Donnerstag13. November 2025

Demaart De Maart

FranceLes „Sages“ valident l’essentiel de la réforme des retraites

France / Les „Sages“ valident l’essentiel de la réforme des retraites
Le siège du Conseil constitutionnel était bien gardé hier Photo: Ian Langsdon/AFP

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Le Conseil constitutionnel, tout en invalidant juridiquement plusieurs articles du texte de la réforme des retraites qui lui était soumis, en a validé hier le dispositif essentiel et le plus controversé: celui qui portera l’âge normal de la retraite de 62 à 64 ans. Il a par ailleurs rejeté le projet de RIP (référendum d’initiative partagée) qui lui était soumis par l’ensemble de la gauche pour tenter d’annuler cette disposition.

L’exécutif dans son ensemble, président Macron en tête, ne pouvait hier soir que se sentir soulagé de l’arrêt rendu par les Sages, même s’il n’était pas question de le montrer exagérément, ce qui eût évidemment été perçu comme une provocation bien dangereuse politiquement. La réaction aussitôt publiée par la première ministre est significative à cet égard: „Le Conseil constitutionnel a statué, la réforme arrive à la fin de son processus démocratique, et il n’y a ce soir ni vainqueurs ni vaincus.“

Pour le chef de l’Etat, en effet, la voie est maintenant libre pour procéder – d’ici quarante-huit heures, dit-on – à la promulgation de la loi, même si sa mise en œuvre concrète doit encore prendre ensuite de longs mois, en procédant par tranches d’âge. S’ajoutant à la nouvelle baisse, avant-hier, des effectifs de manifestants (moins de 400.000 sur l’ensemble de la France) et de grévistes (moins de 5%), le climat peut sembler, à première vue, s’éclaircir pour le pouvoir. Et cela après de longs mois plus qu’orageux.

À première vue, oui … mais les premières réactions enregistrées dans les rangs de la gauche politique et syndicale comme au Rassemblement national peuvent tout de même laisser imaginer à Matignon comme à l’Elysée que la bataille qui fait rage autour des retraites ne va pas cesser comme par enchantement. Au contraire, même, assurent les organisateurs des précédentes journées nationales de contestation: selon eux, l’arrêt du Conseil constitutionnel va donner un coup de fouet à une protestation qui commençait, au moins numériquement, à s’essouffler.

En attendant le 1er mai

L’intersyndicale pourrait organiser dès ce week-end de nouvelles manifestations. Mais c’est surtout le 1er mai, fête du travail, qui devrait donner lieu à un grand défilé parisien de la part de syndicats, lesquels évoquent déjà „un immense raz-de-marée populaire“, appelé à „faire date dans l’histoire sociale de la France.“ Qui, de toute façon, n’entendent pas rencontrer Emmanuel Macron (qui les avait invités pour mardi prochain) ou Élisabeth Borne avant cette date. Et certains ajoutent: ou pour parler d’autre chose que la non-application de la réforme, sous une forme ou sous une autre.

C’est en particulier le cas de Sophie Binet, la nouvelle secrétaire générale de la CGT, pour qui „Emmanuel Macron ne peut pas continuer à diriger le pays contre la très grande majorité de sa population“. Le président de la République, de son côté, pourrait en tout cas s’adresser aux Français au début de la semaine prochaine, peut-être dès après-demain soir.

En tout cas, nombre de responsables politiques, aux deux extrêmes de l’éventail en particulier, ont aussitôt remis en cause, au-delà des décisions du Conseil, son fonctionnement, voire son existence même. Ainsi par exemple de Jean-Luc Mélenchon, qui n’a pas hésité à déclarer que „le Conseil constitutionnel montre qu’il est plus attentif aux besoins de la monarchie présidentielle qu’à ceux du peuple souverain“. Ou du secrétaire national du PCF, récemment reconduit très largement dans ses fonctions, Fabien Roussel, pour qui „ce n’est plus simplement de l’huile que Macron va jeter sur le feu [en promulguant cette loi], c’est un jerrican d’essence!“ Quant à Marine Le Pen, elle a fait valoir que de toute façon, les prochaines élections donneraient une majorité hostile à la réforme et que celle-ci serait donc facilement abrogée.

Vers un nouveau RIP

Paradoxe: les adversaires de la réforme déplorent, outre bien sûr sa validation pour l’essentiel, la censure totale ou partielle, au contraire, de six de ses articles par les Sages (sur trente-six). Car il s’agissait de mesures sociales, en faveur de l’emploi des seniors notamment, rajoutés par le gouvernement pour „gauchiser“ un peu son texte. Ce qui n’avait certes pas suffi à convaincre l’opposition de le voter – elle parlait alors de faux-semblant et de poudre aux yeux – mais lui donne tout de même désormais l’occasion de les regretter.

L’argument des Sages étant que ces „cavaliers sociaux“, comme on nomme ainsi ces rajouts sans lien direct avec l’objet de la réforme, n’avaient rien à faire dans un projet de loi des finances rectificative sur la Sécurité sociale. Certains analystes pensant d’ailleurs que le gouvernement le savait bien, et qu’il a délibérément cherché à donner aux Sages, dans une démarche passablement tortueuse, de quoi rejeter une partie de son texte, ce qui, paradoxalement, ajouterait à sa légitimité globale. Ces articles rejetés comme n’ayant rien à faire dans une loi de finances pourront d’ailleurs être représentés à l’Assemblée, mais dans un cadre juridique approprié.

Quant à l’invalidation constitutionnelle du projet de référendum d’initiative partagée, le détail de la motivation des Sages n’était pas encore publié hier en toute fin d’après-midi. L’organisation d’une telle consultation populaire suppose le soutien préalable d’une partie significative du Parlement, mais aussi, sous forme de grande pétition nationale, de 10% des électeurs inscrits, soit environ 4,8 millions de personnes. Un autre projet, toujours destiné à faire annuler la réforme, est déjà en cours de préparation.

Mais c’est sur un plan plus général que les Français retiennent leur souffle, et s’interrogent plus que jamais sur l’avenir. Le leur, personnel et collectif, mais aussi celui du quinquennat d’Emmanuel Macron. C’était déjà le cas dans l’attente du verdict du Conseil constitutionnel; c’est au moins aussi vrai après …

big
16. April 2023 - 9.15

Si seulement les gens de la rue étaient des "sages".