Montag1. Dezember 2025

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Concert Release party du nouvel album de Turnup Tun

Concert  / Release party du nouvel album de Turnup Tun
Lors de la release party à la Kulturfabrik, vendredi 13 Photo: Marie Romanova 

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Vendredi 13 octobre à la Kulturfabrik, Turnup Tun a joué „Nuit Blanche“, son nouvel album sorti quelques mois après „Realtalk“. Entre titres coups de poings et caresses sonores, Tun Tonnar, de son vrai nom, a livré un set varié, intime, tantôt nerveux, tantôt cotonneux. Cette performance, tant de rappeur que de chanteur, a rappelé si besoin qu’il était l’un des plus fiers représentants du panorama hip-pop luxembourgeois.

Il est 20 h 30 quasi pétantes. Le show s’apprête à démarrer quand Turnup Tun invite les spectateurs à se lever de leur chaise de bar, comme un conducteur de bus longue distance appellerait ses passagers à regagner leur place. La salle s’emplit en un battement de cil pendant que le set d’Irem se déploie entre chansons à boire (ses propres larmes) et à danser. Artiste du label Beast Records produite par notre tête d’affiche, Irem enchaîne ses titres r&b avec des variations de tempo et de langues, anglais, allemand, français – et même une trace d’italien sur „Espresso Martini“. Irem rappelle parfois Angèle, lorsqu’elle laisse subtilement glisser sa voix dans la nonchalance d’une chaude mélancolie. Dans „Rien à te dire“, Irem chante „Je n’ai plus rien à te dire“; on attend pourtant de l’écouter encore. La future candidate à l’Eurovision 2024?

Sans pause, Luk prend la relève et livre un set percutant, se rapprochant peu à peu du rap, de ses sous-genres, et de la langue luxembourgeoise – donc de son grand-frère Turnup Tun. En plus d’un choix intéressant, moins par nationalisme que par audace, le chant en luxembourgeois confère au rap une grande singularité et, il faut le dire, une fluidité à l’oreille qui se révèle davantage en live par l’élasticité du flow qui cogne sur le micro. Et Turnup Tun de le confirmer haut la main.

Occuper l’espace

Les applaudissements rythment l’arrivée de Turnup Tun, le rappeur qui a fait plus de bruit qu’une ovation de concert avec „FCK LXB“ („Féck Lëtzebuerg“, soit „Fuck Luxembourg“), morceau adressé à des figures de la droite populiste nationale lui ayant valu un procès, duquel il a été acquitté. Alors qu’il s’est lui-même présenté en tant que candidat fictif pour le parti MDR, Tun joue une semaine après les résultats des élections législatives du Luxembourg; ce live ne trinque pas à la progression de l’ADR mais à la sortie de son nouvel effort, „Nuit Blanche“. L’album succède à „Realtalk“, sorti en avril dernier, ainsi qu’à la mixtape „Schlëmme Summer 2“ enregistrée en deux semaines à Berlin: autant dire qu’en bon stakhanoviste, Turnup Tun occupe l’espace. La pochette de son nouveau disque dévoile les multiples facettes de l’artiste, toujours en mouvement. Turnup au clavier, Turnup à la guitare, Turnup qui boit, Turnup qui ne dort pas; ce titre lui va si bien, sa „Nuit blanche“ tombant après celles de Lacrim, de Luidji ou d’Orties en duo avec Christophe („Mes nuits blanches“), pour ne citer que des exemples de rap.

Turnup Tun décortique des thématiques telles que l’amour ou l’addiction aux réseaux sociaux, ces obsessions qui ne sortent plus de la tête, comme un refrain digne de ce nom. Le rappeur-producteur luxembourgeois revendique sa passion pour les tubes et il est évident qu’il a ici œuvré dur pour concevoir des titres fédérateurs, via l’efficacité de ses beats aguicheurs et de ses mélodies accrocheuses („Summersong“ et ses BPM accélérés). Sans écraser le contenu social, qui est la marque de fabrique du fils de Serge Tonnar, ses chansons font lever le poing en l’air, mais aussi les bras. Le potentiel dansant est validé par la foule, à l’instar de ce jeune homme qui remue son corps avec une frénésie ivre, tout en immobilisant sa main sur le téléphone, afin que son enregistrement ne soit pas saccadé. Et ce, d’autant plus que Turnup Tun occupe l’espace également sur l’estrade, se déplaçant de gauche à droite, de droite à gauche, ouvrant ses bras en grand comme s’il voulait enlacer la salle entière.

Bête de scène

La nuit n’est pas que blanche, elle est aussi verte, rouge, bleue, selon l’humeur des lumières. Pour ne pas être ébloui, Turnup Tun garde ses rondes lunettes noires. Les rayons tournoient sur le torse et le ventre de Turn, dont la chemise est bien ouverte, à l’aise dans ses baskets donc dans son corps – on repense alors à „Big Mec“, son titre à propos du fat shaming. Si le nom de son label est Beast Records, Turnup Tun est une bête – de scène. Du planant „Horoskop“, avec ses échos réverbérés, au nerveux „Jackpot“, débité avec une scansion presque métal-punk (ses premières amours), Tunnar switche du rap à la pop, de la trap au 2-step, de la jungle à la drill. Il y a autant de rap rentre-dedans que de pop-rock brumeux, renforcé par la présence de son batteur et de son guitariste.

Les voltiges vocales rappées alternent avec le chant aux mélodies bien tricotées, les bidouillages émanant de l’ordinateur avec les solos de guitare; il s’agit en fait aussi bien d’un concert de producteur que de compositeur, de rappeur autant que de chanteur. Tonnar joue aussi quelques morceaux du passé, désormais des classiques du rap luxembourgeois, il n’y a qu’à se tourner pour voir les paroles reproduites sur les lèvres du public. Sans oublier un point important: qu’il s’agisse de Chaild, Angel Cara, Skibi, Skinny J, Maale Gars ou de Tommek, tous les invités prouvent à travers leur style la richesse de la scène rap luxembourgeoise, tout en entourant le live de Tonnar d’un halo amical ou familial. Son parti politique, c’est cette bande. A voté: pour Turnup Tun.

La pochette du nouvel album de Turnup Tun, „Nuit blanche“
La pochette du nouvel album de Turnup Tun, „Nuit blanche“