3. November 2025 - 15.35 Uhr
48ᵉ Festival du film italien de VilleruptLa vitalité du cinéma italien, entre mémoire et modernité: La première semaine
Sur la scène du centre culturel l’Arche, Rongione était entouré de Marion Guth, productrice et co-fondatrice de la société de production indépendante luxembourgeoise a_BAHN, du romancier Laurent Petitmangin et de l’actrice Muriel Combeau. Ont également été présentés les membres du jury de la critique, du jury des jeunes et des professionnels (exploitants et distributeurs). Le 7 novembre, ces jurys décerneront le trophée Amilcar au film qui les aura le plus marqués, accompagné des motivations de leur choix. Le prix du public reviendra, lui, à l‘œuvre ayant conquis le cœur des spectateurs, invités à voter après chaque séance. Sur les 66 films programmés, 15 sont ceux en compétition. Ils ont été soigneusement sélectionnés pour mettre à l’honneur la nouvelle et prolifique production italienne et ce sont des avant-premières ou des inédits non encore distribués en France ou au Luxembourg. La cérémonie de remise des prix se déroulera à l’Arche vendredi soir, mais le festival continuera jusqu’au 11 novembre, offrant ainsi la possibilité de voir les films primés et bien d’autres encore.

Contrairement aux années précédentes, où la première semaine est généralement ensoleillée, cette édition s’est ouverte sous la pluie et le froid. Une raison de plus pour se réfugier dans les salles obscures et le public ne s’y est pas trompé. Un dégât des eaux est toutefois venu chambouler quelque peu le planning des séances, car les films ou événements prévus dans la petite salle de cinéma de l’Arche ont dû être transférés dans la grande salle ou annulés. Grâce à la réactivité des équipes techniques et à la compréhension des spectateurs, le festival a pu garder tout son rythme.
Les films soumis à l’appréciation du jury montrent clairement toute la diversité thématique et stylistique du cinéma italien: „Ciao bambino“ d‘Edgardo Pistone, „Gioia mia“ de Margherita Spampinato, „Il Nibbio“ d’Alessandro Tonda, „La Gioia“ de Nicolangelo Gelormini, „La Vita da Grandi“ de Greta Scarano, „L’Albero“ de Sara Petraglia et „Une année italienne“ de Laura Samani. Certaines œuvres relèvent de l’imagination, d’autres sont des adaptations cinématographiques à partir de livres, dont l’histoire est particulière et souvent bouleversante.
C’est le cas de „La Vita da Grandi“, comédie dramatique inspirée du roman autobiographique „Mia sorella mi rompe le palle: Una storia di autismo normale“ (2020) de Damiano et Margherita Tercon („Ma sœur me casse les couilles: Une histoire d’autisme normale“). Par son premier long-métrage, Greta Scarano illustre une facette de l’autisme, qu’elle apprend à connaître non seulement à travers le roman, mais aussi par la performance de Yuri Tuci, le comédien autiste qui incarne Omar. On le découvre prisonnier d’une routine de vie étouffante, bloqué par une relation de dépendance avec sa mère, qui le surprotège jusqu’à l’infantiliser. Mais Omar rêve de devenir un chanteur fameux! Et c’est sa sœur Irene, interprétée par Matilda De Angelis, qui le soutient dans son parcours d’émancipation jusqu’à le voir sur la scène d’un talent show. „L’ironie et l’auto-analyse du jeune homme autiste m’ont impressionnée et m’ont beaucoup appris sur sa perception du monde“, confia la réalisatrice à Rai Cinema, précisant que le rôle de la sœur était essentiel: „En anglais, les frères et sœurs sont appelés siblings, mais en psychologie ce terme désigne les personnes qui ont un frère ou une sœur en situation d’handicap“. On les appelle aussi enfants de verre, car ils essayent d’être transparents, afin de ne pas déranger, laissant les parents se focaliser sur l’autre enfant.
C’est le livre autobiographique de Goliarda Sapienza „L’università di Rebibbia“ (1983) qui a inspiré Mario Martone à réaliser le long métrage „Fuori“, où Valeria Golino joue le rôle de l’écrivaine et intellectuelle sicilienne, considérée aujourd’hui comme une pionnière du féminisme littéraire européen. Née en 1924 dans une famille athée et antifasciste, Sapienza a su mener tout au long de sa vie un combat personnel contre l’autorité imposée, qu’elle soit politique, religieuse ou morale. Une de ses convictions, transmise par son père, était qu’on ne connaît vraiment bien son pays que lorsqu’on en connaît ses prisons et ses hôpitaux psychiatriques. „Rebibbia“ est une prison de Rome et Goliarda Sapienza y avait été incarcérée pour le vol de bijoux chez une amie. Elle a décrit son expérience dans ses livres. Avec „Fuori“, Martone a su porter à l’écran l’intensité des liens entre les détenues, qui continuent à exister même après la remise en liberté. En redonnant vie à des figures majeures de la culture et de la politique, ces films rappellent que la mémoire collective se nourrit aussi de cinéma. Ils offrent aux jeunes la possibilité de découvrir des faits marquants et des idéaux qui ont façonné l’histoire de l’Italie.

„Il Nibbio“ d’Alessandro Tonda est un film biographique poignant, inspiré aussi d’une histoire vraie, celle de Nicola Calipari, agent secret du SISMI (Servizio per le informazioni e la sicurezza militare), chargé des négociations pour libérer la journaliste Giuliana Sgrena du quotidien communiste „Il Manifesto“, retenue en otage à Bagdad durant la guerre en Irak en 2005. A travers les 28 jours précédant la libération, Tonda y retrace le destin d’un homme loyal et droit, profondément attaché à sa famille et à son devoir. Tonda met en lumière l’héroïsme discret de Calipari, appelé „Il Nibbio“ en langage codé, qui choisit instinctivement de protéger la journaliste lors de tirs américains, perdant ainsi sa vie. Ironie du sort: ils étaient arrivés tout près de l’aéroport et de l’avion, qui les aurait ramenés en Italie. Ce drame est encore enveloppé de zones d’ombre. Etait-ce une erreur ou une trahison? Le film ne tranche pas, mais la réalité non plus. Le mystère est resté. Le film fera le tour des lycées en Italie afin de réfléchir non seulement sur le sens du devoir, mais sur la complexité de la politique internationale et de la diplomatie.
„Berlinguer, la grande ambition“ (2024) est le documentaire d’Andrea Segre, qui revient sur la figure d’Enrico Berlinguer, secrétaire général du Parti communiste italien dans les années 1970 et 1980. En alternant images d’archives et témoignages contemporains, Segre interroge ce que l’héritage moral et politique de Berlinguer peut encore signifier aujourd’hui. Cette semaine, jeudi et vendredi, Andrea Segre sera dans les salles de Villerupt et rencontrera le public. Il présentera aussi „La petite Venise“, drame de 2011 lié au thème du festival et „L’ordre des choses“, qui lui avait valu l’Amilcar du jury de la critique en 2017. Cette année, il recevra l’Amilcar de la Ville de Villerupt.
Concerts, dégustations, soirées karaoké …
D’autres invités prestigieux sont attendus cette semaine. Ce soir, la jeune comédienne Tecla Insolia sera présente pour le film „L’Albero“ (avec la réalisatrice Sara Petraglia) et pour „Vivaldi et moi“, qui est une fiction historique, inspirée du roman „Stabat Mater“ de Tiziano Scarpa (2008). La scénariste Ludovica Rampoldi et le producteur Nicola Giuliano sont venus le présenter durant le weekend de la Toussaint. Rendez-vous jeudi et vendredi avec le comédien Pier Giorgio Bellocchio pour „Marx peut attendre“ et „Le traître“, samedi avec l’actrice Barbara Ronchi pour „Fais de beaux rêves“, „Familia“ et „Settembre“.
Mais le festival ne se limite pas seulement aux films. Il s’ouvre aussi sur un large éventail d’animations, qui prolongent l’expérience italienne au-delà des écrans et en font un rendez-vous culturel global. Entre spectacles, concerts, expositions de photos, ateliers, conférences, lectures, dégustations, soirées karaoké et de danse, le public est invité à s’évader de sa routine pendant 19 jours.
De Maart
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