Samstag18. Oktober 2025

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ForumJules Barthel sur la manipulation de l’antisémitisme

Forum / Jules Barthel sur la manipulation de l’antisémitisme
 Photo: archives Editpress/Fabrizio Pizzolante

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Après les terribles massacres perpétrés en Israël le 7 octobre 2023 par le Hamas, le monde entier assiste, depuis lors

– à la destruction massive, par l’armée israélienne, de la bande de Gaza et de sa population,

– à la déshumanisation d’une population privée délibérément de logements, d’hôpitaux, d’écoles, d’eau potable, de nourriture et autres biens et services de première nécessité,

– à la destruction des camps de réfugiés en Cisjordanie occupée et au déplacement forcé de dizaines de milliers de Palestiniens,

– à l’accroissement exponentiel de la violence de colons extrémistes envers la population palestinienne,

– …

Face à ces atrocités, les responsables politiques des Etats-Unis, de l’UE et de la grande majorité des pays arabes brillent par leur manque désespérant de courage, se cachant derrière le stratagème qui présente la moindre mesure, voire une simple critique, comme un inacceptable manque de neutralité.

Confrontée au manque d’initiatives et de courage de nos dirigeants quand il s’agit de faire respecter le droit international à leur allié israélien, c’est la société civile qui a pris le relais du combat pour le respect des droits humains dans la région.

Une accusation d’antisémitisme injustifiée

Or, cette société civile, mue par des principes d’égalité et de solidarité et par son empathie avec une population palestinienne livrée à la vindicte sans fin du gouvernement israélien, se voit injustement accusée d’antisémitisme. Elle ne fait pourtant que soutenir un peuple en détresse, soumis quotidiennement, dans le déni du droit international, à la maltraitance par une force occupante dirigée par un Premier ministre soumis à un mandat d’arrêt international pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité.

La lutte contre l’antisémitisme, tout comme la lutte contre le racisme ou l’islamophobie, est d’une importance cruciale dans nos sociétés gangrenées par les idéologies d’extrême droite qui prolifèrent partout en Europe et ailleurs. Il s’avère toutefois que la multiplication des accusations d’antisémitisme, très souvent non fondées, est contre-productive. Toute dénonciation infondée d’un discours antisémite affaiblit la lutte contre ce dernier. A voir de l’antisémitisme partout, on ne fait que le jeu de ceux qui prétendent qu’il n’y en a nulle part.

Selon Thomas Hochmann, professeur de droit public à l’Université de Paris-Nanterre, „les accusations d’antisémitisme contre toute critique des actes du gouvernement israélien sont du pain béni pour les antisémites. Ils auront beau jeu d’écarter cette fausse accusation, mais aussi de la mettre en avant pour suggérer que le reproche d’antisémitisme n’est jamais fondé“.

Soyons clairs. Appeler à la destruction violente d’Israël, à l’expulsion ou au meurtre de ses habitants juifs, tenir les Juifs collectivement responsables des actions de l’Etat d’Israël ou dénoncer un lobby sioniste mondial qui veillerait aux intérêts de cet Etat relève du discours de haine anti-juif et doit être sévèrement réprimandé, comme tout autre acte ou discours de haine.

Critiquer Israël n’est pas haïr les Juifs

Cependant, critiquer la politique menée par le gouvernement israélien, même de manière vigoureuse ou outrancière, n’est pas assimilable par principe à un discours de haine contre les Juifs. De même, parler aujourd’hui de colonisation, de colons extrémistes, d’apartheid, d’épuration ethnique ou de génocide, ne traduit pas forcément une attaque antisémite, à moins que ces comportements ne soient ramenés au judaïsme, en affirmant par exemple que ces actes sont „typiques des Juifs“.

Un des problèmes majeurs concernant la lutte contre l’antisémitisme constitue sa définition même. La référence en la matière, aujourd’hui, est la définition adoptée par la International Holocaust Remembrance Alliance (IHRA) en 2016 qui explique que „l’antisémitisme est une certaine perception des Juifs qui peut se manifester par une haine à leur égard. Les manifestations rhétoriques et physiques de l’antisémitisme visent des individus juifs ou non et/ou leurs biens, des institutions communautaires et des lieux de culte“. Cette définition, particulièrement vague, est accompagnée d’exemples qui sont censés illustrer l’antisémitisme.

Ainsi, même si le texte indique clairement que „critiquer Israël comme on critiquerait tout autre Etat ne peut être considéré comme de l’antisémitisme“, il spécifie en même temps que „l’antisémitisme peut se manifester par des attaques à l’encontre de l’Etat d’Israël lorsqu’il est perçu comme une collectivité juive“. Qui, dans ce cas, a l’autorité et les compétences nécessaires pour conclure que l’Etat d’Israël est „perçu“ comme une collectivité juive? Par la même, une loi fondamentale israélienne, loi ayant valeur constitutionnelle, définit aujourd’hui l’Etat d’Israël comme étant „le foyer national du peuple juif“. Comme, par ailleurs, „Jérusalem, entière et unifiée“, a été déclarée officiellement capitale d’Israël et que „le développement de la colonisation juive est considéré comme une valeur nationale dont l’Etat s’efforce à encourager et à promouvoir l’établissement et la consolidation“, que reste-t-il, dans ces conditions, du droit à critiquer l’Etat d’Israël, toute critique pouvant être considérée comme une remise en question d’une collectivité juive en tant que juive et être inévitablement considérée comme antisémite. Voilà comment Israël, aujourd’hui, est parvenu à s’immuniser contre toute critique, stigmatisant, à tort et à travers, toute objection comme antisémite.

Un autre exemple donné par l’IHRA concerne „l’établissement de comparaisons entre la politique israélienne contemporaine et celle des Nazis“, exemple par ailleurs cité régulièrement dans les rapports de RIAL, l’asbl luxembourgeoise de recherche et d’information sur l’antisémitisme au Luxembourg.

Comparer la politique israélienne à celle des nazis semble, en effet, paraître outrancier. Néanmoins, on ne saurait percevoir systématiquement, dans de tels propos, un appel à la haine des Juifs. Pour exemple, Edgar Morin, sociologue et philosophe français, a co-signé, il y a vingt ans de cela, une tribune publiée dans Le Monde où il écrivait: „C’est la conscience d’avoir été victime qui permet à Israël de devenir oppresseur du peuple palestinien. Le mot ,Shoah‘, qui singularise le destin victimaire juif et banalise tous les autres, devient la légitimation d’un colonialisme, d’un apartheid et d’une ghettoïsation pour les Palestiniens … Les Juifs d’Israël, descendants des victimes d’un apartheid nommé ghetto, ghettoïsent les Palestiniens. Les Juifs qui furent humiliés, méprisés, persécutés, humilient, méprisent, persécutent les Palestiniens. Les Juifs qui furent victimes d’un ordre impitoyable imposent leur ordre impitoyable aux Palestiniens. Les Juifs victimes de l’inhumanité montrent une terrible inhumanité.“ Condamné en première instance, la Cour de cassation annula la condamnation en interprétant le texte „non comme une accusation dirigée contre un groupe de population, mais comme une critique virulente de la politique menée par le gouvernement israélien à l’égard des Palestiniens“. En conclusion, le parallèle dressé, à des fins volontairement provocantes, entre la politique du gouvernement israélien et le nazisme peut choquer. Mais on ne saurait lui associer par principe une diffamation ou une incitation à la haine contre les Juifs.

Un besoin urgent d’une définition claire

Afin d’éviter l’abus de condamnations pour propos et comportements antisémites, il faudrait recourir à une définition de l’antisémitisme qui puisse être utilisée sans bâillonner l’esprit critique. Une telle définition a été présentée, en 2021, par des universitaires d’Europe, des Etats-Unis, du Canada et d’Israël, proposant la définition suivante: „L’antisémitisme est une discrimination, un préjugé, une hostilité ou une violence à l’encontre de Juives et de Juifs en tant que Juives et Juifs ou à l’encontre d’institutions juives en tant que juives“.

L’avantage de cette définition se situe dans sa clarté: il n’y a antisémitisme que si des personnes sont visées „en tant que juives“. Cette mise en évidence est capitale, car elle permet de distinguer ce que l’Etat d’Israël cherche obstinément à amalgamer, à savoir ce qui relève d’un antisémitisme avéré et ce qui est de la nature d’une critique de l’Etat d’Israël.

Un autre exemple d’antisémitisme proposé par l’IHRA parle du „traitement inégalitaire de l’Etat d’Israël, à qui l’on demande d’adopter des comportements qui ne sont ni attendus ni exigés de tout autre Etat démocratique“.

Cet exemple peut difficilement tenir la route. Qu’est-ce que la société civile et les militants des droits humains demandent à Israël, si ce n’est que le pays adopte le comportement d’un Etat démocratique, en respectant le droit international, les décisions des institutions internationales et les droits humains? Cela fait-il d’eux des antisémites?

Martine Kleinberg, présidente de l’association „Jewish call for Peace“, l’a bien résumé lors du débat à la Chambre des députés sur la pétition publique concernant l’imposition de sanctions à Israël pour ses agissements en Palestine: „Aujourd’hui, Israël commet de graves crimes en toute impunité, tout en prétendant agir comme Etat juif, au nom des Juifs. Ce faisant, il met les Juifs en danger partout dans le monde. Son mépris total du droit met également en danger nos démocraties. Si nous tolérons qu’un peuple soit bombardé, affamé, déplacé par un pays allié, cela revient à dire que nos valeurs sont à géométrie variable.“

Lors de ce même débat, Dalia Khader, Luxembourgeoise d’origine palestinienne, a bien résumé le sentiment prédominant des militants des droits humains: „On ne peut pas transformer des villes en cimetières et se dire victime. C’est du terrorisme. On ne peut pas construire des murs et des checkpoints et appeler cela de la démocratie. C’est un apartheid. On ne peut pas affamer les gens et parler de légitime défense. C’est un nettoyage ethnique.“

Ce sont là des faits et cela n’a définitivement rien à voir avec de l’antisémitisme!

* Jules Barthel est co-président du Comité pour une paix juste au Proche-Orient (CPJPO)

Luxmann
30. Juli 2025 - 10.06

Il faudrait rappeler que le terme "peuples semites" concerne a la fois juifs,arabes et assyriens
Une attitude critique voire franchement hostile envers l Etat Israel ou son gouvernement ne saurait donc etre assimilee simplement a de l antisemitisme.