Le premier d’entre eux est que, justement, le grand défilé du 1er mai dans la capitale, jeudi, ne s’est pas très bien passé pour ce parti. Son premier secrétaire délégué (et donc numéro deux) du PS, Nicolas Mayer-Rossignol, a en effet dénoncé „des agressions de militants et d’élus liées au fait qu’ils sont socialistes, et parce que certains d’entre eux sont juifs.“ C’est en particulier le cas du député Jérôme Guedj, poursuivi depuis longtemps par la haine vigilante de La France Insoumise de Jean-Luc Mélenchon, et qui a été si vivement pris à partie au cours de la manifestation que le service d’ordre du PS a dû l’exfiltrer du cortège, où des éléments antisémites ou pro-Hamas l’accablaient d’injures et de menaces.
Les incidents les plus notables se sont produits devant le stand qu’avait installé le PS sur le parcours du cortège de la gauche: des manifestants cagoulés et habillés de noir, certains brandissant des drapeaux et des pancartes prétendument „antifascistes“, s’en sont pris élus et militants du PS, dont quatre ont été blessés. Le parti a porté plainte, et pour M. Guedj, „tout cela est cohérent avec la détestation que ces agresseurs vouent aux socialistes, et singulièrement à moi: tout cela pue l’antisémitisme“.
L’affaire repose une fois encore le problème de l’alliance, désormais seulement éventuelle, du PS et d’autres forces de la gauche, dont les Verts, avec LFI, dont une frange n’hésite plus à afficher, à la faveur – si l’on peut dire – du drame de Gaza, son engagement résolu contre la communauté juive de France, en espérant capitaliser sur le vote de la communauté musulmane, pourtant résolument légaliste et républicaine dans sa grande majorité.
La question, en fait, date déjà de bientôt un an, avec la création, dans une ambiguïté que pouvait expliquer l’urgence, du Nouveau Front populaire en vue des dernières élections législatives, où aucune formation politique n’a finalement pu imposer sa prépondérance au Palais-Bourbon. Mais l’approche du congrès du PS lui donne une nouvelle actualité, et ravive donc le débat interne à la gauche en général, et chez les socialistes en particulier. Car le premier secrétaire du parti, Olivier Faure, jouera à Nancy la prolongation, ou non, de son mandat.
Deux constats inquiétants
Et cela dans des conditions difficiles, face à plusieurs poids-lourds socialistes. M. Faure – que ses contestataires s’amusent en coulisse à surnommer „Olivier Faible“ – continue, même s’il n’est pas suspect lui-même de penchants antisémites ni de sympathie pour le Hamas, d’incarner aux yeux de ces derniers la stratégie d’alliance avec Jean-Luc Mélenchon. Alors qu’au sein du parti, nombreux sont désormais ceux qui jugent qu’un tel choix, si contraire à toute la tradition socialiste, tient plus d’une indéfendable complicité électoraliste que de la subtilité tactique.
Des personnalités importantes du PS, à commencer par son rival finalement défait (dans des conditions d’ailleurs contestées) lors du précédent congrès, le maire de Rouen Nicolas Mayer-Rossignol, mais aussi une jeune étoile montante du parti, dont il préside le groupe à l’Assemblée nationale, Boris Vallaud, comptent bien s’opposer à lui pour la direction du PS. Jérôme Guedj, de son côté, a déploré avec amertume de n’avoir pas reçu d’Olivier Faure le moindre message de solidarité après les incidents du 1er-Mai.
Et chez les Verts, la secrétaire nationale Marine Tondelier, qui avait d’abord esquivé les questions sur ce sujet, a exprimé ses regrets de ne pas avoir condamné tout de suite les injures antisémites dont M. Guedj avait été l’objet, cependant qu’à LFI on accusait au contraire le député socialiste d’être venu au défilé du 1er-Mai „entouré de vingt journalistes“, comme s’il avait escompté y susciter un incident qui lui serait favorable. Propos qui ont évidemment achevé d’exaspérer les anciens partenaires des mélenchonistes, et ont valu à Jérôme Guedj nombre de réactions de soutien de la part du reste de la gauche.
Bref, au total, ces incidents ont réveillé les tensions, non pas seulement à l’intérieur du parti socialiste, mais dans l’ensemble d’une famille politique qui assiste avec inquiétude à deux mouvements de l’opinion française, et mondiale. Le premier concerne la prochaine échéance électorale majeure qui attend les Français: après les municipales de l’an prochain, la présidentielle de 2027 – à moins bien sûr que les événements se précipitent, ou que de nouvelles législatives interviennent avant. Les perspectives de ce scrutin, qui semble passionner les candidats potentiels autant qu’il paraît ennuyer d’avance les électeurs, ne sont pas bonnes pour la gauche. Pour la droite non plus, il est vrai; mais cette atonie a, pour l’opposition républicaine, quelque chose d’affligeant. L’autre perspective est, elle, mondiale: c’est, de part et d’autre de l’Atlantique, la montée voire l’installation au pourvoir de forces ultra-réactionnaires, pour ne pas dire plus. Pour l’instant donc, morne printemps.
De Maart
La sympathie injustifiable de certains socialistes pour le gouvernement d extreme droite de Netanyahu provoque les reactions qu elle merite.