Montag20. Oktober 2025

Demaart De Maart

France-IsraëlLes relations en pleine crise – Macron répond sèchement à Netanyahou

France-Israël / Les relations en pleine crise – Macron répond sèchement à Netanyahou
Emmanuel Macron et Benyamin Netanyahou Photo: AFP/Yves Hermann et Abir Sultan

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Les relations se tendent singulièrement ces jours-ci entre la France et Israël, avec des courriers peu amènes, à commencer par celui de Benyamin Netanyahou. Ce n’est certes pas la première fois que la politique étrangère de l’un des deux pays vient à déplaire à l’autre. Et avec sa prochaine reconnaissance de l’Etat palestinien, M. Macron pouvait s’y attendre, même si Paris a été précédée dans cette voie par 147 autres capitales (voir Tageblatt du 26 juillet). Mais la controverse prend un tour inhabituel, et même doublement.

Tandis que sur le plan intérieur l’Elysée s’affaire à trouver une issue à la crise politique que devrait ouvrir la probable mise en minorité de François Bayrou au Parlement le 8 septembre prochain, son locataire doit aussi, sur le plan diplomatique, se livrer à une activité plus épistolaire, en direction du Proche-Orient, ou à son propos.

Première correspondance: une lettre courroucée, et en fait point si diplomatique que ça, de M. Netanyahou. Avec deux entorses majeures aux usages, en effet: d’une part, le texte a été publié par les services du premier ministre israélien avant qu’il n’ait été transmis à son destinataire français; d’autre part, partant d’une critique qu’un chef de gouvernement étranger a en effet bien le droit d’exprimer à un autre dirigeant, son auteur ne s’en permet pas moins un certain nombre de remarques portant sur la politique intérieure de la France. La réponse de six pages d’Emmanuel Macron à Benyamin Netanyahou – une réponse qu’il a, lui, fait d’abord parvenir à son destinataire avant de la rendre publique, „par élémentaire courtoisie“ souligne-t-il – s’articule autour de trois idées majeures.

La première est que „la lutte contre l’antisémitisme ne saurait être un sujet d’instrumentalisation et ne peut nourrir aucun désaccord entre Israël et la France“. Le chef de l’Etat met en avant son propre engagement à cet égard, et insiste sur le fait que „la totalité des services de l’Etat y est engagée“. Même s’il reconnaît que les actes antisémites se sont multipliés en France depuis le pogrom géant perpétré par le Hamas le 7 octobre 2023, quoique plutôt un peu moins qu’au Royaume-Uni, aux Etats-Unis ou en Allemagne. Et dans l’entourage présidentiel, on ne se cache pas d’estimer que le meilleur moyen de réduire le „feu antisémite“ dont parle M. Netanyahou serait de mettre un terme à „la guerre permanente à Gaza“, dans laquelle M. Macron voit „une fuite en avant meurtrière et illégale“.

La reconnaissance de la Palestine

En second lieu, M. Macron, dans sa réponse, se livre à un énergique plaidoyer en faveur de la reconnaissance de la Palestine comme Etat. Une reconnaissance qu’il s’apprête à officialiser, de concert avec d’autres pays, durant la première semaine de l’Assemblée générale de l’ONU, laquelle s’ouvrira le 22 septembre. Il s’agit là, insiste le président français, non pas d’une „récompense au terrorisme du Hamas“ comme le proclame Netanyahou, mais comme „la meilleure façon d’assurer la sécurité d’Israël, car la naissance d’un Etat palestinien doit constituer la fin du Hamas“.

Enfin – et c’est sans doute là l’idée qui a le moins de chance d’aboutir dans l’immédiat – le président français presse son interlocuteur israélien de profiter de la dynamique qui se serait esquissée selon lui lors de la conférence tenue en juillet dernier à New York sur une „solution à deux Etats“ pour s’y rallier, ou du moins pour commencer à l’examiner favorablement.

Mais M. Macron n’en était pas quitte, sur ce terrain, avec cet échange. Il lui restait à recevoir une autre lettre, beaucoup plus étrange au fond: celle d l’ambassadeur des Etats-Unis à Paris, M. Charles Kushner, un parent de la famille Trump qui n’a présenté ses lettres de créances que le mois dernier. Si frais émoulu que soit ce „diplomate“, sans expérience aucune dans la carrière ni passé d’aucune sorte au Département d’Etat, il n’en a pas moins osé tancer le chef de l’Etat où l’ont propulsé les faveurs de la Maison-Blanche, quitte à lui offrir aussi ses services.

Les reproches de l’ambassadeur américain

M. Kushner reproche ainsi par écrit à M. Macron, là aussi en donnant une large publicité à sa lettre, son „absence d’action suffisante face à la flambée de l’antisémitisme en France“, et il fait lui aussi référence à la décision française de reconnaître la Palestine. Signature d’un comportement résolument anti-diplomatique: il indique au pied de sa lettre qu’il en envoie le double, non seulement à son propre président Donald Trump, ce qui peut aller de soi, mais surtout à Benyamin Netanyahou, dont il reproduit pieusement l’argumentaire.

Or il se trouve que M. Kushner se trouvait la semaine dernière en Israël, d’où il a lui-même posté une photo en compagnie de Mike Huckabee, son collègue trumpiste dans l’Etat hébreu, qui est lui-même un partisan déclaré de la colonisation des territoires palestiniens et un ami personnel de Netanyahou. On comprend donc que le Quai d’Orsay ait convoqué M. Kushner pour une explication, non pas tant sur le fond que sur ce manquement spectaculaire à tous les usages diplomatiques.

Lequel, soulignent les diplomates français, „va à l’encontre du droit international, en particulier du devoir de ne pas s’immiscer dans les affaires intérieures des États prévu par la Convention de Vienne de 1961 qui régit les relations diplomatiques“. Alors que M. Kushner proposait tranquillement à M. Macron de „travailler avec vous et avec les dirigeants de la société française pour élaborer un plan sérieux qui s’attaque aux racines de l’antisémitisme.“ Son excellence est trop bonne!

Ce hardi pourfendeur de la diplomatie française et européenne n’a pas, toutefois, poussé le courage jusqu’à déférer lui-même à cette convocation: il a préféré y envoyer son chargé de mission.