Il est vrai que le chef du gouvernement semble bien, cette fois-ci, ne pas se contenter de demi-mesures, en ce „moment de vérité“, a-t-il dit, pour les finances publiques. Le surendettement du pays, qui „progresse de 1.500 euros par … seconde!“, a-t-il souligné, „est pour la France une malédiction qui n’a pas d’issue“, et il faut donc, d’ici 2029, stabiliser la dette publique, laquelle frôle actuellement les 3.400 milliards euros. Et, dans l’immédiat, trouver durant le prochain exercice budgétaire 43,8 milliards d’euros d’économies, compte tenu des dernières annonces faites par le président Macron en matière de crédits militaires (voir Tageblatt du 14 juillet), une somme qui permettrait déjà de réduire le déficit annuel à 4,6 % du PIB, et amorcer le redressement.
Cela grâce à un ensemble de mesures regroupées sous le titre „Stop à la dette“, un second train de réformes devant porter sur le retour à la croissance, lequel ne manquerait pas d’avoir des effets heureux sur l’emploi, le pouvoir d’achat et corollairement les rentrées fiscales. „Ce plan passe par la stabilisation et la baisse de la dépense publique, puisque l’Etat va réduire presque toutes ses dépenses, y compris son train de vie“, a prévenu François Bayrou; mais „tout le monde devra participer à l’effort, et tous les ministères seront solidaires“.
Parmi les sources d’économies, à hauteur de sept milliards, une „année blanche“ va être instaurée en 2026. Autrement dit un exercice budgétaire dans lequel on n’augmentera plus ni les prestations (retraites, salaires de la fonction publique, pensions diverses), ni les barèmes fiscaux, quelle que soit l’inflation. Il s’agit là, a reconnu le premier ministre, d’un „effort collectif très important, mais temporaire, qui concernera toutes les catégories de Français. La règle sera de ne pas dépenser plus en 2026 qu’en 2025. Pas moins, mais pas plus.“
Deux jours fériés supprimés
Autre économie: deux jours fériés seront supprimés, en principe „le lundi de Pâques, qui n’a aucune signification religieuse, et le 8 mai, dans un mois de mai devenu un véritable gruyère“, a estimé M. Bayrou, „pour que l’activité du pays dans son ensemble soit plus importante dans l’année“. Le gouvernement souhaite par ailleurs réduire de moitié la hausse des dépenses de santé de 10 milliards d’euros prévue pour 2026. Un effort qui sera notamment réalisé par le doublement à 100 euros de la franchise de remboursement annuel des médicaments.
Le chef du gouvernement veut en outre „demander un effort particulier à ceux qui ont la capacité de contribuer davantage“, que ce soient les ménages les plus aisés ou les grandes entreprises. Une „contribution de solidarité“, dont les contours doivent être définis avec le Parlement, sera demandée aux plus fortunés, et l’abattement fiscal des retraités, d’un montant actuel de 10% (pour „frais professionnels“, ce qui est évidemment un peu absurde pour des gens qui ne travaillent plus) sera modifié.
Du côté des efforts de l’Etat lui-même, celui-ci ne remplacera plus un fonctionnaire sur trois partant à la retraite dans les prochaines années. Et de très nombreuses agences publiques qui se seront révélées, ces dernières années, bien peu utiles, seront fermées, ce qui devrait aboutir à la suppression de 1.000 à 1.500 emplois. Au même chapitre, les participations de l’Etat dans certaines sociétés seront revues, la lutte contre la fraude fiscale et sociale sera renforcée, cependant que l’Assurance-chômage, et d’une manière plus générale le droit du travail, feront l’objet de nouvelles négociations.
„Année blanche“ ou „année noire“?
Bien que présenté d’un ton qui se voulait plus convaincant que comminatoire, et laissait de-ci de-là la porte entrouverte à de futurs arrangements, ce plan a aussitôt hérissé l’ensemble de l’opposition politique et syndicale, dans un registre souvent très vif. Jean-Luc Mélenchon, au nom de La France insoumise, a ainsi estimé que ce plan de sauvetage revenait à „détruire l’Etat et les services publics pour ouvrir l’espace aux marchés“, et à „faire payer le grand nombre pour épargner les très riches“. Du même côté de l’échiquier, François Ruffin a parlé de „massacre à la tronçonneuse“ et de „saignée“, appelant „une censure dès que possible“, et considéré que cette „année blanche“ annoncée par M. Bayrou sera en fait „une année noire“.
„Il y a décidément de nouvelles Bastilles à prendre!“ a lancé de son côté le communiste Fabien Roussel, notamment à propos de l’idée de supprimer deux jours fériés dans l’année, une hypothèse qui suscite aussi la colère des syndicats. Sophie Binet, la secrétaire générale de la CGT, estime notamment qu’„après nous avoir volé deux ans de notre vie“ avec le plan de redressement des caisses de retraites, „ce gouvernement veut nous voler deux jours de plus, alors que les travailleurs ont besoin de se reposer et qu’il s’agit là, tout simplement, d’un progrès social“. Pour le premier secrétaire du PS Olivier Faure, „Bayrou aurait pu choisir la justice, il a préféré la violence“.
Et Marine Le Pen d’avertir: „Si Bayrou ne revoie pas sa copie, nous le censurerons“. Formulation un peu moins radicale que celles de la gauche, mais cette (très relative) modération illustre en fait le double souci actuel du Rassemblement national: se mêler le moins possible à la gauche en général, et LFI en particulier, dans des opérations de stratégie parlementaire, et continuer à peser le plus possible sur l’exécutif, maintenant que le PS est retourné à l’opposition pure et dure. Quant à François Bayrou, il n’a pas caché, dans son discours d’avant-hier, combien il se savait vulnérable; au point que son plan pour l’avenir prenait parfois l’accent d’un testament pour l’histoire, un peu à la manière de Pierre Mendès France sous la IVe République. Etant entendu que, pour l’histoire aussi, il préférerait évidemment l’emporter.
De Maart
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