Les élus, près de cinquante ans après, ont souhaité pérenniser cette réforme. Et ils l’ont fait sans ambiguïté: par 780 voix, contre seulement 72. La majorité des trois cinquièmes des suffrages des députés et des sénateurs, qui en avaient préalablement adopté le texte séparément et dans les mêmes termes, était requise pour valider cette révision constitutionnelle, soit au moins, en l’occurrence, 512 voix: c’est dire combien cette mesure, jadis controversée, est aujourd’hui entrée dans les mœurs.
Pourtant, la droite sénatoriale, à commencer par le président de la Haute-Assemblée, Gérard Larcher, avait formulé des réserves. Non pas sur le fond: il ne s’agissait pas, dans son esprit, de remettre en question la légalité de l’interruption volontaire de grossesse, mais plutôt de critiquer le fait que la Constitution puisse servir à héberger, en quelque sorte, des acquis des politiques gouvernementales successives, comme cela avait déjà été le cas, par exemple, avec le „droit au logement opposable“ (DALO) cher à Jacques Chirac.
Quelques réserves de forme
„La Constitution, rappelait ainsi M. Larcher, c’est au fond la règle du jeu de notre République, qui définit les rapports entre les pouvoirs, et non pas les résultats des politiques suivies, si estimables et importants soient-ils.“ Mais ces quelques réserves de forme n’ont finalement pas empêché une adoption très massive de cette constitutionnalisation, y compris chez les sénateurs, dont l’un avouait avec un sourire: „De toute façon, nous n’avions pas envie d’apparaître comme de vieux rétrogrades anti-féministes …“
Certains observateurs, il est vrai, ont fait observer que pour être désormais constitutionnelle, la légalisation de l’IVG n’en devenait pas tout à fait intouchable pour autant. Ce qu’a fait une révision de la loi suprême, une autre révision pourrait en effet le défaire si, par exemple, une majorité ultra-réactionnaire arrivait au pouvoir (sachant que Mme Le Pen, pour sa part, ne se cache pas d’être favorable à l’IVG). Mais la démarche serait considérablement plus compliquée que pour abolir une simple loi, puisqu’il y faudrait de nouveau la majorité des trois cinquièmes parmi l’ensemble des parlementaires, députés et sénateurs réunis.
Une dernière controverse à propos de la „loi Veil“ pourrait maintenant être celle évoquée par quelques élus de La France Insoumise quant au droit d’un médecin à faire valoir, à titre strictement individuel, une „clause de conscience“ lui permettant de ne pas pratiquer lui-même un avortement s’il y est philosophiquement hostile. Clause qui avait été prévue par la loi de 1975, et qui ne semble pas, depuis, avoir limité de manière significative le recours à l’IVG.
De Maart
Sie müssen angemeldet sein um kommentieren zu können