De Gudde WëllenElectro belge par Jean-Paul Groove

De Gudde Wëllen / Electro belge par Jean-Paul Groove
Au De Gudde Wëllen ce samedi: Jean-Paul Groove Source: deguddewellen.lu

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Robotique et organique, Jean-Paul Groove déchaîne la scène bruxelloise, et au-delà, avec sa musique électronique jouée avec „de vrais instruments“. Composé par Nils Hilhorst (guitare), Jeremy Debuysschere (basse) et Denis Baeten (batterie), le groupe sera en concert samedi soir au De Gudde Wëllen. Zoom.

La Belgique possède un passionnant passé électronique. Déjà, il n’y a qu’à longer allégrement les années 1980 pour en extirper deux genres d’électro bien enivrants dont les racines s’agitent dans le plat pays. D’abord, l’EBM, l’acronyme qui désigne l’electronic body music. S’il a été employé la première fois en 1978 par Ralf Hütter de Kraftwerk pour qualifier la sonorité de „The Man-Machine“, le terme a été repris par les Belges de Front 242 afin de qualifier leur son sévère, dur du genou, leurs mélodies aussi frigides que le computer, ainsi que leurs paroles sèches en forme de slogans potentiels. Dans le même train, au wagon industriel, s’entassent des entités aussi troubles et mécaniques que The Neon Judgement ou Klinik. Ensuite, à la fin des eighties, la température grimpe, la new beat prolonge l’expérience de l’électronic body music (et de la new wave) en la trempant dans l’acid house; emportés par son euphorie dark, les danseurs font trembler la piste comme des automates exaltés. La new beat doit beaucoup à la Belgique par l’entremise de formations comme Confetti’s, Tragic Error, Lords Of Acid, Bassline Boys. Et ce, en plus du fait que le genre a été accueilli à bras ouverts – et en l’air – au Boccaccio Life (Destelbergen), jadis le plus grand mega-dancing d’Europe. En 2012, un documentaire signé Jozef Devillé revient sur les origines de la new beat belge, avec un titre pour le moins explicite, „The Sound Of Belgium“. Il y a de quoi être fier – ou chauvin. Et il y a de quoi affirmer, sans tourner autour du dancefloor, qu’il existe un son électronique estampillé „Belgique“.

Retour vers le présent. Décennie 2020, il y a le „Brussels Sound“. Sont de la party Kuna Maze, Echt, KAU ou Tukan. Tous ont éclos à la fin de la pandémie du Covid-19. Ce n’est pas un hasard. Mixant pour la plupart jazz, électro et rap, improvisation et préparation, il y a, dans le geste, le reflet d’une furieuse envie de jouer, de bouger, de communiquer, de partager. Le confinement a laissé un temps indéfini, voire infini, pour peaufiner des lives, jusqu’à ce que ceux-ci soient millimétrés; la frustration débouche sur la libération; aux imprévus de se charger du reste; en musique, les accidents font souvent surgir les plus beaux miracles. Et si l’on parle de Brussels Sound, les concernés ne viennent pas tous de cette ville. C’est, en revanche, dans la capitale belge qu’ils se retrouvent pour enregistrer, jouer, se déchaîner, grâce à des structures (Volta, Magma) ou des clubs (C12, Botanique, VK, Fuse). Une émulation collective, ce Brussels Sound. Une petite révolution. Ah oui, d’ailleurs, Brussels Sound Revolution, responsable du tube allumé „Qui…?“ (1989), était un groupe belge de new beat.

Machines humaines

A la liste de ladite scène Brussels Sound s’ajoute illico Jean-Paul Groove, un groupe trépidant où s’illustrent Nils Hilhorst (guitare), Jeremy Debuysschere (basse) et Denis Baeten (batterie). Si le trio porte sur ses épaules un nom potache (avant lui, c’était celui du duo de DJ Delphine Casassus et Claire Pichon ainsi qu’un gimmick de la chanson „Jean-Paul“ signée Thérapie Taxi), sa musique s’avère franche du collier, droit au but et fortiche quand il s’agit de secouer en même temps les jambes et le palpitant. Son patronyme, à l’image de sa musique, ne vient pas de nulle-part, non, il vient du batteur suisse Jojo Mayer, sosie présumé de l’acteur Jean-Paul Rouve. Jojo Mayer est un musicien qui a remixé la jungle avec sa batterie acoustique; voilà un procédé fort aventureux, qu’il appelait „rétro-ingénierie“. Jean-Paul Groove poursuit dans cette voie.

JPG souhaite rendre l’électronique plus humaine, en remplaçant les machines. L’intelligence n’est pas qu’artificielle. Pas besoin d’ordinateur. La guitare déploie ses riffs comme de nappes. La batterie, qui court plus vite que la musique, joue du breakbeat. La basse virevolte, booste le pogo du cœur dans la poitrine. Ces loopings sont réalisés sans trucages. Le groupe belge triture les métriques et oscille entre les répétitions et l’imprévisibilité. La digression est plus importante que le point de départ et le point d’arrivée. Le sens de l’improvisation autant que la dextérité rappellent, si besoin, que les trois musiciens ont été formés au conservatoire de jazz. On pense parfois à PVT, lorsque le groupe s’appelait encore Pivot, mais en plus extatique, violent, funk et punk, sinon à un titre tel que „Drame“ de Drame (side-project de Rubin Steiner), bombe house-techno jouée par de „vrais instruments“.

Enfin, plus encore que la new beat, Jean-Paul Groove s’inspire du big beat, soit le mix de breakbeat, techno, rap et rock, un style en vogue dans les 90’s via Fatboy Slim, The Chemical Brothers ou The Prodigy – leur idole numero uno. Retour alors aux années 1990? Non, JPG ne fait pas dans l’électro-rétro: par analogie avec le post-rock, dont l’architecture de leurs morceaux peut faire écho, le trio invente une sorte de post-techno. Et sa performance scénique transforme la salle de concert en rave à ciel fermé.

Jean-Paul Groove

Rendez-vous ce samedi, 25 mai, au De Gudde Wëllen à Luxembourg-ville (17, rue du St Esprit, Luxembourg). À partir de 20 h 30.