Samstag27. Dezember 2025

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FranceLecornu forme son gouvernement, mais la crise politique reste entière

France / Lecornu forme son gouvernement, mais la crise politique reste entière
Lecornu a réussi à composer son équipe sous pression politique et un calendrier budgétaire serré Photo: AFP

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Maintenu à Matignon au terme d’une énième réunion de concertation, vendredi, avec les partis politiques (sauf le RN et LFI, qui veulent censurer tout nouveau gouvernement aussi longtemps que l’Assemblée n’aura pas été dissoute), mais cette fois-ci autour du président Macron, Sébastien Lecornu s’était attelé dès samedi matin à la tâche de constituer un nouveau gouvernement, ce à quoi il est parvenu dans la soirée d’hier.

La nouvelle équipe de 34 membres comporte quelques maintiens en fonction par rapport au ministère précédent, dont celui de Gérald Darmanin à la Justice et quelques changements de poste, comme celui de Catherine Vautrin, nommée aux Armées en venant du Travail (où elle est remplacée par l’ancien patron de la SNCF Jean-Pierre Farandou). Mais elle présente aussi une juxtaposition de „techniciens“ et de jeunes parlementaires, notamment venus des républicains – pied de nez vraisemblable à Bruno Retailleau, président de LR, qui avait refusé pour sa part d’en faire partie, et voulait que tout le monde au sein de sa formation en fasse autant.

Le chef de l’Etat qui, de son côté, s’envole très tôt ce lundi matin pour l’Egypte où il doit participer au sommet de Charm El-Cheikh sur la résolution de la crise proche-orientale, avait „laissé carte blanche“ à M. Lecornu pour mener à bien cette mission, laquelle était rendue encore plus ardue par l’urgence de la situation. Car, outre que la perspective d’une motion de censure n’avait pas été aussi clairement écartée qu’on voulait le croire plus tôt dans la journée de vendredi du côté de l’exécutif, il s’en faut même de beaucoup, l’opinion publique manifestait une exaspération et une incompréhension croissantes, que l’annonce de la composition d’une nouvelle équipe aura d’ailleurs sans doute un peu de mal à dissiper.

Et cela d’autant plus que de manœuvre en manœuvre, la perspective d’avoir un budget 2026 dans les délais prévus par la Constitution s’est éloignée, même avec un nouveau gouvernement finalement formé un peu plus vite que prévu. Et que ce retard dans l’adoption de la loi de finances pour l’année à venir, s’il se confirmait, aurait des conséquences douloureuses pour différentes catégories sociales, notamment les retraités, et professionnelles, en particulier le personnel enseignant et hospitalier. Cependant que les acteurs économiques de tous niveaux n’ont cessé, ces derniers jours, d’afficher leur inquiétude devant les conséquences de la vacance du pouvoir, et du discrédit croissant de la France politique que celle-ci entraînait.

Pour respecter strictement le calendrier, une série de rendez-vous doivent en effet être respectés. Il faudrait d’abord que le président de la République puisse, dès ce matin, nommer officiellement les membres du nouveau gouvernement Lecornu, sur proposition de celui-ci. Puis que ce gouvernement présente, aujourd’hui également, son projet de budget à l’Assemblée nationale, ainsi qu’au Haut-Conseil des Finances publiques, puis au Conseil d’Etat. Les passations de pouvoirs d’un ministre à l’autre auront lieu dans la matinée d’aujourd’hui, mais, a-t-on officiellement précisé, „sans cérémonie, sans presse, sans invités et sans discours“. Comme si l’exécutif en avait vaguement honte …

Budget: le butoir du 31 décembre

La suite du processus, parlementaire cette fois-ci, n’est pas moins contraignante. Et elle est beaucoup plus longue puisque, entre l’Assemblée nationale et le Sénat, le va-et-vient entre les deux chambres et la réunion d’une commission mixte paritaire compris, il faut généralement compter près de trois mois, ou peu s’en faut … Or, la date-butoir impérative pour l’adoption du projet de budget pour l’année suivante est fixée au 31 décembre. Faute de quoi une procédure spéciale permettrait tout de même d’alimenter la bourse de l’Etat mois par mois (ce fut déjà le cas au début de cette année), mais la chose est politiquement mal vue. Sans parler du fait que la „déclaration de politique générale“ de M. Lecornu est prévue pour … demain après-midi.

C’est dire combien l’ancien et nouveau premier ministre avait toutes raisons de vouloir faire au plus vite. Mais il avait clairement affirmé aussi „ne pas avoir l’intention de faire n’importe quoi“ pour rester en place: n’avait-il pas déjà dit, à peine renommé, qu’il „ne courait pas après le job“, et ne rester à Matignon que „par devoir“? Il va maintenant lui falloir convaincre l’opinion, qui était prête à blâmer une éventuelle lenteur dans la mise sur pied de cette nouvelle équipe, que la rapidité dont il a fait montre n’est pas due, justement, à un manque de discernement dans le choix de ses membres …

M. Lecornu avait annoncé hier qu’il comptait bien passer par-dessus les états-majors des partis pour solliciter différentes personnalités, susceptibles d’apporter à son équipe à la fois des compétences particulières, une nouvelle approche des problèmes, et une ouverture politique. De ce point de vue, il l’a bel et bien fait, surtout face aux LR. En outre, toujours dans ce double souci d’efficacité et de renouveau, il tenait à ne pas solliciter celles et ceux qui auraient des ambitions présidentielles pour 2027, considérant que la course à l’Elysée (bien anticipée en l’occurrence) fausserait les jugements et les comportements. „Je veux des ministres libres, pas des candidats“, a-t-il notamment déclaré sur le sujet. Sur ce terrain, le cas de Gérald Darmanin semble faire exception.

De toute façon, la façon de survivre à la motion de censure que l’extrême droite et l’extrême gauche ne manqueront pas de déposer dès l’ouverture de la session, ou au plus tard après le discours de M. Lecornu, reste à inventer. La gauche, dont la décision de voter cette motion pourrait bien être décisive, maintient en effet ses exigences budgétaires, auxquelles il faudra bien céder au moins partiellement si l’on veut lui arracher un peu de clémence, en tout cas de patience: suspension, ou mieux abrogation, de la réforme des retraites, adoption d’un système fiscal proche de la „taxe Zucman“, et quelques autres concernant notamment l’immigration et l’aide médicale d’Etat.