Relancer l’offensive contre un texte adopté voici plus de deux mois par les deux chambres du Parlement – grâce, il est vrai, pour l’Assemblée nationale, au recours à l’article 49-3 de la Constitution, très controversé – puis validé par le Conseil constitutionnel, et promulgué dans la foulée par le président de la République: l’utilité stratégique de cette démarche, quoi que l’on pense du fond de l’affaire, ne saute pas nécessairement aux yeux. Mais pour la gauche politique et syndicale, elle répond à deux considérations au moins.
La première est que, malgré une évidente lassitude devant ces journées de protestation à répétition (celle d’aujourd’hui est, depuis le début du débat parlementaire, la 14e!), l’opinion publique française reste majoritairement hostile à la réforme, même si elle pense, majoritairement aussi, que les jeux sont faits et que le gouvernement ne l’abrogera pas. Il s’agit en somme, pour les syndicats, de ce point de vue, de montrer qu’ils n’abandonnent pas leurs militants et électeurs, même si la bataille peut sembler perdue.
En second lieu, on a pu constater qu’après une sortie de crise difficile, avec notamment ces bruyantes „casserolades“ qui saluaient à leur façon chaque sortie sur le terrain des ministres et du président, le chef de l’Etat, alors au plus bas dans les sondages, était parti à la reconquête au moins partielle de l’opinion, avec un résultat encore bien modeste mais tout de même perceptible dans les sondages puisqu’il a repassé la barre des 30, voire 32% d’opinions positives. En multipliant à cette fin les déplacements en province, avec à chaque fois une ou plusieurs annonces positives, en termes de crédits publics notamment.
Piqûre de rappel
Et malgré cette rechute dans le „quoi qu’il en coûte“, dont son ministre des Finances, Bruno Le Maire, avait assuré qu’il était vraiment fini, l’agence Standard and Poor’s a même fait à la France, vendredi soir, le cadeau fort bienvenu pour l’exécutif de ne pas dégrader davantage la notation de sa dette. Et cela, très probablement, pour le „récompenser“ d’avoir tenu bon sur sa réforme des retraites, supposée limiter dans l’avenir l’appel de Paris à des capitaux étrangers pour financer ses dépenses publiques.
Dans l’esprit des syndicats, une sérieuse piqûre de rappel s’imposait donc, si mince que fût l’espoir de voir le gouvernement renoncer brusquement à ce qui, en termes de popularité, lui aura coûté si cher à imposer. Et cela d’autant plus qu’après-demain 8 juin, les députés vont être saisis (voir Tageblatt du 31 mai) d’une proposition de loi tendant à … supprimer la réforme des retraites. Dans des conditions qui, il est vrai, devraient conduire la présidente de l’Assemblée, Yaël Braun-Pivet, à prononcer son irrecevabilité, au nom de l’article 40 de la Constitution.
S’agissant des manifestations d’aujourd’hui, les services gouvernementaux s’attendent à une affluence se situant de 450.000 à 600.000 protestataires sur l’ensemble de l’Hexagone. Quant au grèves, elles devraient surtout affecter, comme à l’accoutumée, le secteur public, en particulier dans les transports et l’enseignement. Les chiffres seront scrutés avec attention, pour tenter de voir s’il s’agit d’une ultime manifestation de mauvaise humeur avant de passer à autre chose, ou bien si le malaise social reprend de l’intensité.
De Maart
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