Festival d’Avignon: l’îlot argentin et très humain de Ricardo Bartis

Jetzt weiterlesen! !

Für 0,59 € können Sie diesen Artikel erwerben.

Sie sind bereits Kunde?

Le metteur en scène argentin Ricardo Bartis organise au Festival d'Avignon, avec \"La Pesca\", une partie de pêche dans une cave de Buenos Aires, dont il fait un théâtre d'acteurs à la fragile humanité, centré sur un trio de comédiens aussi viril que sensible.

Ricardo Bartis est l’un des très rares artistes non européens conviés cette année à Avignon, dont la 62e édition fait la part belle aux arts contemporains de la scène s’inventant dans le Vieux-Continent. Il y a bien dans la programmation 2008, qui se déroule jusqu’au 26 juillet, une installation des cinéastes américains Stephen et Timothy Quay, ainsi qu’un spectacle du Libano-Québécois Wajdi Mouawad: mais les premiers sont installés à Londres, et le second est très actif en France. Loin de toute sophistication visuelle esthétisante ou de complexité dramaturgique, Ricardo Bartis est de retour au Festival d’Avignon, où il s’était déjà produit en 1999, avec la simplicité et l’efficacité narratives de son art assez brut, travaillé à base d’improvisations. Le décor est unique: trois hommes dont un d’âge mûr se retrouvent dans un sous-sol défraîchi (tôles rouillées, vieux objets), dont des gamins ont fait jadis un club de pêche au nom pompeux vu l’endroit („La Gesta Heroica“), abandonné depuis les années 1970. On se demande d’abord ce qu’ils vont y faire avant de s’apercevoir qu’il y a là un modeste trou creusé dans le sol où affleure une rivière souterraine: le trio va y taquiner la tararira „titan“, monstrueux poisson argentin dont l’existence n’est pas avérée mais qui va nourrir leurs fantasmes. La mare peut être vue comme une métaphore des frustrations qui remontent dans les conversations des trois personnages, partagées entre débat politique de bas étage sur les vertus du péronisme et évocation pathétique quoique hilarante de leurs peines de coeur ou pulsions érotiques. Les trois hommes se cherchent, dansent la chenille sur le „O Que Sera“ de Chico Buarque et le plus vieux d’entre eux, qui avait d’abord dévalé un escalier sur les fesses, tombe dans la mare en fin de spectacle: la compagnie, au jeu très physique, porte bien son nom de Sportivo Teatral. Après les représentations au Parc des expositions de Châteaublanc (jusqu’au 23 juillet), le Festival d’Avignon a organisé une tournée européenne qui mènera „La Pesca“ à l’automne à Berlin, Anvers (Belgique) et Gérone (Espagne).