Marche citoyenne massive contre la violence dans les rues de Nouméa

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"On ne laissera pas une minorité détruire un processus de paix en cours depuis 20 ans!": comme des milliers de manifestants, Christine, jeune mère de famille, a défilé à Nouméa mercredi pour dénoncer les violences qui ont secoué la Nouvelle-Calédonie.

Le territoire a été secoué début août par une multitude de barrages et blocages, organisés par le syndicat indépendantiste, USTKE, qui réclamait la résolution d’un conflit larvé à la compagnie locale, Aircal. D’une ampleur exceptionnelle, le cortège, à dominante européenne mais où se mêlaient toutes les ethnies du Caillou, a rassemblé, selon un dernier comptage de la police, quelque 26.000 personnes. La plupart arboraient un tee-shirt portant le slogan „si y’a pas toi, y’a pas moi“, titre d’une récente exposition sur les accords de Matignon ayant pacifié l’archipel en 1988, imprimés pour l’occasion. Une délégation du „collectif citoyen“ à l’origine du mouvement, qui a pris naissance sur les réseaux sociaux d’internet, a été reçue à la province sud, au Congrès et au haut-commissariat. De très nombreuses entreprises et commerçants avaient fermé leurs portes pour permettre à leurs employés de manifester, sans pénalité financière. Le député UMP, Gaël Yanno, était présent à cette marche soutenue par la droite locale.

Le président du gouvernement collégial, Philippe Gomes, avait autorisé les fonctionnaires territoriaux à y participer, suscitant la colère d’élus indépendantistes. „Nous n’avons jamais été consultés. C’est scandaleux d’utiliser l’argent public à des fins politiques“, a protesté Yann Devillers (UC), membre du gouvernement, proche du syndicat USTKE, sur radio Djiido. Les participants ont cependant insisté sur „le caractère apolitique de l’initiative, destinée seulement à montrer qu’une majorité de Calédoniens veut construire un destin commun, et dire non à la violence“. „L’USTKE mélange syndicalisme et politique, c’est un cocktail dangereux. Il faut laisser les gens travailler en paix et arrêter les blocages“, selon Carl, un mécanicien kanak. „La violence n’apportera rien à ce pays. Il faut en revanche mieux partager les richesses pour pouvoir avancer ensemble: Blancs, Kanaks, Asiatiques, Polynésiens…“, juge Christian, étudiant né en Calédonie. Lors des affrontements, plus de trente gendarmes et policiers et plusieurs manifestants ont été blessés. Le calme est revenu après la signature d’un protocole d’accord le 6 août, mais l’USTKE reste mobilisée pour obtenir la libération de son président, Gérard Jodar. Ce dernier a été condamné à un an de prison ferme fin juin, pour entrave à la circulation d’un avion, lors d’une manifestation qui a dégénéré à l’aéroport de Magenta.

Après une quasi guerre civile dans les années 1980, entre Kanaks indépendantistes et loyalistes „caldoches“, les accords de Matignon puis celui de Nouméa (1998) ont instauré une paix fragile, fondée sur un partage du pouvoir politique et un rééquilibrage économique entre communautés. La construction d’un destin commun est le principal enjeu en Nouvelle-Calédonie où les clivages ethniques et sociaux restent forts, malgré l’accompagnement financier soutenu de l’Etat. Processus de décolonisation, l’accord de Nouméa prévoit la tenue d’un référendum d’autodétermination entre 2014 et 2018. L’approche de cette échéance radicalise les positions au sein des indépendantistes, électoralement minoritaires.