L’énumération ci-dessus de substantifs potentiels pour désigner ce qui s’est passé ou ce qui est en train de se passer auprès de Critas est loin d’être complète. Peut-être que vous pouvez la compléter? Peut-être que vous constaterez que les mêmes substantifs s’appliquent au bon vieux CSV d’aujourd’hui, qui, de retour aux affaires, nous confirme tous les jours que l’Etat-CSV, cette façon tentaculaire d’exercer le pouvoir, fait des siennes de nouveau. Pour la petite histoire, on parle de tentacules quand quelque chose ou quelqu’un s’étend d’une manière insidieuse et irrésistible, ou qu’elle (ou qu’il) se développe dans toutes les directions. Les plus âgés se souviennent que pendant des décennies, la conduite du pays par ce parti se distinguait par le fait que, notamment, de nombreux postes dans les diverses institutions étatiques, administratives ou autres, furent occupés et dirigés par des membres ou des proches de ce parti.
Aujourd’hui ce parti occupe de nouveau tous les postes politiques d’envergure au sein de l’Etat, alors que les résultats électoraux récents ne justifient aucunement un tel Grand Chelem (au tennis le fait de remporter, la même année, les quatre tournois majeurs de cette discipline): premier ministre (loin d’être plébiscité lors des dernières élections, quasi un pis-aller, contrairement à l’époque du Sage de Capellen), président de la Chambre, président du Conseil d’Etat, commissaire à Bruxelles. Son partenaire de coalition doit se contenter des miettes, de toute façon il y est seulement pour faire bella figura, pour être sur la photo. Pour être, mais pas pour faire.
Pourquoi d’ailleurs se mettre ensemble avec les socialistes ou les Verts, des emmerdeurs de première, alors que le DP se plaît à avaler toutes les couleuvres qu’on lui met sous le nez?
En fait tout ça, c’est du réchauffé, auquel, hélas, on s’est déjà accoutumé. L’être humain semble ainsi fait, il oublie vite et sait se repositionner rapidement.
Mais pour bien comprendre le scandale de Caritas, il faut garder tout ça dans l’arrière-tête, ceci expliquant cela. Il faut garder en tête, également, que l’ancien bloc de pouvoir politique en question comprenait, outre une présence surdimensionnée au niveau politique, l’Archevêché pour les vrais croyants, le Luxemburger Wort pour dominer la presse, et la Caritas pour son bras séculaire, son agenda social.
Ici et maintenant, c’est surtout ce dernier aspect qui attire notre attention, car en regardant de près, notamment le Conseil d’administration de Caritas (et maintenant son successeur HUT), on a l’impression de prendre connaissance du Bureau politique ou du Comité central du CSV avec quelques figurants ou figuristes du DP, des miettes quoi.
Voilà pour le décor.
Petit Léon au secours de Petit Luc
Le véritable détonateur de ce papier réside dans le fait que, l’autre jour, le ministre de l’Intérieur, Petit Léon, sur RTL, a dressé un bouquet de louanges au premier ministre, Petit Luc, pour sa bonne gestion de crise (sic) dans le contexte Caritas. Ce fut certainement la blague politique de l’année. En fait, le premier s’est adonné à une pratique très répandue dans les cercles politiques, le lèche-majesté. Avec un retour d’ascenseur garanti: bientôt vous allez entendre le premier ministre féliciter son ministre de l’Intérieur pour sa bonne gestion des affaires. Et cetera.
La réalité, hélas, est tout autre. La gestion de crise du gouvernement, n’en déplaise, a été catastrophique, le premier ministre l’a lui-même avoué récemment. Et, oh quel hasard, quasi tous les protagonistes de l’affaire sont de près ou de loin, à quelques rares exceptions près, mandataires, sympathisants ou membres influents du CSV ou de la mouvance catho du Luxembourg.
Le tentacule Caritas
La cerise sur le gâteau réside dans le fait qu’un grand cabinet de conseil, un des Big Four de la place, s’occupe de tout, et du reste
Faisons le compte, si vous voulez. Il y a d’abord le poste de présidente du CA de Caritas, choisie par le cardinal himself, une ancienne ministre du CSV, une personne de bien, au-dessus de tout soupçon, mais complètement dépassée par les événements. Elle aurait mérité mieux. Elle a été humiliée publiquement par Petit Luc, son ancien collègue de gouvernement. Elle reste une des seules éclaircies dans les ténèbres ambiantes. Puis il y a le chef de cabinet de la ministre de la Justice, omniprésent, puis une conseillère communale de la Ville de Luxembourg, également conseillère de gouvernement, il y a l’ancien gestionnaire des Biens et autres du Grand-Duc, le matador de l’ensemble, celui qui, à un titre ou à un autre, tire toutes les ficelles (de quel droit?). Dans les couloirs de Caritas et ailleurs, on l’appelle „Monsieur multi-casquettes“. Puis il y a les camarades du premier ministre, du secteur financier ou des assurances. Que du beau monde. La liste n’est pas exhaustive, on dirait une vraie association de bienfaiteurs, si vous voyez ce que je veux dire …
La cerise sur le gâteau réside dans le fait qu’un grand cabinet de conseil, un des Big Four de la place, s’occupe de tout, et du reste. Par hasard, on y retrouve le matador, déjà rencontré ailleurs. Au nom du premier ministre, il enquête, il analyse, il propose, il impose, il décide à la place de tout le monde. Et pas seulement dans le dossier sous rubrique. Sa feuille de route est une énigme, aucune transparence, aucune communication, un vrai travailleur de l’ombre, pour tenir éloigné le plus possible curieux, presse, députés de l’opposition ou autres.
Et puis, au niveau des banques impliquées, la première qui appartient à 100 pour cent à l’Etat, dirigée par une ancienne conseillère d’Etat du CSV, et une autre banque qui appartient à hauteur de 34 pour cent à l’Etat luxembourgeois, depuis la crise financière de 2008, où elle a été renflouée par le gouvernement luxembourgeois, avec l’argent des contribuables, sous la baguette du ministre des Finances de l’époque, petit Luc en personne, assisté par un sous-fifre socialiste.
Les isolations phoniques des murs de la banque
C’est d’ailleurs au sein de cette banque que, oh quel hasard, l’épouse du premier ministre, occupe un poste important, celui de responsable du service juridique où, d’après une interview récente, elle dirige une équipe de 12 juristes.
Il paraît que les murs entre les divers services de cette banque sont d’une redoutable efficacité en termes d’isolation phonique, ou peut-être que, dans cet établissement, la main gauche ignore ce que fait la main droite. Toujours est-il que le service juridique n’était pas au courant, mais absolument pas du tout, je vous jure (sic), des travers des comptes de Caritas au sein de cet établissement financier. Donc l’épouse était dans l’impossibilité absolue d’alarmer son Petit Luc (si, si). C’est vrai que sous la couette, on ne parle jamais finances …
Toujours est-il que le rôle des banques, dans ce dossier comme dans d’autres, mérite d’être regardé à la loupe. Manifestement les surveillances pour contrôler les petits clients lambda marchent à fond, jamais les particuliers n’ont été autant emmerdés pour gérer leurs petites épargnes.
La question que tout être humain, tant soit peu normalement constitué, peut se poser est la suivante: depuis quand Petit Luc était-il au courant? Ou a-t-il dû se contenter des révélations dans la presse, comme vous et moi? On ne saura probablement jamais.
Toujours est-il que le rôle des banques, dans ce dossier comme dans d’autres, mérite d’être regardé à la loupe. Manifestement les surveillances pour contrôler les petits clients lambda marchent à fond, jamais les particuliers n’ont été autant emmerdés pour gérer leurs petites épargnes, surtout quand il s’agit de vérifier l’origine exacte des fonds, ne serait-ce que lorsqu’il s’agit de vouloir régler une menue dépense, comme l’achat d’une nouvelle voiture, par exemple.

Dans la causa Caritas, au contraire, des millions ont été transférés à l’étranger, sans que personne, même pas le service juridique d’une banque concernée, n’y trouve rien à redire. Surprenant! Etrange!
Et ce à un moment où, pour éviter de tels débordements, des surveillances doivent exister et être vérifiées au niveau du gouvernement, comme l’a encore précisé un ancien diplomate luxembourgeois, dernièrement, dans ces colonnes. Et la même personne de continuer: „Les garde-fous (des banques) existent peut-être sur papier, mais apparemment l’édifice n’a fonctionné à aucun niveau. Spuerkeess et BGL ont fait preuve d’un manque flagrant de bonne diligence, laissant des millions s’évaporer sans sonner l’alerte. Cela en dit long sur les mesures anti-blanchiments telles qu’elles sont pratiquées par deux piliers modèles de la place financière. Ces deux banques pourraient sans doute apprendre de BBVA (la banque espagnole qui a reçu les virements du Luxembourg) qui a lancé une alerte de suspicion et a sauvé, paraît-il, une petite partie du magot détourné. Attendons-nous à voir les crampes intestinales du système quand la CCSF (la commission de surveillance des professionnels et des produits du secteur financier luxembourgeois), et la CRF (cellule de renseignement financier qui a pour mission de recevoir et d’analyser les déclarations d’opérations suspectes et les autres informations concernant des faits suspects susceptibles de relever du blanchiment, des infractions sous-jacentes associées ou du financement du terrorisme), auront à sanctionner ces deux banques, propriétés à 100 et 34 pour cent respectivement de l’Etat luxembourgeois. Le détail des sanctions, si sanction il y a, est à suivre de près. Chiche que ce sera bien indulgent!“
Sages paroles prémonitoires …
Mais il y a mieux
Fermons ce chapitre sur les banques et penchons-nous sur d’autres aspects de cette affaire qui est un vrai scandale et qui met à nu certaines pratiques et certains dysfonctionnements incroyables.
On a déjà évoqué le manque d’urgence, de la part du premier ministre, à informer l’opinion publique alors qu’à l’occasion d’une telle affaire, informer le public et communiquer un maximum est le b.a.-ba de toute gestion de crise, surtout au niveau politique.
Regardons d’autres personnes, concernées directement ou indirectement.
Le cas d’un député, échevin de la Ville de Luxembourg, et employé de Caritas, bénéficiant en surplus d’un congé politique, est intéressant à plusieurs titres. Muni de ses trois revenus, cet énergumène, l’archétype du politicien hypocrite, gélatineux, plus jésuite que les jésuites, a cru bon de faire bande à part. Il abandonne le combat en rase campagne et se retire sur ses lauriers dorés.
Ne parlons même pas de la personne qui est à l’origine de l’affaire, l’ancienne responsable du service financier de la Caritas. Elle coule des jours tranquilles, apparemment avec un bracelet électronique dont les conditions à remplir exigent pour le moins d’avoir un domicile fixe au Luxembourg.
Côté politique, on a encore l’inCONtournable ministre du Travail. Depuis le début de l’affaire, qui est également un conflit de travail de la plus haute importance, on ne l’a pas vu ni entendu. Un avis de recherche a été lancé, semble-t-il. Se serait-il perdu à Paris, où il a passé tout l’été pour assister aux JO, laissant se reposer (pour l’éternité?) le dossier Caritas et l’éventualité d’une reprise d’entreprise, prévue par le Code du travail? Le mutisme du ministre responsable en dit long. Il faut peut-être lui rappeler qu’à côté du département des sports, il détient également celui du travail.
Petite lueur: le comportement et le positionnement du président du groupe parlementaire du CSV, refusant de hurler avec les loups de son propre camp. Félicitations!
Que penser de l’ancien directeur de la Caritas qui ne s’est pas manifesté publiquement depuis le début de l’affaire. Incroyable! Du jamais vu! Ou est-ce que le premier ministre, dans son souci de tout verrouiller, lui a imposé le silence?
Est-ce que ce Monsieur est bien rentré de son pèlerinage printanier à St-Jacques de Compostelle, qui a dû lui coûter le total de plusieurs années de congés payés? C’est plutôt rare qu’un directeur d’une telle boîte s’absente des semaines comme ça, se retrouve seul sur les routes, en pleine nature, avalant des milliers de kilomètres à pied, en train de prier, sans téléphone portable, sans laisser d’adresse! Certes, il avait rendez-vous avec St-Jacques, mais à la maison, la maison brûlait. Est-ce qu’il a au moins fait un petit crochet pour aller visiter, en Espagne, la banque espagnole qui a reçu la majeure partie des fonds en provenance du Luxembourg. Qui nous dira?
Ne parlons même pas de la personne qui est à l’origine de l’affaire, l’ancienne responsable du service financier de la Caritas. Elle coule des jours tranquilles, apparemment avec un bracelet électronique dont les conditions à remplir exigent pour le moins d’avoir un domicile fixe au Luxembourg. Est-ce le cas, je n’en suis pas sûr. Toujours est-il que les mendiants arrêtés par Petit Léon, ou petits criminels, notamment, bénéficient rarement d’un tel traitement, qu’on peut appeler de faveur. Mais n’oubliez pas que la présomption d’innocence prévaut pour tous!
Le rôle du cardinal
Le signal envoyé par le cardinal du Luxembourg est sans ambages. L’Eglise de Luxembourg, ou rien que le cardinal (?), a décidé de se retirer complètement, étape par étape, des structures sociales, presse comprise, fondées pour partie au XXe siècle. La liste est longue.
Dernièrement, le Lëtzebuerger Land a écrit à ce sujet. „La logique économique de l’archevêché est implacable. Sur le site de l’actuel Centre Convict, l’Eglise projette de construire des appartements, des bureaux et un hôtel quatre étoiles. (…) Ce projet immobilier – déjà très peu social en soi – ne prévoit pas de place pour l’actuel Internat du Convict (mieux connu sous le nom de ,Boulette‘).“
Il paraît que l’Eglise s’oriente toujours plus vers une grosse agence immobilière, un agent et grand propriétaire actif sur le marché immobilier, sous la houlette d’une holding, Lafayette, qui pesait 126 millions d’euros en 2023, dont 119 millions d’actifs immobilisés. Il y a de quoi faire, il n’y a pas de capitalistes honteux!
Avez-vous compris maintenant pourquoi l’Eglise de Luxembourg s’est détournée honteusement de ses responsabilités au niveau de l’affaire Caritas, qui s’apparente de plus en plus à un vrai scandale, dont le CSV est à la co-manœuvre?
Après le sacrifice du Luxemburger Wort dont il a préparé, en catimini, et en tant qu’ex-président du CA, la vente aux Flamands de Mediahuis en 2020, voilà que le premier ministre préside à la disparition de Caritas, pour la remplacer par une „association de bienfaiteurs“ qui lui sont proches. Chapeau l’artiste! (HUT ab!) Palerme nous salue!
Joli travail, ou, comme dirait Petit Léon, bonne gestion de crise …
Pour une fois, un vrai travail de CEO!
A wann s de net gees!

De Maart
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