FranceBorne dénonce les racines pétainistes du RN, Macron la recadre

France / Borne dénonce les racines pétainistes du RN, Macron la recadre
„Il ne faut pas banaliser les idées du RN, ce sont toujours les mêmes“, a dit Elisabeth Borne ce week-end Photo: AFP/Ludovic Marin

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Elisabeth Borne a-t-elle commis une maladresse – indépendamment de ce que l’on peut en penser sur le fond – en déclarant, ce week-end à la radio, que le Rassemblement national de Marine Le Pen était l’héritier du régime collaborationniste de Pétain durant l’occupation allemande? Les réactions, en tout cas, ne se sont pas fait attendre; y compris à l’Elysée, en plein conseil des ministres.

„Il ne faut pas banaliser les idées du RN, ce sont toujours les mêmes. Maintenant, il y met les formes, mais je ne crois pas du tout à sa prétendue ’normalisation’. Je continue de penser que c’est une idéologie dangereuse, héritière de Pétain“, avait affirmé la première ministre. Des propos qui devaient, sans surprise, susciter un tollé à l’extrême droite. Mme Le Pen a dénoncé sur Twitter „des propos infâmes et indignes, qui sont inacceptables à l’égard du premier parti d’opposition, de ses 88 députés, de ses milliers d’élus locaux et des millions de Français qu’il représente.“

Jordan Bardella, qui lui a succédé à la présidence du RN, a lui aussi fustigé les propos de Mme Borne, les qualifiant de „graves et injurieux“, tendant à „salir les 42 pour cent de Français qui ont voté pour le RN lors de la dernière élection présidentielle: quand on est première ministre de la République, on ne se comporte pas comme un chef de gang“. Ce qui montre, a-t-il ajouté, combien „ce gouvernement est prêt à toutes les indécences pour faire oublier son bilan – mais personne ne sera dupe.“

Même son de cloche chez le député RN Sébastien Chenu, qui a accusé la première ministre de s’être montrée, dans cette affaire, „à la fois inculte, indigne et incapable“. Jusque-là, on était donc dans le registre prévisible et bruyant de l’indignation affichée, pour ne pas dire surjouée, par les cadres du Rassemblement national. Mais c’est de l’Elysée qu’est venue, avec les précautions de langage de rigueur, une autre appréciation, fort restrictive quant à l’opportunité, sinon au bien-fondé, des propos de Mme Borne.

Réactions en chaîne

Le président Macron, durant le conseil des ministres qui avait exceptionnellement été avancé à mardi en raison des déplacements du chef de l’Etat à l’étranger hier et aujourd’hui, a estimé devoir préciser qu’il fallait „décrédibiliser le RN en attaquant sur le fond de sa doctrine et sur ses incohérences, et non sur la forme.“ Avant d’ajouter: „Le combat contre l’extrême droite ne passe plus par des arguments moraux“. Et le chef de l’Etat est même allé jusqu’à ranger les propos de sa première ministre au rang des „mots des années 1990 qui ne fonctionnent plus“.

Ce recadrage présidentiel devait lui-même susciter aussitôt de nombreuses réactions en chaîne dans le reste de l’opposition. Chez les Républicains, le président du groupe LR, Olivier Marleix, a ainsi dénoncé le „cynisme“ d’Emmanuel Macron, rappelant qu’il avait été „élu et réélu“ en appelant à „faire barrage à l’extrême droite“. „Sans cette diabolisation, il ne serait pas président de la République“, a-t-il insisté. De son côté, le président LR des Hauts-de-France, Xavier Bertrand, a rappelé qu’il ne fallait surtout pas „oublier les origines xénophobes“ de la doctrine lepéniste. Et à l’extrême gauche, le président mélenchoniste de la commission des Finances, Eric Coquerel, a estimé que cette déclaration élyséenne traduisait „la banalisation des idées du RN“.

Le malaise est rapidement devenu suffisant pour qu’avant de s’envoler vers ses obligations internationales, le président de la République se soit senti tenu d’assurer que la première ministre gardait toute sa confiance. Peut-être; mais décidément, le climat entre l’Elysée et Matignon semble bien, ce derniers temps, être plus souvent sujet aux turbulences qu’au grand beau temps.