Sonntag9. November 2025

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FranceDéjà en campagne, Macron joue sur les régionales et cultive les jeunes

France / Déjà en campagne, Macron joue sur les régionales et cultive les jeunes
Emmanuel Macron tente de séduire les jeunes en se présentant avec les influenceurs „McFly“ et „Carlito“ Photo: AFP/Martin Bureau

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La campagne pour les élections régionales donne à l’évidence au président Macron l’occasion de renouer avec le jeu de la „politique politicienne“. Mais l’enjeu réel de ce scrutin dépasse de beaucoup, à ses yeux, sa dimension locale, où son parti, La République en Marche, n’a d’ailleurs à peu près aucune chance de marquer des points. Ce qui se profile derrière les dernières interventions élyséennes est en fait l’élection présidentielle de l’an prochain.

Curieusement, le chef de l’Etat semble obsédé par ses deux rivaux potentiels de la droite modérée, Xavier Bertrand et Valérie Pécresse, respectivement présidents sortants des régions Hauts-de-France et Ile-de-France, contre lesquels il a dépêché cinq ministres pour chacun, dont plusieurs poids lourds du gouvernement. Pourtant, c’est plutôt Marine Le Pen, et elle seule, d’après tous les sondages, qui semble toute désignée à ce stade pour lui faire face au second tour en 2022, comme ç’avait déjà été le cas en 2017.

Sans doute Emmanuel Macron avait-il alors facilement triomphé de la présidente du Rassemblement national dans les urnes, après l’avoir fort malmenée dans un débat contradictoire où, sur les dossiers économiques notamment, elle avait clairement perdu pied. Mais les choses ont beaucoup évolué en quatre ans, et rien n’indique qu’elle ne vont pas continuer à le faire: le RN s’est un peu modéré et modernisé, dédiabolisé assez largement, et même transformé, pour tout dire, en un parti presque „normal“. Cependant que l’actualité la plus brutale se chargeait, jour après jour, et encore ce week-end, d’apporter de l’eau à son moulin sécuritaire.

Certes, on imagine bien que le locataire de l’Elysée encouragera dans l’entre-deux-tours des régionales les regroupements de type, „Front républicain“ destinés à faire barrage aux listes lepénistes. Mais si celles-ci l’emportent dans une, deux ou même trois régions, cette stratégie sera désavouée, et lui-même cessera d’apparaître comme le rempart de l’extrême droite, ce qui pourrait être désastreux pour lui dans un an. Ce qui, dans le cas du duel pour l’instant annoncé Macron-Le Pen, pourrait dissuader de nombreux électeurs de gauche de voter pour lui au second tour, même avec des pincettes, mais aussi un certain nombre d’électeurs de droite.

A l’Elysée, l’heure est à l’offensive

Peut-être aurait-il donc été de meilleure stratégie, pour le président sortant, d’enjamber avec une feinte tranquillité d’esprit ce scrutin non négligeable, mais enfin secondaire, pour apparaître comme l’homme au-dessus des querelles de partis – faute d’avoir réussi à en constituer un qui soit digne de sa majorité parlementaire et présidentielle. Cela dit, il paraît pour l’instant en situation d’arracher sa réélection en 2022, fût-ce de justesse, face à Marine Le Pen. Et de toute façon, la „mère de toutes les batailles“, autrement dit la course à l’Elysée, ne fait que commencer.

Mais dès maintenant, du côté de l’Elysée, l’heure est à l’offensive. Depuis une dizaine de jours, M. Macron s’applique à séduire les jeunes, parmi lesquels il n’avait déjà pas une mauvaise image. Allocation „culturelle“ de 400 euros (ce qui ne fera pas de mal non plus aux différents secteurs économiques concernés), „pass sport“ de 50 euros pour prendre une licence dans un club; plus encore: il a autorisé, „à titre expérimental“, la tenue d’un concert du groupe Indochine à Paris-Bercy pour 5.000 personnes – masquées et contrôlées, il est vrai.

Et il a participé sur Internet à une séquence burlesque de devinettes, abondamment reprise par les différentes chaînes de télévision, avec deux „influenceurs“ populaires parmi ce public-cible, Carlito et McFly. Séquence dont on saurait dire que la présidence de la République en soit sortie grandie, mais qui a eu son petit succès …

La Californie sans la mer

Le risque de ces clins d’œil très appuyés en direction des jeunes est double, cependant: ces derniers votent peu, et au contraire la tranche d’âge qui vote beaucoup, les plus de cinquante ans, se sent actuellement délaissée. Certains de ses membres se disent même trahis, à la fois par ces pitreries présidentielles, et par la désinvolture qu’ils reprochent au pouvoir en ce qui concerne l’effondrement de la sécurité publique, thème qui touche évidemment en priorité les plus âgés.

Emmanuel Macron l’a cependant laissé entrevoir dans un long entretien qu’il a accordé au magazine Zadig, évident mais assez brillant exercice de séduction en direction, pour le coup, de l’ensemble des Français: au-delà d’une bourde étonnante (il y présente ainsi la Seine-Saint-Denis, infortuné département de la banlieue nord de Paris, en proie à un chômage abyssal et aux violences des bandes armées, comme „la Californie sans la mer“!), „le rebond du pays“ lui inspire „une grande confiance“.

Il veut même croire en une „renaissance“ dont, entre la fin de la pandémie du Covid et une reprise économique qui reste à venir, il pourrait se positionner comme le héraut. Ou le héros? Flatteuse et idyllique vision pour un président sortant, dont il reste à savoir si, dans un an, elle suffira à conduire une majorité d’électeurs à le garder à l’Elysée pour cinq nouvelles années.