Jeu d’échec sud-américain: Quito plus proche de Moscou, Bogota de Washington

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Bogota et Washington ont signé vendredi un nouvel accord militaire, mais l'hégémonie historique américaine est de plus en plus contestée par la Russie dans la région, à l'image des nouveaux accords signés par Moscou avec l'Equateur du socialiste Rafael Correa.

L’accord liant Bogota à Washington, en vigueur en principe pendant dix ans, a suscité, en juillet et en août un tollé régional, car il autorise l’armée américaine à faire usage d’au moins sept bases situées aux quatre coins de la Colombie, pays comptant des frontières avec le Venezuela, l’Equateur, le Brésil, le Pérou et Panama.

L’accord permet à Washington de compenser la fermeture en septembre de sa seule base en Amérique du sud, dans le port de Manta (Equateur), d’où étaient menées des opérations aériennes de surveillance du Pacifique destinées à intercepter les cargaisons de cocaïne. Mais il déplaît aux pays membres de l’Unasur (Union des nations sud-américaines), encore marqués par une longue histoire continentale d’invasions américaines, à commencer par celle de la Baie des Cochons, en 1961. Le 28 août, lors d’un sommet consacré à ce sujet en Argentine, ils ont exigé que toute présence de troupes étrangères ne porte pas atteinte à leur „souveraineté“ ou leur „intégrité“.

La Colombie, dirigée par celui qui fut le plus proche allié du président George W. Bush dans la région, Alvaro Uribe, s’est trouvée isolée, certains l’accusant même de „trahison“. Et les représentants de la gauche radicale latino-américaine, le président vénézuélien Hugo Chavez en tête, ont dénoncé les velleités hégémoniques de Washington, M. Chavez allant jusqu’à affirmer que „l’empire“ s’était ainsi lancé dans une „nouvelle offensive guerrière visant l’Amérique du sud“. Pendant ce temps, les relations entre la Russie et plusieurs pays de la région, se sont renforcées. En septembre, Hugo Chavez a justement annoncé avoir passé un nouveau contrat militaire avec Moscou, qui prêtera deux milliards de dollars (1,4 milliard d’euros) à son pays pour l’achat de 92 chars T-72 et de lance-missiles.

Le contrat est le dernier d’une longue liste, Caracas étant devenu le premier acheteur d’armes russes du continent avec des achats atteignant les 4,4 milliards de dollars depuis 2005. „Avec ces fusées, ils vont avoir du mal à nous bombarder“, avait-il assuré, alors que Washington manifestait ses craintes d’une course aux armements. Jeudi, le président russe Dmitri Medvedev a reçu à Moscou son homologue équatorien Rafael Correa, une rencontre au cours de laquelle une dizaine d’accords ont été finalisés ainsi que la vente à Quito de deux hélicoptères de transport de troupes. „Ces dernières années les relations entre la Russie et les Etats latino-américains se sont nettement renforcés“, s’est félicité M. Medvedev qui s’était rendu en 2008 au Brésil, au Venezuela, à Cuba et au Perou. A Cuba ou en Bolivie aussi, l’influence de la Russie est palpable, avec des prêts destinés à financer des infrastructures énergétiques ou des achats d’armement.

Moscou gagne du terrain commercialement, avec des échanges atteignant 16 milliards de dollars en 2008, contre trois milliards dans les années 1990, selon le directeur de l’Institut de l’Amérique latine à l’académie des sciences russes Vladimir Davydov.

L’intérêt est aussi géopolitique pour la Russie. Elle peut ainsi rendre la „monnaie de leur pièce“ aux Etats-Unis pour leur soutien dans son ancienne sphère d’influence à des régimes qui lui sont opposés, comme la Géorgie, accusée de s’armer chez les Américains, explique Carlos Espinosa spécialiste en relations internationales à l’Université San Francisco de Quito.