C’est une jolie et jusqu’alors paisible commune qui partage ses rives entre l’Atlantique et l’estuaire de la Loire, et dont les deux noms complets sentent déjà les vacances, entre „Saint-Brévin-les-Pins“ et „Saint-Brévin-l’Océan“. Mais elle est devenue depuis quelques jours l’épicentre d’une crise locale qui prend des allures nationales, d’un malaise que beaucoup auront ressenti à travers l’Hexagone.
Pourtant, les démissions de maires en cours de mandat municipal ne sont pas rares, dans une France qui compte encore, malgré les tentatives de regroupement, quelque 35.000 communes. Les causes en sont multiples: maladie, conflit interne au conseil municipal, lassitude, nomination à d’autres fonctions … Mais cette fois-ci, le départ du maire de Saint-Brévin fait un bruit exceptionnel, qui remonte jusqu’à l’Elysée.
Il est vrai que le maire, Yannick Morez, établi depuis longtemps en famille à Saint-Brévin, dont il est l’un des médecins, et qui a décidé de quitter non seulement ses fonctions municipales, mais même la ville, a de solides raisons pour cela. Depuis l’annonce de l’extension par l’Etat du foyer d’accueil pour immigrants demandeurs de l’asile politique qu’hébergeait déjà sa commune – „à proximité de la cour de récréation d’une école“, s’indignent les adversaires de cette mesure – il avait déjà été en butte à toutes sortes de menaces et de tentatives d’intimidation, appuyées par des manifestations d’extrême droite, suscitant des contre-manifestations.
Puis est arrivé ce qui aurait pu être un drame absolu, et qui reste un crime en droit français: l’incendie volontaire de sa maison, en pleine nuit, tandis qu’il y dormait avec sa femme et ses enfants, le 22 mars dernier. Le bâtiment a été en partie saccagé par les flammes, et les deux voitures de la famille détruites. L’enquête diligentée par le parquet de Nantes a permis de conclure à une tentative d’incendie criminel, mais personne n’a encore été arrêtée.
Une situation qui ne cesse de se dégrader
M. Morez avait déjà alerté les pouvoirs publics sur les menaces graves, parfois même de mort, dont il faisait l’objet à propos de l’extension du foyer d’accueil, décidé par l’Etat pour compléter un dispositif qui n’avait jamais donné lieu jusqu’alors au moindre incident. Pouvoirs publics qui n’avaient guère répondu: selon son entourage, „le maire n’avait reçu aucun soutien ou signe de la part du préfet, et tout juste un coup de téléphone d’Olivier Véran, le porte-parole du gouvernement“.
Onze jours après l’incendie, M. Morez avait tout de même reçu une lettre d’Emmanuel Macron dans laquelle le président reconnaissait que le maire faisait face à de „lourdes contraintes“ et à une „exposition publique“, et l’assurait de „tout son soutien“. Aimables paroles, certes, mais peu susceptibles de dissuader M. Morez de se plaindre d’avoir été „abandonné par l’Etat“ …
Si ce constat amer trouve aujourd’hui un si large écho dans le monde des élus locaux, c’est que leur situation, au regard de la sécurité et du respect de leurs fonctions, se cesse de se dégrader. L’an dernier, les violences physiques, menaces et insultes dont ils ont fait l’objet ont augmenté de 32%, et 2.265 plaintes ont été déposées. A telle enseigne que de nombreux maires ont déjà annoncé qu’ils ne se représenteraient pas lors des prochaines élections municipales.
De Maart
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