Tageblatt: Quel est votre premier souvenir lié au jazz?
Maxime Bender: Vers l’âge de 8 ans, alors que je voyageais avec mes parents dans le sud des Etats-Unis, en passant par la Nouvelle-Orléans, je suis resté scotché devant la performance d’un saxophoniste de rue. Pour me faire plaisir, mon père m’a aussitôt acheté une cassette de jazz où figuraient, entre autres, Miles Davis et Charlie Parker; je l’ai écoutée en boucle. Le jazz est donc relié à mon premier vrai grand voyage, et la Nouvelle-Orléans m’a ouvert à ce monde, mais aussi, plus globalement, à la „Black American music“. Depuis, cette passion ne m’a jamais quitté.
Dès votre plus jeune âge vous assistez à beaucoup de lives.
Mes parents étaient très portés sur la culture, en général; avec eux, je suis allé à plein d’expos et de concerts, en effet, de jazz, de classique, de rock, de tout. Il y en a que j’ai aimés et d’autres moins, mais ce qui est certain, c’est que c’est resté dans mon ADN.

Vous avez été nommé directeur du Trifolion peu de temps avant le début du confinement. Est-ce que cette période d’enfermement a changé votre regard sur la culture et, plus précisément, sur les liens entre les artistes et le public?
Il y a eu un changement concernant les attentes du public. Pendant l’une des éditions du festival de jazz, on a fait du live conjointement à de la retransmission en streaming. De multiples questions se sont posées, dont celle-ci: est-ce que le public peut se contenter encore d’un simple concert frontal? Je crois qu’il veut vivre une expérience. C’est en tout cas ainsi pour moi, en tant que public. Et, dans ma position de musicien, je m’interroge; je pense que les spectateurs aiment qu’on leur raconte une histoire, il faut qu’il y ait un travail audiovisuel. Une coupure peut parfois faire du bien. A cause du confinement, il y a eu des conséquences négatives pour certains artistes, mais la culture a toujours survécu à toutes les crises. Si la culture est, par définition, créative, alors la culture, ce sont des créateurs, or ceux-ci trouvent, quoi qu’il en soit, un moyen de s’exprimer.
Cette année, il y a une nouveauté, à savoir un espace dans lequel les gens pourront aller boire un verre tout en écoutant du jazz, à l’image de l’expérience dont je parlais, qui serait celle de ne pas se restreindre à un concert dans une salle, mais de pouvoir aussi se sentir dans un club de jazz, soit ce qu’il n’y a pas vraiment au Luxembourg
Y a-t-il des festivals qui ont inspiré l’Echter’Jazz?
Oui et non. Il y a beaucoup de festivals de jazz, surtout en France, mais à chaque fois les lieux sont différents ainsi que la taille de la ville où ils se déroulent; il est difficile d’établir une comparaison pertinente. Au Luxembourg aussi, on a quelques festivals dédiés à ce genre musical, comme le „Like A Jazz Machine“ à Dudelange. C’est en tout cas un choix de programmer l’Echter’Jazz Festival à la fin de février, car il n’y a pas grand-chose dans ce domaine à cette période. Aussi, la programmation n’est pas la même qu’à Dudelange, où le festival se concentre pas mal sur le free-jazz. De mon côté, j’essaye de rester dans le „généraliste“, en plus de garder ce désir de promouvoir la scène locale. Et cette année, il y a une nouveauté, à savoir un espace dans lequel les gens pourront aller boire un verre tout en écoutant du jazz, à l’image de l’expérience dont je parlais, qui serait celle de ne pas se restreindre à un concert dans une salle, mais de pouvoir aussi se sentir dans un club de jazz, soit ce qu’il n’y a pas vraiment au Luxembourg

Avec la présence de Veda Bartringer ou de Jeff Herr, le festival met effectivement en avant la scène luxembourgeoise, mais il y a aussi la rencontre entre plusieurs pays, tels que la France, la Belgique, l’Allemagne, l’Amérique et même le Cameroun avec Richard Bona.
Avoir une programmation diverse fait aussi partie de nos objectifs. Le jazz ne se limite pas au jazz, il peut se mêler à la world music ou bien au classique. A ce propos, il y a aussi Thomas Quasthoff, qui est l’un des plus grands chanteurs lyriques au monde; il a reçu plusieurs Grammy. La diversité est importante afin que tout le monde puisse s’y retrouver.
Chez Linq, le jazz se mélange au funk, au disco, voire à l’afrobeat.
Oui, c’est festif; ça fait du bien en fin de soirée!
Si la culture est, par définition, créative, alors la culture, ce sont des créateurs, or ceux-ci trouvent, quoi qu’il en soit, un moyen de s’exprimer
Il y a même quelques nouveaux noms qui sont à l’affiche du festival.
En effet, par le biais de Propulsion, qui est un dispositif de mentorat pour des jeunes artistes qu’on a fondé avec la compagnie Tangram. Notre mission consiste à aider les nouveaux talents de Belgique, du Luxembourg et France, afin qu’ils puissent se développer à plusieurs niveaux. Durant le festival, on va présenter les gagnants de cette année.
L’Echter’Jazz est en adéquation avec votre vision culturelle du Trifolion, en tant que, pour vous citer, „maison ouverte à tout le monde“, y compris dans la volonté d’accessibilité à toutes les générations.
Tout à fait. Ce que la culture peut apporter à la société, c’est l’ouverture d’esprit. Plus largement, la culture n’est pas élitaire, bien qu’elle puisse être perçue comme telle, elle n’est pas destinée qu’aux gens les plus fortunés. On peut faire de la culture pour tout le monde.
Si Salinger disait qu’il écrivait les livres qu’il avait envie de lire, est-ce que vous organisez le festival auquel vous aimeriez assister?
Dans mon rôle de programmateur, je ne réfléchis pas trop selon ce prisme, même si j’ai bien sûr des coups de cœur. Je veux parvenir à toucher un maximum de personnes avec ce que je présente et je ne dis pas non à ce que je trouve bon. A contrario, je serais incapable de programmer un artiste dont la musique ne me plaît pas. Cela dit, étant curieux et ouvert à beaucoup de styles, je pourrais programmer de tout. Je pense donc que je viendrais à mon propre festival!
Le programme
27 février
Richard Bona (CAM)
My Olympus (Sara Gilis et Jeff Herr) (BE/LU)
After Club Session: Linq (LU)
28 février
Bill Frisell Trio (US)
Veda Bartringer Quartet (LU)
After Club Session: Bodies (BE)
1er mars
Thomas Quasthoff meets Rüdiger Baldauf (DE)
The Metz Foundation (LU)
After Club Session: Nobaban (FR)
De Maart
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