Cet article a toujours eu mauvaise presse auprès des différentes oppositions successives. Il s’agit, en gros, de remplacer le vote détaillé du texte par un engagement de responsabilité du gouvernement, contraignant ses adversaires à déposer une motion de censure; si celle-ci n’est pas adoptée, ou à plus forte raison si elle n’est même pas déposée, le projet gouvernemental est réputé adopté sans autre débat, façon en général efficace de contourner une absence de majorité parlementaire. Dans le cas contraire – hypothèse relativement peu vraisemblable cet automne – le gouvernement est renversé.
La nouvelle idée du pouvoir pour éviter d’en arriver à cette solution consiste à lancer, préalablement à la discussion et au vote parlementaire de son budget pour l’année qui vient, ce que les ministres concernés, Bruno Le Maire et Gabriel Attal, appellent „les entretiens de Bercy“. On dirait le nom de quelque élégant colloque de spécialistes, mais il s’agit en fait de négociations entre le gouvernement et les différentes formations de l’opposition sur les grandes orientations budgétaires pour 2023.
Le concept pourrait avoir quelque chose de séduisant. Mais il est perçu, à droite comme à gauche, comme une sorte de piège. Il se trouve en effet que ce qui, dans la tradition parlementaire française, marque le plus explicitement l’appartenance d’un élu ou d’un parti à la majorité, c’est son approbation du budget. En approuver le financement, même après des négociations, et sauf à avoir obtenu des changements massifs et significatifs, c’est approuver aussi la ligne de conduite qu’entend suivre le gouvernement, et donc se priver, pour la suite, de la critiquer. Difficile à admettre pour des partis d’opposition.
Au détriment du Parlement
En outre, tout le monde sait bien qu’en septembre le projet de loi de finances est bouclé, pour l’essentiel, depuis de longs mois déjà (les travaux gouvernementaux, sur ce terrain, commencent en janvier, et les arbitrages de Matignon se rendent au plus tard au début de l’été). La marge de manœuvre d’un ministre du Budget cherchant à faire quelques concessions à l’opposition est donc, de ce fait, des plus réduites, à quelques gadgets près.
En troisième lieu, et peut-être surtout, plusieurs dirigeants des Républicains, du Rassemblement national et de la NUPES font valoir que, constitutionnellement, ce n’est pas dans le secret de pourparlers à „Bercy“ (siège du ministère des Finances) que se négocie le budget de la France, mais au sein de son Parlement; à commencer par la Commission des finances de l’Assemblée nationale. Et que, sous couleur de tendre la main à l’opposition, le gouvernement – et, au-dessus de lui, l’Elysée – tentent de réduire encore le rôle des élus.
C’est là un argument que l’on retrouve aussi chez les mêmes partis à propos de l’invitation qui leur est faite par M. Macron de participer à son „Conseil national de la Refondation“ (dit: CNR, sigle qui était celui, sous l’occupation, du Conseil national de la Résistance; on veut espérer que le chef de l’Etat ne l’a pas fait exprès). Ce nouvel organisme, dont les travaux seront inaugurés demain sans la CGT ni FO, devait à l’origine rassembler des parlementaires de tous bords, ainsi que des responsables associatifs et syndicaux, et des experts.
Le problème est qu’il sera ainsi largement redondant avec le vieux Conseil économique, social et environnemental, dont les travaux n’ont hélas jamais beaucoup retenu l’attention des gouvernants. Et qu’une fois de plus, on semble chercher à déposséder l’Assemblée nationale et le Sénat de leurs missions de proposition, de consultation et d’enquête (en particulier à travers leurs commissions). Le président LR du Sénat, Gérard Larcher, a déjà fait savoir que lui non plus ne s’y rendrait pas.
De Maart
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