Luxembourg: le grand-duc Henri se saborde pour continuer à régner

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Le grand-duc Henri de Luxembourg, un homme décrit comme \"moderne\" mais très attaché aux valeurs catholiques, a préféré voir ses pouvoirs se restreindre plutôt que d'avoir à avaliser une loi légalisant l'euthanasie ou à abdiquer.

En faisant savoir cette semaine qu’il refuserait de signer, pour des raisons de „conscience“, un projet de loi, certes polémique mais approuvé en première lecture par les députés, le souverain de 53 ans a jeté les bases de l’instauration d’une monarchie purement protocolaire, de type „suédois“, au Luxembourg.
Ce père de cinq enfants à l’air toujours juvénile a adopté un style plus moderne, plus accessible, que ses prédécesseurs, raffermissant le lien déjà fort avec la population.
Mais ce diplômé de l’académie militaire de Sandhurst (Angleterre) et de l’Université de Genève n’a jamais renié les valeurs familiales et catholiques d’une dynastie remontant aux capétiens. Un traditionalisme renforcé sous l’influence de la grande-duchesse Maria Teresa, une Cubaine de bonne famille épousée en 1981.
„Il est bien connu que la grande-duchesse est proche du mouvement charismatique et que celui-ci a des positions assez radicales sur des dossiers comme l’euthanasie“, explique le député libéral Eugène Berger. „Et l’on sait que la grande-duchesse a une influence importante sur le grand-duc“, ajoute M. Berger, l’un des rares responsables politiques luxembourgeois à s’exprimer ouvertement sur le sujet. Proche du modèle belge, la constitution luxembourgeoise confère actuellement au souverain un rôle de symbole de l’identité du pays et de garant de ses institutions.
Bien que censé se situer au-dessus de la mêlée politique, il dispose d’une „autorité morale lui conférant un pouvoir d’influence“, souligne le site de la monarchie du Grand-Duché. Ce système, où le souverain „règne mais ne gouverne pas“, a fonctionné sans heurt pendant près de 90 ans, la dernière crise remontant à 1919, lorsque la grande-duchesse Marie-Adélaïde avait dû abdiquer après avoir soutenu trop visiblement la droite catholique dans une querelle sur l’enseignement public. Le grand-duc Jean, à partir de 1964, puis son fils Henri, depuis 2000, ne se sont départis de leur neutralité que pour soutenir de causes consensuelles comme la défense de l’environnement. Mais depuis plusieurs mois, le souverain avait discrètement laissé entendre dans les milieux politiques qu’il ne pourrait pas „sanctionner“ par sa signature la loi légalisant l’euthanasie et l’assistance au suicide. Le Premier ministre luxembourgeois Jean-Claude Juncker a fini mardi par en révélant le problème posé par ce refus d’appliquer la constitution. „Notre désaccord était tellement grave que je ne pouvais pas le cacher au pays“, a expliqué M. Juncker, un chrétien-social personnellement opposé à l’euthanasie mais qui avait pris acte de la volonté du parlement. Pour éviter une grave crise, et à la suggestion semble-t-il du grand-duc lui-même qui sinon aurait risqué devoir abdiquer, les partis luxembourgeois ont décidé du principe d’une révision expresse de la constitution. A l’avenir, le grand-duc ne devra plus prendre part au processus législatif en „sanctionnant“ les lois mais il se contentera de les „promulguer“, un acte du pouvoir exécutif n’impliquant pas son accord sur le fond. Henri de Luxembourg devrait aussi pouvoir continuer à recevoir les ambassadeurs en audience, à représenter son pays aux funérailles des grands de ce monde et à inaugurer les lycées. Quant à la loi sur l’euthanasie, son entrée en vigueur n’est plus attendue avant le printemps prochain, le temps d’effectuer le nécessaire toilettage de la Constitution