Freitag26. Dezember 2025

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Interview avec KratonMike Bertemes parle „des ténèbres, celles qui se trouvent dans nos têtes“

Interview avec Kraton / Mike Bertemes parle „des ténèbres, celles qui se trouvent dans nos têtes“
Portrait du groupe: Kraton Photo: Daniel Wahl (Melt Studio) 

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Après treize ans de parcours au sein de la scène métal luxembourgeoise, Kraton sort „Monolith“, son premier disque enregistré dans des conditions professionnelles. Glissant progressivement du death metal au post-doom, le son gagne de l’ampleur, mais le groupe décortique toujours les zones les plus noires de l’âme humaine, via la musique et les textes. Et ce qu’il gagne en maturité, il ne le perd pas en intensité. En attendant le concert de ce samedi au Rockhal Club, interview de la batteuse Véronique Conrardy et du chanteur Mike Bertemes.

Tageblatt: Vos chansons se nomment „Thanatos“, „Hadès“ ou „Revel In Chaos“: le monde actuel vous apparaît-il comme un grand chaos?

Mike Bertemes: Ce sont de vieilles chansons … À l’époque, nous avions composé une espèce de petite trilogie grecque. „Hadès“, par exemple, c’est un voyage dans les ténèbres.

Véronique Conrardy: On ne voit pas le monde comme un enfer; l’idée, c’est plutôt de dévoiler les aspects sombres de l’être humain. Nos morceaux ne font pas une critique de la société, on parle de ce qui touche à la nature, aux instincts, aux difficultés qui se trouvent à l’intérieur de chaque individu, telles que les peurs.

M.B.: C’est le combat interne que l’on peut avoir si l’on est confronté à des phases dépressives. Il s’agit des ténèbres, oui, celles qui se trouvent dans nos têtes.

Diriez-vous que votre musique est cathartique?

M.B.: Pour moi, en tant que chanteur, tout concert représente une session de thérapie.

V.C.: La musique, c’est aussi un moyen d’exprimer certaines émotions qu’on ne pourrait peut-être pas exprimer par les mots.

Pour revenir à la dépression, la nature peut guérir les phases sombres

Mike Bertemes, chanteur

Nietzsche a écrit: „Un nihiliste est un homme qui juge que le monde tel qu’il est ne devrait pas exister, et que le monde tel qu’il devrait être n’existe pas.“ Êtes-vous nihilistes?

M.B.: Non, chez nous personne n’a de tendance nihiliste.

Vos compositions contiennent des éléments de doom metal, un genre souvent emprunt de pessimisme: vous sentez-vous alors pessimistes?

V.C.: Parfois, oui. Mais il ne s’agit pas d’un état général ou constant. Il y a le côté pessimiste et le côté optimiste, positif.

M.B.: Le doom metal renvoie aussi à la vitesse de la musique. Nous, on décélère. Il y a des groupes qui jouent beaucoup de notes et qui ont une approche très technique; nous, on veut faire passer l’émotion à travers des riffs simples. Quant au pessimisme … Je suis optimiste, je veux rester optimiste et je veux devenir encore plus optimiste. Alors j’évacue ce qu’il y a de plus pessimiste dans mes textes et dans la musique. C’est une façon de sortir du pessimisme et d’être une personne plus équilibrée, plus complète.

„Monolith“, c’est votre premier album enregistré de façon „professionnelle“, car vous faites de la musique en autoproduction depuis treize ans: Kraton a-t-il atteint la maturité de … l’adolescence?!

V.C.: On est plus des adolescents! On est devenu plus matures, c’est sûr – cela s’entend dans le songwriting. Kraton est passé à un niveau supérieur. Le fait d’avoir un studio professionnel, et d’avoir plus de moyens, nous a poussé à voir – et à faire – plus grand.

M.B.: Un grand studio professionnel permet d’avoir moins de soucis. Avant, en tant que chanteur, je me retrouvais à devoir m’occuper de l’enregistrement, du mix, tout en sachant que j’avais encore deux chansons à écrire. Là, non.

La pochette avec des hiboux a été réalisée par l’artiste luxembourgeois Damien Giudice: son travail sur la nature reflète-t-il l’ADN du groupe?

M.B.: La connexion s’est établie par le biais de notre guitariste Jacques Zahlen. Son univers est singulier. Comme Kraton a évolué du death metal au post-doom, il fallait qu’il y ait aussi une progression visuelle. Le hibou incarne la sagesse, il symbolise aussi la protection, le mystère, le malheur ou la mort. C’est un animal spirituel. Et, pour revenir à la dépression, la nature peut guérir les phases sombres.

La couverture de l’album „Monolith“
La couverture de l’album „Monolith“ Source: Kraton

Il y a des batteuses comme Moe Tucker, Patty Schemel de Hole, Hannah Blilie de Gossip ou encore Meg White, mais il n’y en a, en réalité, pas beaucoup: Véronique, comment vous sentez-vous en tant que femme dans le rock?

V.C.: Je me sens vraiment à l’aise. À quinze ans, je faisais partie d’un groupe de rock metal, entourée de garçons. Avec Kraton, je n’ai pas de réactions négatives, au contraire. Beaucoup d’hommes me disent qu’ils ont du respect pour ce que je fais. J’ai reçu des messages de femmes m’écrivant qu’elles avaient aussi envie de faire de la musique dans un groupe de rock, ou qu’elles ont des filles qui voudraient, donc que ce que je fais les encourage.

Y a-t-il des femmes, de votre côté, qui vous ont donné envie de faire de la musique?

V.C.: Non pas spécialement. J’ai fait de la clarinette dans l’orchestre de mon village. Quand j’ai commencé à jouer de la batterie, je voulais intégrer un groupe. S’il y a des différences entre les hommes et les femmes, dans nos régions les deux se mélangent de plus en plus. Il y a moins de catégories et de rôles attribués. Et puis, dans la musique, on est peut-être plus libres. Même si le métal est constitué, en majorité, d’hommes, on accepte les personnes en tant qu’êtres humains, au-delà des genres.

Beaucoup d’hommes me disent qu’ils ont du respect pour ce que je fais. J’ai reçu des messages de femmes m’écrivant qu’elles avaient aussi envie de faire de la musique dans un groupe de rock, ou qu’elles ont des filles qui voudraient, donc que ce que je fais les encourage.

Véronique Conrardy, batteuse

Et, plus largement, quelles sont les influences de Kraton?

M.B.: C’est une question pour Jacques Zahlen, notre guitariste et compositeur, mais je connais ses références: les Belges post-metal d’Amenra, ainsi que Celtic Frost et Triptykon, les groupes de Tom G. Warrior. Les premiers albums de Katatonia, aussi.

Kraton, en concert ce samedi
Kraton, en concert ce samedi Photo: Daniel Wahl (Melt Studio)

Vous avez été comparés à Gojira (le morceau „Devoured“). Le groupe a joué pour les Jeux olympiques. Et vous, qu’auriez-vous fait si vous aviez été invités aux JO?

V.C.: Gojira, c’était super!

M.B.: Nous aurions pu jouer sur la Seine, sous la Tour Eiffel, sur les escaliers de Montmartre … Ou non, mieux: dans les catacombes!

V.C.: Sinon dans une forêt. On a joué plusieurs fois au „Rotten Stones“, un festival underground de metal au Luxembourg, à Berdorf. C’est dans un amphithéâtre, dans la forêt …

Le concert de samedi, ça donnera quoi?

V.C.: Il y a une spécialiste des lumières qui se charge de l’éclairage, donc l’ambiance sera spéciale, pour chaque morceau.

M.B.: Entre visions du futur et retour vers le passé. Mais le cœur de la performance restera le présent, avec les chansons du nouvel album.

Kraton

Sortie du nouvel album „Monolith“, ce samedi 9 novembre à partir de 20.00 h à la Rockhal à Esch. Plus d’infos: rocklab.lu.