Le Groenland choisit massivement le régime d’autonomie élargie

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Les Groenlandais devaient voter massivement mardi en faveur d'une autonomie élargie proposée par leurs dirigeants, leur ouvrant la voie à l'indépendance totale du Danemark qui règne sur ce territoire stratégique de l'Arctique depuis près de trois siècles.

Les Groenlandais ont choisi, à une écrasante majorité et sans surprise, le régime d’autonomie élargie ouvrant la voie à l’indépendance de cette île stratégique de l’Arctique sous hégémonie danoise depuis près de 300 ans. Selon les résultats officiels définitifs du référendum organisé mardi, le oui l’emporte par 75,5% des suffrages exprimés contre 23,5% au non. 39.000 électeurs de 80 villes et villages étaient appelés à se prononcer. „Le Groenland a reçu un mandat pour aller plus loin“ sur le chemin de l’indépendance, a confié à la télévision groenlandaise Hans Enoksen, le chef du gouvernement local visiblement ému. Il a également remercié „le peuple groenlandais pour ce beau résultat“. Outre le droit à l’autodétermination et la reconnaissance en tant que peuple conformément au droit international, le régime, négocié par le gouvernement de Nuuk avec le Danemark, accorde aux Groenlandais le droit à leurs propres ressources (pétrole, gaz, or, diamants, uranium, zinc, plomb).

La langue groenlandaise devient par ailleurs la langue officielle. Peuplé de 57.000 habitants (50.000 Inuits et 7.000 Danois de la métropole), l’île bénéficiait jusqu’alors d’un statut d’autonomie interne depuis 1979. A Nuuk, la capitale, qui abrite le quart de la population, l’émotion était manifeste en particulier sur les visages des plus âgés. Les feux d’artifices ont éclairé le ciel avant même la publication des résultats définitifs. „C’est un jour de fête, un jour historique, que j’attendais depuis des années“, a ainsi estimé Anne Sofie Fisker, sexagénaire. „Il était temps que l’on recouvre nos droits et libertés volés à nos ancêtres, un peuple de chasseurs libres et fiers dont on a colonisé les terres“, a renchéri David Brandt, un ancien marin-pêcheur, résumant les frustrations accumulées depuis des générations. Pour l’ex-chef du gouvernement groenlandais, Lars-Emil Johansen, un des fondateurs du régime d’autonomie interne en 1979, „c’est le désir de retrouver leur fierté, de relever la tête après tant d’injustices du passé, qui ont fait voter les Inuits en masse“. „Oui bien sûr nous pouvons nous en sortir, oui nous le pouvons“, a-t-il affirmé, rêvant déjà d’indépendance dans „un avenir pas trop lointain“, à l’instar du chef du gouvernement actuel. „C’est une aspiration légitime, car le désir d’indépendance est profondément ancré dans l’âme inuite“, a-t-il ajouté. Certains, rares, déplorent ce nouveau régime. „Nous n’avons pas les moyens financiers d’assumer les responsabilités rétrocédées par le Danemark. Et c’est une illusion de croire que les ressources du sous-sol, encore hypothétiques, vont asseoir les bases de notre économie afin de réaliser notre indépendance“, a déclaré le président des Démocrates Jens Frederiksen.

L’île renfermerait dans ses eaux d’importantes réserves d’hydrocarbures, selon des estimations de scientifiques américains, en particulier au pôle nord, qui suscite les convoitises d’autant plus que le réchauffement climatique, constaté ces dernières années, pourrait en faciliter la prospection et l’exploitation. Recouvert à plus de 80% par la calotte glaciaire, ce territoire, qui renferme 10% des réserves d’eau douce de la planète, est aussi le plus menacé par le réchauffement climatique en Arctique. Sur le plan stratégique, le „oui“ n’aura pas enfin d’influence sur la politique étrangère et de sécurité de l’île, qui demeure du ressort de Copenhague, ni sur l’avenir de la base américaine de Thulé, selon le gouvernement de Nuuk. Un accord a été signé en 2004 sur la modernisation de l’accord de défense de 1951 passé par Copenhague et Washington, destiné à mettre à niveau cette base dans le cadre du système antimissiles américains, selon Josef Motzfeldt, ancien ministre groenlandais des Affaires étrangères, co-signataire de cet accord.