L’Autriche à l’heure du grand ménage antidopage

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L'Autriche, longtemps une oasis du dopage en Europe en raison d'une législation laxiste, a entrepris de faire le ménage et de restaurer son image avec une série sans précédent d'arrestations, dont celle dans la nuit de lundi à mardi d'une figure-clé présumée, Stefan Matschiner.

 L’ancien manageur du champion cycliste autrichien Bernhard Kohl, déchu de sa troisième place et de son titre de meilleur grimpeur au Tour de France 2008 pour dopage, a été interpellé en Haute-Autriche par la toute nouvelle brigade de police judiciaire antidopage, quelques heures après son retour d’un séjour aux Etats-Unis.
Cible de „soupçons renforcés de trafic de substances dopantes“, Stefan Matschiner, 34 ans, présente des „risques de dissimulation de preuves et d’infractions“, a précisé le Parquet de Vienne. Déjà cité dans plusieurs affaires, du scandale de dopage des fondeurs et des biathlètes autrichiens aux JO-2006 à Turin à l’exclusion du Danois Michael Rasmussen du Tour de France 2007 pour s’être soustrait à des contrôles alors qu’il portait le maillot jaune, le manageur n’avait jamais été inquiété. Son interpellation est intervenue après qu’il eut été nommément désigné comme un fournisseur d’érythropoïétine (EPO) par la triathlète autrichienne Lisa Hütthaler. Dans une interview au journal autrichien Kurier le 27 mars, l’ex-championne d’Europe des moins de 23 ans, suspendue deux ans pour dopage, s’est dite prête à jouer le rôle de témoin-clé pour démonter la filière dont elle avait profité.
Bernhard Kohl, qui avait refusé de nommer ses fournisseurs d’EPO Cera sur la Grande Boucle, pourrait l’imiter: après l’arrestation de son ex-manageur, il a annoncé une conférence de presse pour jeudi. L’arrestation de Stefan Matschiner survient dix jours après un autre coup de tonnerre: l’interpellation de l’ex-entraîneur Walter Mayer, au coeur du scandale de Turin. Il est en détention provisoire depuis le 25 mars. Jadis lié à Walter Mayer, Stefan Matschiner, un ancien coureur de demi-fond, a formellement démenti tout lien avec les circuits du dopage. Interviewé le 27 mars par la radio-télévision publique autrichienne ORF, il a toutefois reconnu fréquenter un médecin cancérologue pour enfants, Andreas Zoubek, accusé par Lisa Hütthaler de lui avoir fourni de l’EPO. Au total, près de 25 personnes sont dans le collimateur du Parquet de Vienne, a indiqué une porte-parole, Michaela Schnell, parlant „d’un véritable réseau“.
Impensable il y a encore un an, cette vague d’arrestations a été rendue possible par un tardif durcissement de la législation autrichienne en août dernier.
Première en Autriche dans une affaire de dopage, un sportif, le cycliste Christof Kerschbaum, également lié à Walter Mayer, a été placé en détention pendant onze jours à la mi-mars pour soupçon de trafic. „L’Autriche a beaucoup souffert d’être perçue à l’étranger comme un centre du dopage. Nous devons corriger cette image“, a souligné le ministre de la Défense et ministre des Sports, Norbert Darabos. La possession et le trafic de produits dopants, qui relevaient auparavant d’une simple amende, sont désormais passibles de cinq ans de prison. Les peines ne sont toutefois pas rétroactives et c’est sur des délits présumés commis depuis lors que Matschiner, Mayer et Zoubek doivent s’expliquer. C’est également pour cette raison qu’a été classé le 24 mars le dossier Humanplasma, un laboratoire viennois soupçonné d’avoir été impliqué dans des transfusions sanguines suspectes sur plusieurs dizaines de sportifs européens: le dopage sanguin n’était pas prohibé en Autriche avant cette loi. Saluant la vague d’arrestations, Norbert Darabos s’est dit „de plus en plus conforté dans sa politique de fermeté“ et a souhaité que les sportifs autrichiens puissent encourir à l’avenir des peines de prison pour prise de produits dopants et non plus uniquement pour trafic ou possession de ces substances.