ÉDITORIAL: Quelqu’unde bien

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Un éditorial sur Philippe Séguin au Tageblatt, est-ce bien raisonnable? /Danièle Fonck

Oui, bien sûr, car pourquoi ne rendrait-on pas hommage à un gaulliste de gauche, un gaulliste social, homme de bien, homme d’une intelligence supérieure, homme d’une fine culture, homme de courage et homme volontaire.
Personnalité haute en couleurs, célèbre pour ses emportements et ses déprimes, connue pour sa sensibilité et son attachement aux êtres les plus modestes dès qu’ils furent en peine, Philippe Séguin fut surtout quelqu’un de droit dans ses bottes. Son franc-parler pouvait choquer. Sa rigueur et son honnêteté intellectuelle composaient largement sa franchise.
Avec lui, il n’y eut pas de combines, pas d’hypocrisie, pas de blessures dues à de basses polémiques. L’ancien maire d’Epinal, député pendant 24 ans, président de l’Assemblée nationale, candidat malchanceux à la mairie de Paris contre Bertrand Delanoë et, ces dernières années, brillant président de la Cour des comptes, est intéressant par bien des égards. Ce n’est pas qu’en France que l’on manque de personnalités politiques comme lui. Toute l’Europe en manque et cela explique bien des aléas.
Certes, nous ne pouvions jamais partager son approche de l’Europe, son opposition farouche aux traités de Maastricht et d’Amsterdam, même si tout son argumentaire n’était pas faux. Ce qui vaut en revanche qu’on s’attarde à sa démarche, ce fut la haute idée des valeurs républicaines que ce Vosgien d’adoption, pied-noir venant de Tunis et passionné de foot, ne cessa jamais de défendre et ce qui le plaça à l’autre bout de l’échiquier par rapport à de tristes sires comme l’actuel ministre de l’Immigration Eric Besson.

Les valeurs d’abord, l’amitié ensuite

Séguin aurait pu chanter comme Joséphine Baker qu’il avait dans son coeur deux amours et il lui était donc facile de comprendre certaines déchirures que vivent au quotidien les Français d’ailleurs cherchant dans l’Hexagone non seulement le mieux vivre, mais surtout le respect de valeurs intemporelles tel le respect des droits de l’Homme, le respect des libertés collectives et individuelles ou encore l’équité et la fraternité.
En cela, Philippe Séguin était probablement le dernier des gaullistes. Pas question pour lui de flatter les grands, les puissants, les riches; pas question de mépriser les petits, les gens simples, les hommes ordinaires. L’instruction est publique, l’éducation nationale un dû, l’égalité des chances une nécessité pour un pays qui veut éclore et avancer, l’Etatest intègre jusqu’au plus haut niveau, l’entreprise aussi une mission sociale, quitte à exister pour fleurir et gagner de l’argent: ainsi pourrait-on résumer quelques-uns de ses principes fondamentaux.
Pas étonnant qu’il n’ait pas supporté la vanité d’un Edouard Balladur et ait tout fait pour le faire battre aux présidentielles; pas vraiment surprenante non plus son alliance passagère avec l’énergumène Charles Pasqua, lui aussi attaché avec ses tripes à la France républicaine.
Pas incompréhensible non plus que celui qui fréquentait Nicolas Sarkozy soit le premier et le plus sévère critique des dépenses et irrégularités élyséennes.
Pour que la politique, art noble, soit crédible, ses émissaires doivent l’être à tous les échelons. Et si elle veut être comprise, ce qui est indispensable à sa bonne marche dans la durée, les élus doivent rester proches de ceux et celles qu’ils représentent et défendent.
Ce message-là, essentiel, Philippe Séguin l’avait intégré au plus profond de lui même et c’est cela qui, aujourd’hui, alors qu’il est mort inopinément et bien jeune, fait qu’au-delà des clivages politiques, on lui rende hommage.

dfonck@tageblatt.lu