L’avenir de Musharraf est incertain, mais moins que celui du Pakistan

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L'exil de l'ex-président Pervez Musharraf semble l'hypothèse la plus prisée dans les milieux politiques au lendemain de sa démission, mais son départ ne résout pas la crise sans précédent qui affecte le Pakistan, menacé par les islamistes radicaux proches d'Al-Qaïda.

Après neuf années sous sa direction, la seule puissance militaire nucléaire du monde musulman s’active à lui trouver un successeur mais la tâche du gouvernement de coalition, déjà très fragilisé par des querelles intestines, s’annonce délicate.
Car il faut aussi un chef de l’Etat susceptible de ne pas effrayer les Occidentaux. Et surtout les Etats-Unis dont M. Musharraf fut l’un des alliés-clés dans la „guerre contre le terrorisme“ depuis septembre 2001. Washington a cependant quasiment „lâché“ son partenaire ces derniers mois devant son incapacité à endiguer la montée en puissance des combattants d’Al-Qaïda et des talibans qui ont, selon Washington, reconstitué leurs forces dans les zones tribales du nord-ouest, frontalières avec l’Afghanistan. La presse et les analystes pakistanais bruissaient dès lundi de rumeurs sur un marché présumé passé entre le gouvernement et les chefs militaires d’Islamabad, sous la houlette des Etats-Unis, pour garantir l’impunité au chef de l’Etat démissionnaire. Dans quelques jours, M. Musharraf doit s’envoler en famille pour accomplir l’Oumra, le „petit pèlerinage“ à la Mecque, selon son entourage. Il s’exilera ensuite en Grande-Bretagne ou en Turquie, a assuré à l‘AFP un haut responsable du gouvernement, sous couvert de l’anonymat. Mais un responsable de la présidence sortante a affirmé également à l‘AFP qu’il rentrera au Pakistan aussitôt son pèlerinage accompli. M. Musharraf a démissionné lundi à la veille du lancement par le gouvernement d’une procédure de destitution qui visait essentiellement à accuser le chef de l’Etat d’avoir violé la Constitution en imposant l’état d’urgence en novembre 2007 pour empêcher la Cour suprême de juger illégale sa réélection contestée.
Mais les partis de la coalition au pouvoir, vainqueurs des législatives en février, ont accouché très laborieusement de cette procédure de destitution et, au-delà du sort de M. Musharraf qui les divisaient, se déchirent sur presque tous les sujets depuis la formation du gouvernement en mars. Le Parti du Peuple Pakistanais (PPP) de l’ex-Premier ministre Benazir Bhutto, assassinée en pleine campagne électorale fin décembre dans un attentat suicide, dirige l’actuel gouvernement. Le second pilier de la coalition, le parti de l’ancien chef du gouvernement Nawaz Sharif, grand rival de Mme Bhutto dans les années 1990, a quitté le gouvernement tout en continuant de le soutenir au Parlement, précisément parce que le leader du PPP, Asif Ali Zardari, le veuf de Mme Bhutto, traînait les pieds pour évincer le chef de l’Etat. Le cas Musharraf étant finalement réglé après de très laborieuses tractations, la fragilité de la coalition demeure l’inquiétude essentielle des analystes et de la presse pakistanais. Et ce au moment où la République islamique du Pakistan, forte de 160 millions d’habitants, s’enfonce dans une crise économique parmi les plus sévères de son histoire et est confrontée à des pressions intenses de Washington pour intensifier les combats contre Al-Qaïda et les talibans dans les zones tribales.
Or, quand M. Musharraf avait lancé une offensive contre les extrémistes il y a un an, en prenant d’assaut un de leurs bastions au coeur de la capitale Islamabad, la Mosquée rouge, les islamistes radicaux avaient déclenché une vague d’attentats sans précédent dans tout le pays, qui a fait près de 1.300 morts en un peu plus d’un an. Le gouvernement doit donc se frayer un chemin entre la nécessité de préserver la sécurité des Pakistanais et les pressions intenses de Washington, principal bailleur de fonds du Pakistan et qui bombarde régulièrement ses zones tribales malgré les protestations officielles d’Islamabad.