsion en … 2014, a agi seul, de son propre chef – il s’agirait alors, comme disent les spécialistes, d’un „loup solitaire“ – ou s’il est membre d’un réseau.
En tout cas, il était déjà „fiché S“ depuis une dizaine de jours par la DGSI, et le parquet national antiterroriste a ouvert une enquête. Deux de ses frères, en outre, ont déjà eu maille à partir avec la justice pour des comportements suspects autour d’un établissement scolaire, pour l’un, et carrément une préparation d’attentat contre l’Elysée, pour l’autre, qui est toujours en prison. Difficile d’imaginer un profil familial plus exploitable pour les adversaires de toute immigration! Eric Zemmour a d’ailleurs aussitôt saisi l’occasion.
Quoi qu’il en soit, il n’était pas encore possible, hier soir, de déterminer si ce nouvel assassinat d’enseignant avait été commis en lien direct avec l’offensive terroriste du Hamas. Lequel avait appelé, il est vrai, tous les musulmans du monde à faire de ce vendredi „un jour de djihad“. Mais que ce soit le cas ou non, l’affaire est venue renforcer la hantise du président Macron et de son gouvernement de voir les événements du Proche-Orient se trouver, en quelque sorte, „importés“ dans l’Hexagone.
Macron en appelle à l’union, mais …
Tel était bien, d’ailleurs, le sens de l’appel télévisé du chef de l’Etat, jeudi soir, au maintien de l’unité face à la sanglante offensive du Hamas contre Israël (dans la foulée de laquelle une centaine d’actes antisémites ont déjà été recensés dans l’Hexagone) et la riposte, que tout annonce, elle aussi, sanglante, de ce dernier contre ses agresseurs. M. Macron ne s’est pas réfugié pour autant derrière les généralités vagues, puisqu’il a condamné sans ambages et sans recherche de symétrie dialectique „le déchaînement de cruauté absolue du Hamas“ contre l’Etat hébreu. Tout comme il devait rendre hommage, hier après-midi à Arras, à „cet enseignant qui a été lâchement et sauvagement assassiné“.
Reste que l’appel présidentiel à l’unité nationale a pris, sur la scène politique intérieure d’aujourd’hui, une singulière résonance, comme si le chef de l’Etat tentait un ultime raccommodage de la Nupes. L’alliance électorale de la gauche est en effet plus déchirée que jamais après que Mélenchon et son très proche entourage, dont la présidente du groupe parlementaire Mathilde Panot, se sont refusés à qualifier le Hamas de „terroriste“, préférant le présenter comme le „bras armé du peuple palestinien“.
Tous les autres partis de gauche, traditionnellement mobilisés contre toute dérive „islamo-gauchiste“ et antisémite, s’en sont indignés, le député PS Jérôme Guedj allant même jusqu’à parler de „dégoût“ à propos de LFI. „Restons unis“, exhorte Macron? A gauche, pour les prochaines élections et pour plus tard, cela semble tout de même, après cet ultime coup venu du Proche-Orient, assez mal engagé.

De Maart
Sie müssen angemeldet sein um kommentieren zu können