Le débat avait été relativement long pour une cause qui semblait entendue, et assez tendu par moment. Quant au chef de l’Etat, il devrait, dit-on, annoncer assez vite le nom de la personnalité qu’il souhaite maintenant nommer à Matignon.
Devant les députés, François Bayrou a commencé par réaffirmer, comme il l’avait déjà fait maintes fois cet été, que „le pronostic vital du pays est engagé en raison de son surendettement“. Ajoutant: „Nous dépensons, mais nous ne revenons jamais en arrière. C’est devenu un réflexe, pire encore: une addiction (…). Nous avons pris l’habitude de financer nos dépenses à crédit, ce qui a conduit le pays à une écrasante accumulation de 3.415 milliards d’euros de dette. (…). Il faut agir sans retard. Ce n’est pas hors d’atteinte, cela demande seulement la mobilisation de tous et un effort modéré de chacun si l’on s’y prend à temps.“
Et le premier ministre de défendre une dernière fois son fameux plan, si controversé, mais grâce auquel, selon lui, „dans quatre ans l’endettement de la France n’augmenterait plus“. Non sans critiquer au passage les discours selon lesquels „il faut faire payer les riches“, devenus, tel Bernard Arnault, „les cibles emblématiques d’une pensée magique, comme ces poupées vaudoues dans lesquelles on plante des aiguilles pour les atteindre, j’imagine, au portefeuille“.
Mesdames et messieurs les députés, vous avez le pouvoir de renverser le gouvernement, mais vous n’avez pas le pouvoir d’effacer le réel, lequel demeurera inexorable! Un pays qui n’est pas capable d’équilibrer ses finances publiques est un pays qui s’abandonne (…)
Terminant son discours d’environ 45 minutes sur des considérations plus générales et un ton plus emphatique, M. Bayrou s’est écrié: „Mesdames et messieurs les députés, vous avez le pouvoir de renverser le gouvernement, mais vous n’avez pas le pouvoir d’effacer le réel, lequel demeurera inexorable! Un pays qui n’est pas capable d’équilibrer ses finances publiques est un pays qui s’abandonne (…). C’est précisément la question qui vous est posée aujourd’hui dans une démarche inédite, visant à mettre tous les parlementaires face à leurs responsabilités propres, même s’il est plus commode d’ignorer cette évidence.“
Boris Vallaud (PS): „Macron premier responsable“
Le premier ministre a été ovationné par les élus appartenant au „bloc central“, mais aussi, tout au long de son intervention, sans cesse interrompu, voire hué, par les députés de gauche, tout particulièrement ceux de „La France Insoumise“, dont le chef de file, Jean-Luc Mélenchon – qui n’est pas, lui, membre de l’Assemblée – suivait attentivement la séance. Les orateurs suivants, autrement dit les présidents de groupe, allaient d’ailleurs subir de la part de leurs adversaires respectifs le même traitement bruyant, dans un hémicycle moins garni puisque des députés l’avaient quitté après l’intervention de M. Bayrou.
C’est Boris Vallaud, président du groupe socialiste, qui allait ouvrir cette seconde partie de la séance sur le ton particulièrement offensif dont il est coutumier. Et cela en mettant d’abord en cause Emmanuel Macron: „Il n’est qu’un responsable à la crise, à la débâcle, aux désordres de notre pays, c’est le président de la République et avec lui ses épigones aveugles. Il n’a cessé d’abîmer le pays, d’appauvrir les pauvres, d’enrichir les riches, de tourner le dos à l’avenir.“
Mais M. Vallaud n’allait pas oublier François Bayrou dans la distribution: votre politique et celle de votre gouvernement, lui a-t-il dit, „c’est l’écrasement d’une croissance parmi les plus faibles d’Europe, c’est la restriction d’un pouvoir d’achat déjà atone, c’est l’augmentation promise du chômage, c’est l’abandon de l’impératif écologique, c’est l’étranglement des services publics, c’est ajouter de la crise à la crise“.
Marine Le Pen pour la dissolution
Devait lui succéder son homologue des Républicains, Laurent Wauquiez, qui, après quelques paroles plutôt bienveillantes à l’égard de M. Bayrou et une attaque virulente contre M. Mélenchon, passa à la critique du premier ministre et confirma que „ses“ députés auraient la liberté de lui accorder ou refuser leur confiance, lui-même se rangeant „sans enthousiasme“ dans la première catégorie.
On aura ensuite entendu la représentante des Verts énumérer les griefs de son parti contre l’action gouvernementale en général et la personne de François Bayrou en particulier. Puis encore d’autres présidents de groupes au verdict prévisible en fonction de leur appartenance à la „majorité“ relative ou à l’une ou l’autre des oppositions. Dans l’ordre des petites phrases, on peut citer Stéphane Peu, président du groupe Gauche démocrate et républicaine, déclarant à M. Bayrou: „Tel le soldat Ryan, il vous faut sauver le président Macron. Vous serez donc ainsi le quatrième en trois ans à tomber pour épargner le principal responsable de nos malheurs.“
Le discours de Marine Le Pen était également attendu. La présidente groupe RN n’aura cependant pas apporté de surprise, se contentant d’accabler le premier ministre: „Vous ne pouvez pas pleurer devant les caméras les conséquences des méfaits que vous avez vous-même commis“, lui a-t-elle lancé, ajoutant: „Curieux procédé de brandir les dettes dont on est comptable, les déficits dont on est responsable, l’effondrement général dont on est coupable pour chercher à obtenir la confiance du Parlement.“ Elle a par ailleurs appelé le président Macron à dissoudre l’Assemblée nationale „pour éviter l’enlisement institutionnel du pays“, estimant que „ce n’est pas une option, c’est une obligation!“ Et dans ce cas, „si le peuple nous fait l’honneur d’une majorité absolue, nous irons à Matignon pour mettre en œuvre un programme de redressement national“, a-t-elle conclu.
Des remerciements crépusculaires
Quant à Mathilde Panot, s’exprimant au nom de La France Insoumise (laquelle doit en outre déposer au Parlement une demande de destitution du président Macron, évidemment sans aucune chance de succès et pour la deuxième fois), elle n’a pas craint de lancer au premier ministre: „Pour vous, le futur n’existe pas, car vous sentez bien que vous appartenez au passé. Impopulaire, minoritaire, détesté, le macronisme ne gouverne plus que par la peur (sic).“
François Bayrou devait reprendre une dernière fois la parole, sans remonter à la tribune, pour souligner qu’il s’était interdit, lui, au cours de son intervention, d’injurier quiconque, et espérer un certain apaisement des débats politiques, et notamment parlementaires. Il a, enfin, remercié son gouvernement pour le travail accompli, avec un sourire qui n’empêchait pas ce petit compliment collectif d’être assez crépusculaire, ce que devait largement justifier le score final sans appel. M. Bayrou devait ensuite recevoir ses ministres pour un dernier dîner amical à Matignon.
Peut-être cet admirateur de Pierre Mendès France, qu’il avait cité dans son discours, aura-t-il eu la tentation de leur citer, lui qui reste résolument impénitent dans son analyse politico-financière, le commentaire de ce dernier lorsqu’il avait été battu à l’Assemblée en 1955 par une coalition d’adversaires: „Les hommes politiques passent, les réalités nationales demeurent …“
		    		
                    De Maart
                
                              
                          
                          
                          
                          
                          
                          
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