Red bridge projectUn théâtre pacifique

Red bridge project / Un théâtre pacifique
Dans „Sea beneath the skin“, des artistes des Kiribati performent sur une musique jouée par l’Orchestre philharmonique Photo: MAU

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Pour le troisième rendez-vous du Red Bridge Project, l’artiste samoan Lemi Ponifasio investit la Philharmonie pour un nouveau spectacle qui casse les frontières, au départ des îles Kiribati.

C’est peut-être la première et la dernière fois que des performeurs des Kiribati se produiront au Luxembourg. Car pour que leurs traditions arrivent une première fois sur scène au Luxembourg, il aura fallu un de ces rares artistes sous nos latitudes qu’est Lemi Ponifasio. Soucieux de nourrir ses spectacles de sa cosmovision, comme il nomme son univers mental ancré dans les îles Samoa, il recourt aux artistes de communautés d’îles du Pacifique pour la majeure partie de ses travaux. C’est ainsi qu’en octobre dernier, pour le premier rendez-vous du Red Bridge Project, la pièce „Jerusalem“, ce sont des artistes maoris qui étaient sur scène, dans un spectacle universel nourri à la poésie d’Adonis, pour mieux dénoncer la violence et les guerres, mais surtout contribuer à une redéfinition du théâtre contemporain. Fin janvier, pour „Love to death“, Lemi Ponifasio déplaçait la focale en entremêlant les chants et traditions de la communauté mapuche du Chili avec le flamenco dans un déluge de sons captés lors de manifestations violemment réprimées à Santiago du Chili. 

De Mahler aux Kiribati

Mais si l’apparition des artistes Kiribati sur la scène de la Philharmonie pourrait être aussi la dernière, c’est parce que la montée des eaux due au réchauffement climatique met particulièrement en péril les trois archipels et trente-deux atolls qui composent leur pays. D’ici quelques décennies, les îles Kiribati et leurs cultures pourraient disparaître sous les eaux. Ce destin quasiment inéluctable, comme les pollutions diverses et variées de l’océan, sont au cœur du propos de „Sea beneath the skin“. Elle part du conte d’un arbre gigantesque (Kauri tree) et de la baleine, qui vivaient en symbiose jusqu’à ce qu’une sécheresse les sépare, et … les lie à tout jamais, l’arbre proposant à la baleine d’échanger leurs peaux.  

Les communautés kiribati sont entrées dans la compagnie MAU de Lemi Ponifasio en 2010. „Sea beneath the skin“ s’inscrit dans le prolongement de „The Song of the Earth“, projet développé en 2023 avec l’Orchestre philharmonique de la Nouvelle-Zélande. S’il est attaché à partir de ses racines, à aligner sa pratique artistique avec son héritage culturel, Lemi Ponifasio pense souvent ses spectacles, qu’il nomme des „cérémonies“, dans la rencontre avec l’Autre et sa culture. Dans „Sea beneath the skin“, il mêle donc les traditions et chants kiribati avec „Das Lied von der Erde“ de Gustav Mahler, qu’interprètera l’Orchestre philharmonique. On peut d’ailleurs voir un parallèle entre la démarche de Gustav Mahler s’inspirant de philosophie chinoise pour composer „Das Lied von der Erde“ et celle de Lemi Ponifasio.

Le quatrième et avant-dernier rendez-vous du Red Bridge Project aura lieu le 28 juin. Il s’agira de „The Manifestation“, en collaboration avec le Mudam, la troisième institution qui collabore autour du Red Bridge Project avec la Philharmonie et le Grand Théâtre. Cent cinquante personnes issues des communautés luxembourgeoises défileront depuis le Glacis jusqu’au Mudam en empruntant le Pont rouge.

Infos

„Sea beneath the skin“ est présenté vendredi 14 juin à la Philharmonie à 19.30 h (90 minutes sans entracte). Le spectacle est précédé d’un „artist talk“ entre Lemi Ponifasio et Matthew Studdert-Kennedy, directeur de la programmation de la Philharmonie (à 18.30 h à la salle de musique de chambre).