Mittwoch5. November 2025

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FranceL’année 2025 s’est ouverte sous le signe de l’imprévision

France / L’année 2025 s’est ouverte sous le signe de l’imprévision
Le premier ministre François Bayrou (g.) ne manque aucune occasion de manifester à Emmanuel Macron que c’est lui qui dirige le gouvernement Photo: AFP

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Le gouvernement Bayrou s’est réuni hier en conseil des ministres, pour sa première „vraie“ séance puisque la précédente, la semaine dernière, avait surtout été destinée à permettre à Emmanuel Macron de prodiguer ses recommandations à la nouvelle équipe. Au point que l’examen d’un texte pourtant important, le projet de loi d’urgence sur Mayotte, avait été reporté au mercredi suivant.

Ce texte, qui doit être soumis aux députés le 20 janvier, a donc finalement été présenté hier. Ce qui n’a pas empêché le chef de l’Etat de continuer à prodiguer ses conseils aux ministres, même si le premier d’entre eux ne manque aucune occasion de manifester – courtoisement bien sûr – qu’en la situation actuelle, c’est essentiellement lui qui pilote l’action du gouvernement.

Le dispositif proposé par le gouvernement comporte notamment différentes mesures destinées à accélérer la reconstruction des infrastructures détruites par le dramatique ouragan du mois dernier, en accordant pour une durée de deux ans des dérogations aux règles officielles de l’urbanisme. Il devrait également permettre de déroger aux règles de la commande publique, très strictes en droit administratif français.

Plusieurs autres mesures d’accompagnement du redressement économique et social de l’archipel, comme la suspension du recouvrement des cotisations sociales pour les travailleurs indépendants, la prolongation des droits des assurés sociaux et des chômeurs, ou encore l’augmentation de la prise en charge du chômage partiel, devraient rester en vigueur tout le premier trimestre. Et un établissement public régional sera chargé de piloter la reconstruction de Mayotte, cependant que, dans l’urgence, l’Etat se substituera autant que nécessaire aux collectivités locales pour la gestion des écoles.

Trois mystères

Voilà donc pour le concret immédiat. Reste que, jour après jour, le climat politique général dans lequel s’engage – pas très vite, d’ailleurs – cette nouvelle année 2025 dans l’Hexagone reste étrange et indécis. Car trois mystères découragent la prospective: ni la vraie répartition des pouvoirs, ni l’avenir électoral et même institutionnel, ni à plus forte raison les projets gouvernementaux, ne semblent lisibles – ce dont, d’ailleurs, les milieux économiques commencent à se plaindre avec insistance.

La vraie répartition des pouvoirs, d’abord. Il est désormais convenu de dire qu’au fond, avec la crise politique majeure créée par la dissolution, l’équilibre entre l’Elysée, le gouvernement et le corps législatif, tel qu’il avait été défini en 1958 par la Constitution, retrouve de sa pertinence. Théoriquement, ce n’est pas faux; mais encore faudrait-il savoir quelles sont réellement, concrètement, les marges d’action des uns et des autres, en l’absence de majorité parlementaire. Or pour l’instant, il est clair que François Bayrou se bat avant tout pour faire durer son cabinet, et asseoir une autorité menacée à la fois par un président qui brûle de reprendre la main et par une composante LR de sa fragile assise au Palais-Bourbon qui ne soutient que du bout des lèvres l’équipe à laquelle plusieurs de ses ténors appartiennent.

L’avenir électoral et même institutionnel, ensuite. Emmanuel Macron a évoqué dans son message de vœux du 31 décembre à la télévision la perspective d’un référendum cette année; en termes vagues, certes, mais qui ont suffi à accentuer le trouble ambiant. Quand? Sur quelle(s) question(s)? En s’appuyant sur quelle procédure précise? Or il se trouve que, aux deux extrêmes de l’éventail politique, des voix de plus en plus nombreuses s’élèvent pour demander la démission de ce président qui ne recueille plus guère que 20% de supporters dans les sondages. Hypothèse que l’intéressé dément, mais qui fait son chemin – et qui ajouterait très vraisemblablement au désordre actuel plutôt que d’y mettre un terme.

Quels projets?

Les projets gouvernementaux, enfin. On finit presque par oublier qu’à ce jour, la France n’a toujours pas de budget pour 2025: M. Bayrou trouvera-t-il enfin une majorité pour le voter, ou le courage de s’engager dans un recours au 49-3 (suicidaire ou non?) qui a été fatal à son prédécesseur? Quels projets, même modestes, peut-il engager face à une Assemblée où il ne dispose pas d’une majorité, même si le RN, contrairement à LFI (qui déposera une motion de censure dès la déclaration de politique générale du premier ministre, le 14 janvier), ne cherche pas pour l’instant à jouer les boute-feu? Y aura-t-il, en outre, cette instauration annoncée d’une part au moins de représentation proportionnelle dans les prochains scrutins législatifs, qui, pour le coup, plairait (notamment) au RN?

„Gouverner, c’est prévoir“, disait au XIXe siècle Adolphe Thiers. Non sans raison sans doute; mais comment gouverner quand rien n’est prévisible? C’est à cette question un peu désespérante que doit répondre François Bayrou.