De quoi s’agit-il en fait? D’une des réformes dont le précédent ministre, Gabriel Attal, avait fait une sorte d’emblème de sa nouvelle gestion de ce département de l’action publique particulièrement sensible – il s’agit d’ailleurs du plus gros budget de la nation – et auquel il semblait tenir tout particulièrement: la création, au moins au niveau du collège, et plus précisément pour l’instant pour les premières classes, c’est-à-dire la 6ᵉ et la 5ᵉ, de „groupes de niveau“.
L’idée de base était de constituer au sein de chaque classe deux, voire trois sections destinées à recevoir, en fonction du niveau des élèves, un enseignement un peu différencié. Avec pour ambition d’éviter deux écueils: ce que l’on appelle souvent le „nivellement par le bas“, autrement dit ne plus bloquer au niveau le plus modeste ceux qui peuvent aller plus loin et plus vite; mais ne pas, non plus, „perdre“ ceux qui n’arrivent pas à suivre, et leur permettre, en leur portant une attention particulière, de recoller au cœur de leur classe.
Ce projet avait reçu un accueil fort différent dans l’opinion publique en général et parmi le corps enseignant en particulier. La première s’y était montré, durant le court passage de Gabriel Attal au ministère de l’Education nationale, très largement favorable, à en croire les sondages. Mais le second avait exprimé bien des réticences, voire des condamnations.
Selon les syndicats concernés, un tel système ne ferait que refléter les différences sociales entre les élèves, et stigmatiser ou marginaliser les plus faibles, en les décourageant de s’intégrer au courant général de leur classe respective. En outre, sa mise en œuvre représenterait un considérable surcroît de travail pour les professeurs.
Une erreur de casting?
Le débat méritait certainement d’être conduit en effet, et sans doute le précédent gouvernement avait-il voulu un peu vite le considérer comme réglé, au profit de la réforme présentée par Gabriel Attal. Ce dernier, nommé à Matignon pour remplacer Elisabeth Borne, avait assuré qu’il „emportait avec lui“ ce dossier si prenant de l’Education nationale, et fait nommer par Emmanuel Macron, pour le remplacer, la ministre des Sports, Amélie Ouéda-Castéra, très vite débordée, à l’évidence, par l’ampleur de la tâche, et renvoyée après quelques gaffes suicidaires à son ministère d’origine.
Puis fut nommée à l’Education nationale une revenante de la „Macronie de gauche“, Mme Nicole Belloubet, ex-ministre de la Justice. Personnalité estimée, mais notoirement hostile à cette création de „groupes de niveau“, qu’elle préféra tout de suite appeler „groupes de besoins“. Ce qui n’était pas mal trouvé: cette expression ne contredisait pas celle choisie par M. Attal, devenu premier ministre, tout en lui ôtant sa référence au moins supposée à une sorte de „tri social“.
Le problème allait vite devenir que la nouvelle ministre de l’Education nationale, d’abord très discrètement puis plus ouvertement, allait mener contre son prédécesseur une lutte d’influence dont elle semble aujourd’hui être sortie à peu près vainqueur. Les textes publiés dimanche et lundi sur le sujet, en effet, après cinq semaines de joutes verbales à fleurets plus ou moins mouchetés, ne font plus référence à des „groupes de niveau“, et le schéma ainsi dessiné par le projet de loi laisse planer un certain flou sur la suite des opérations à cet égard.
Ce qui fait dire aux partisans de Gabriel Attal qu’en promouvant Mme Belloubet, le président Macon a commis une nouvelle erreur de casting, laquelle aura achevé d’embrumer l’horizon de l’Education nationale à la française.
De Maart
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