Robert Ménard annonce son départ de Reporters sans frontières

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Robert Ménard a annoncé vendredi son départ de la direction de Reporters sans frontières (RSF), avec le sentiment d'avoir accompli sa tâche car l'organisation qu'il a fondée il y a 23 ans n'a, selon lui, \"jamais été aussi présente dans le monde\".

 „Cela fait deux ans que j’ai envie de passer la main, pas pour moi mais pour RSF. C’est justement parce que tout va bien que j’ai décidé de le faire maintenant“, a expliqué Robert Ménard à l‘AFP. Pour décider du moment de son départ, le secrétaire général voulait attendre que l’assise financière de RSF „soit saine“, qu’elle dispose de locaux et d’une „bonne équipe“, ce qui est le cas aujourd’hui selon lui. „Je voulais choisir le moment où cela marche le mieux, et aujourd’hui après cette campagne sur la Chine, RSF n’a jamais eu autant de notoriété dans le monde“, a-t-il ajouté. Il estime qu’il „ne faut pas s’accrocher mais au contraire savoir transmettre à une équipe de gens qui sont plus jeunes, différents et qui apportent autre chose que ce que j’apportais“. Son successeur est Jean-François Julliard, 35 ans. Il travaille à RSF depuis 1998 et vient d’être élu pour cinq ans au poste de secrétaire général par le Conseil international de l’organisation. Titulaire d’un DESS de journalisme, il était devenu chercheur pour l’Afrique puis responsable de la recherche de l’organisation en 2004. Jean-François Julliard „connaît parfaitement les rouages, les méthodes et la philosophie“ de l’organisation, a affirmé Robert Ménard dans un communiqué de RSF. „Il lui apportera son enthousiasme, celui d’une génération de militants rompus à la mondialisation et à internet“. „J’ai 55 ans et je me sens en pleine forme. J’ai envie de faire autre chose. Je vais trouver une autre façon de continuer le combat pour les droits de l’Homme et la liberté de la presse. RSF va se développer sans moi et j’en suis ravi“, a déclaré à l‘AFP M. Ménard, qui restera cependant „militant“ de l’association. Il en a également été nommé vendredi président d’honneur. Ce militant intransigeant de la liberté d’expression, à qui ses détracteurs reprochent un activisme médiatique excessif, dit avoir „quelques idées sur ce qu’il veut faire“, mais veut aussi „se poser et réfléchir“. Début octobre sortira son livre „Des libertés et autres chinoiseries“, qui raconte les coulisses et les négociations secrètes menées autour des JO de Pékin. Robert Ménard avait créé RSF à Montpellier il y a 23 ans avec trois amis, Emilien Jubineau, Rémi Loury et Jacques Molénat. „Je n’aurais jamais imaginé que cela devienne cela. On l’avait créée sur une boutade: +allez, il y a Médecins sans frontières, créons sur le même modèle Reporters sans frontières+“, raconte Robert Ménard.
Mais ce culot était accompagné d’une solide ambition: créer „une organisation mondiale“, même si „cela faisait sourire tout le monde“, se souvient-il.
RSF a reçu en 2005 le prix Sakharov décerné par le Parlement européen, qui récompense des personnalités ou des organisations luttant contre le fanatisme et l’oppression. L’organisation compte aujourd’hui 25 permanents à Paris et une quinzaine dans le monde. Elle s’appuie également sur un réseau de près de 130 personnes à l’étranger. A quelques jours de quitter son bureau, il dit ressentir „un gros pincement au coeur“. Mais il se réjouit d'“un beau cadeau“: la libération cette semaine de Win Tin, journaliste et opposant birman, après 19 ans de captivité, ce qui faisait de lui le plus ancien détenu politique de ce pays gouverné par la junte.

 Robert Ménard, un tempérament fougueux pour défendre la liberté de la presse 

Fondateur et dirigeant de Reporters sans Frontières (RSF), Robert Ménard, qui a annoncé sa démission vendredi, a mis pendant 23 ans son tempérament fougueux au service de la liberté d’expression, de la défense des journalistes emprisonnés à la dénonciation des JO de Pékin. Né le 6 juillet 1953 à Oran en Algérie alors française, Robert Ménard arrive en France à l’âge de 9 ans, étudie dans un collège religieux et veut devenir prêtre avant d’étudier la philosophie, de devenir anarchiste puis trotskiste. Dès le milieu des années 1970, il s’engage dans les radios libres, à une époque où l’Etat détenait encore un monopole sur l’audiovisuel. S’avouant autoritaire, ce partisan d’une conception radicale de la liberté de la presse agace parfois ses partisans, quand il affirme par exemple qu’il descendrait „dans la rue pour défendre la presse FN“. En 1985, Robert Ménard fonde RSF sur le modèle de Médecins sans Frontières (MSF), afin de dénoncer les atteintes à al liberté de la presse et de venir en aide aux journalistes emprisonnés ou en proie à la répression. L’organisation, aujourd’hui présente à travers ses bureaux et des sections nationales sur les cinq continents, est financée grâce à la vente de calendriers, de photos, des subventions et des dons. Comme ceux, controversés, de fonds gouvernementaux américains via la fondation National Endowment for Democracy (NED) qui ne lui posaient „aucun problème“. Pour défendre sa cause, Robert Ménard est un adepte des opérations coup de poing, médiatiques mais toujours pacifiques. Après le début des émeutes au Tibet sévèrement réprimées par Pékin en mars 2008, il appelle les chefs d’Etat à boycotter la cérémonie d’ouverture des Jeux Olympiques de Pékin. Fin mars, il perturbe l’allumage de la flamme olympique à Olympie en brandissant un drapeau représentant les anneaux olympiques sous forme de menottes.
Quelques jours plus tard, les trublions de RSF, qui déploient le désormais célèbre drapeau noir sur les plus célèbres monuments parisiens, transforment le passage de la flamme dans la capitale française en véritable fiasco et provoquent l’ire de Pékin. Douze heures pile avant l’ouverture des JO, l’organisation réussit un coup d’éclat en piratant une fréquence FM à Pékin pour évoquer la liberté d’expression en Chine, alors que Robert Ménard qualifie la participation de Nicolas Sarkozy à la cérémonie d’ouverture de „capitulation en rase campagne“. Cuba, la Tunisie — dont il se fait refouler en 2005 à l’occasion du Sommet mondial sur la société de l’information (SMSI) — et la Syrie font aussi partie de ses cibles régulières. Le 14 juillet dernier, il est interpellé lors d’une manifestation contre la présence du présiden
t syrien Bachar al-Assad à l’occasion du défilé de la Fête nationale.
Il a aussi mis sa capacité de mobilisation en faveur de la libération de trois journalistes et des membres de l’association l’Arche de Zoé, emprisonnés au Tchad pour avoir voulu faire venir illégalement des enfants en France à l’automne 2007 ou de celle de la journaliste de Libération Florence Aubenas, retenue en otage en Irak en 2005. „Si on en parle pas, ça n’existe pas“ est un leitmotiv de RSF, qui publie chaque année un rapport annuel et plus de mille communiqués pour dénoncer les atteintes à la liberté de la presse et aux droits de l’Homme en général.